dimanche 2 mai 2021

HORSE TEMPLE "Arh Abrabh" (Zéro égal petit intérieur) – 23 avril 2021


Horse Temple est le projet solo de Guillaume Collet (Rome Buyce Night, Dernière Transmission) et tête pensante derrière le label Zéro égal petit intérieur. Ainsi pas étonnant de le voir parfois à la technique, au mastering des albums d'artistes édités sur le label. Après avoir publié en 2014 l’album Ghosts/Tracks, voici l’album Arh Abrabh, titre à tiroir et écriture inversé du prénom Barbara selon Guillaume Collet. La figure de la chanteuse Barbara (1930-1997) qui chantait L’Aigle Noir, colle bien à l’imaginaire pour illustrer ce recueil de 10 nouvelles sombres, comme la pochette couleur noir avec une gravure que Gustave Doré a réalisé en 1866. Ainsi, « atmosphère, atmosphère », il y en a tout au long de ce 2ème album qui raconte 10 histoires du point de vue de plusieurs protagonistes : victime, témoin, prédicateur, criminel et autres figurants. Pour la première fois, Guillaume Collet chante en anglais sur ses morceaux. Comme c’est nouveau, on ne va pas chipoter sur le phraser, parfois hésitant, limite novice, sur l’accent, car sa musique, construite autour du chant permet de mettre en valeur les petites imperfections vocales. Donnant ainsi une fragilité qui donne aux compos une belle patine sonore. 

Ici le style est un mélange de dark folk, de blues caverneux, poisseux, écorché, d’indie rock du bayou, de chamanisme sous l’emprise alcoolisé d’un whisky frelaté, soit un mix entre Sixteen Horsepower/David Eugene Edwards, Jeffrey Lee Pierce, Nick Cave, Hugo Race, PJ Harvey pour l’esprit de l’album et The Black Angels/The Brian Jonestown Massacre sur le morceau titre. Enfin un passage du film La Nuit du Chasseur de Charles Laughton (1955) et une ballade en compagnie de Jim Jarmusch à travers le film Dead Man (1995) entrent dans nos visions en noir et blanc. Guillaume a composé, joué (guitares, percussions, flûte), enregistré seul son album, sans oublier la conception de la pochette. L’album est sombre, tourmenté mais pas déprimant. Ici l’album en SOLO prend tout son sens. Certes la banlieue parisienne, notamment le 92 n’a pas le même paysage que ceux du « rêve » américain, par exemple autours du Mississippi et de Tucson. Malgré tout, comme Paris est (était ?) une ville d’accueil pour les musiciens/écorchés américains de blues, de jazz, il doit surement rester des vibrations dans l’air, qui sont allés jusqu’à la demeure de Guillaume Collet, qui a su attraper au vol l’esprit du blues. C’est du moins l’impression que donne son album solo.  


https://zeroegalpetitinterieur.bandcamp.com/album/arh-abrabh

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samedi 1 mai 2021

PINK FLOYD & SYD BARRETT "La Croisée des Destins" d’Alexandre Higounet (Le Mot et le Reste) – 18 février 2021


 

Des livres sur le groupe Pink Floyd, il y en a eu à la pelle, et il y en aura encore, vu le talent novateur des membres du groupe et la longue carrière remplit de succès. Après avoir publié en 2018 Which One’s Pink ? (Le Mot et le Reste), Alexandre Higounet poursuit sa lecture du groupe Pink Floyd, et plus particulièrement sur la personnalité de ses membres à faire évoluer la musique du groupe au fil du temps et des albums, avec La Croisée des Destins qui se concentre sur la relation de Syd Barrett (1946-2006) avec Roger Waters, Rick Wright (1943-2008), Nick Mason et David Gilmour. Le livre nous conte la naissance du groupe Pink Floyd, créé en 1965 par deux amis d’enfance Roger Waters et Syd Barrett. Ils se connaissent depuis l’âge de six ans. Ils sont voisins, habitent à Cambridge, leurs parents se connaissent bien, notamment la mère de Roger Waters, institutrice qui a dans sa classe l’élève Roger Keith Barrett. Les deux Roger sont dans la même école, le Cambridge Hight School for Boys, ainsi que David Gilmour. La suite est racontée dans le chapitre Pink Floyd, une histoire d’enfance.

Arthur Max Barrett meurt du cancer