"Nous on n’est
pas des techniciens, on fait ce qu’on peut faire en le faisant au mieux. On
exprime ce que l’on a dans nos tripes (…)" (Looch
Vibrato des Magnetix – page 46)
Le cinéma Bis, d’exploitation et le rock garage sont
liés pour l’éternité. Les meilleurs représentants étant le groupe The Cramps
(même mort, leurs disques sont bien vivants !) pour la musique et le cinéaste/producteur
Roger Corman pour l’image sur grand écran ou en VHS sur une télé écran cathodique.
Ainsi il n’est pas étonnant de trouver au sommaire du # 21 (été 2021) du
fanzine Trash Times (= depuis 1996 "la revue des profanateurs de
sous-culture") le duo garage rock Magnetix et les comics book The Heap (le tas/monticule), Swang
Thing (La créature du marais), Man Thing (Homme-chose) exploités sur
les écrans de cinéma. Si l’interview des Magnetix réalisé en décembre
2016 lors de La Semaine du Bizarre à Montreuil (93) ne contient que quatre
pages, la créature Thing a le privilège d’avoir un dossier sous l’appellation
Swampology épais de 34 pages (+ la couv recto/verso) sur les 48 pages du
fanzine. Le comics The Heap a été
créé en 1942, Swang Thing en 1970 et Man Thing en 1972. Le dossier est
surtout consacré aux comics. Les films ont 6 pages avec des chroniques (Strangler Of The Swamp (1946), Death Curse of Tartu (1957)...). Le tout est richement
illustré de dessins, photos, couvertures, affiches. Le papier qui couvre le
dossier est vert, ce qui donne une patine rétro très sympa.
Dans les pages qui
restent, il y a une interview du groupe Hangman’s Chair, la rubrique chroniques
de films d’exploitation et curiosités oubliées avec Doctor Death d’Eddie Saeta (1973),
Disco 9000D’Urville Martin (1977), The
Animals de Ron Joy (1970), The Headless Eyes de Kent Bateman (1971), 7 Into Snowy de Antonio Shepherd (1978), Macumba
Love de Douglas Fowley (1960) et
The Search For Weng Weng d’Andrew Leavold (2007). Et enfin des
chroniques de fanzines et livres dont le Horror
Porn de Damien Granger. Après la vie en rose, optez pour la vie au vert !
"Nous, nous
voulons faire de la musique pour la danse, en partant du principe qu’un corps,
c’est de la chair, des sentiments, et de l’intelligence." (Page 137, Maurice G. Dantec, compositeur/musicien -synthétiseurs- d’Artefact)
Le journaliste, auteur/compositeur/chanteur et boss du
label Martyrs Of Pop, Jean-Emmanuel Deluxe (1) nous propose
une lecture instructive sur la « New Wave » (= nouvelle vague en VF)
en France entre 1978 et 1988, soit juste après le punk, à l’aube de la Touching
Pop et avant la French touch. Comme l’explique l’auteur dans l’introduction, "L’exhaustivité étant impossible et parfois
indigeste, nous nous excuserons par avance si votre groupe préféré de new wave
ne figure pas dans cet ouvrage ou s’il n’est que cité en passant" (page 10),
il est impossible de mentionner tous les groupes, chanteurs.es, artistes proche
de la scène (BD, mode, DJ de soirées, cinéma, fanzine, magazine, gérants de
lieux incontournables), ainsi la sélection se fera du terme générique qui
tourne autour Des Jeunes Gens Modernes.
Ce nom fut tiré du titre Les jeunes gens
modernes aiment leurs mamansen couverture du mensuel Actuel n°4, sortie le
01/02/1980. On y voyait les membres du groupe rennais Marquis de Sade avec soit disant leurs mères, ce qui était faux, mais
par contre un bon coup marketing pour Jean-François
Bizot, le boss d’Actuel, qui
voulait changer avec la nouvelle formule, l’image anar/gauchiste/68/hippie du
Larzac qui collait à la peau de la revue de la contre-culture. Pari réussi, car
cette couverture fera date, notamment dans les années 2000, avec en 2008,
l’exposition Les Jeunes Gens Modernes
à la Galerie agnès b., la publication
de trois compilations CD et vinyle et d’un documentaire de Jean-François Sanz sortie en DVD.
Couverture du n° 4 d’Actuel
Pochette de la compilation Des Jeunes Gens Modernes
Vol.1
C’est donc les artistes présents sur ces compilations,
et quelques figures du Top 50 qui sont traités sur les 256 pages du livre. Les
vedettes Étienne Daho, Indochine, Alain Bashung (1947-2009), Lio
ont leur chapitre, ainsi que les groupes ou duo Marquis de Sade, Taxi Girl,
Elli & Jacno, Les Rita Mitsouko. Plus obscurs, car
leurs carrières fut courte ou moins exposé dans les médiats, il y a au
sommaire, Modern Guy, Suicide Romeo, Marie et les Garçons, Artefact,
Claude Arto, Jérome Braque, Les Désaxés,
Guerre Froide, Martin Dupont, Trisomie 21,
X-Ray Pop, Les Olivensteins, Jad Wio.
Un chapitre sur les filles de la new wave, avec la reine des punks Edwidge Belmore (1957-2015 - Mathématiques
Modernes), Lizzy Mercier Descloux (1956-2004),
Elli Medeiros, Pascale Le Beurre (Complot Bronswick/Marc Seberg), Agathe Labernia (Regrets), Véronique Vincent (Les Tueurs de la
Lune de Miel), Mona Soyoc (Kas
Product), Marie France, Laurence Romance (Radio Romance), Isabelle Anténa.
Kas Product @ Ph. Jean Yves Legras
Un chapitre sur les personnalités qui ont gravités,
apportés leurs contributions autours de ses groupes, avec les journalistes Jean-Eric Perrin et sa rubrique mensuel
Frenchy
But Chic dans Rock & Folk, Michka Assayas, Louis Philippe, Jean-Pierre Dionnet, Géant Vert, les inévitables
Yves Adrien et Alain Pacadis
(1949-1986) qui rodent au fil des pages grâces aux nombreux témoignageset citations, Patrick Eudeline, mais aussi
Serge Kruger DJ et taulier de La Main
Bleue, les turbulents Bazouka, l’électron libre Ramuntcho Matta, l’excentrique Djemila Kheifa, l’évocation d’Yves Chaland (1957-1990) et Serge
Clerc qui a réalisé la couverture du livre. Sa patte graphique est
immédiatement identifiable. N’oublions pas les labels Sordide Sentimental, Celluloïd,
Les Disques du Crépuscules, Crammed Discs,
Invitation au Suicide, Les Disques du Soleil et del’Acier, Réflexes, New Rose et plus prêt de nous Born Bad, qui poursuit le travail de ses
ainés. Maintenant que vous avez la distribution des rôles, vous voilà près pour connaitre, ou avoir une petite piqure de rappel
(même si en ce moment le mot piqure énerve), au sujet de tous ce beau monde « tombé
au bon moment pour le bien de la France ».
Couverture du fanzine "Oneshot 2" (Sordide Sentimental) -1978-
De nombreuses personnalités sont interviewés, du moins
ceux qui sont « encore » vivant, car entre les fêtes, la poudre
blanche qui circule, le sida qui commence sa propagation, les désillusions des
années frics, ainsi que l’âge (les années 80 remonte à 40 ans), tout sa cumulé,
il y a eu de nombreuses victimes. Bref les survivants nous donnent de part leur
vécu, une floraison d’anecdotes pour nous faire vivre les soirées,
déambulations dans le Paris des années Palace,
Rose Bonbon, Bains Douches, Sébale, Sept. Attention, la province n'est pas oublié, ainsi que nos voisins Belges. Bref, Jean-Emmanuel Deluxe nous propose un voyage dans les années 80, mais
sans oublier le présent et le futur. S’il y aurait juste une petite remarque à
formuler, c’est l’emploi trop important de la phrase Les Jeunes Gens Moderne. Allez, que vous soyez moderne ou ringard, la
lecture, richement illustrée de photos et documents de French New Wave vous est chaudement recommandé !
Couverture du livre de l’exposition Des Jeunes Gens
Modernes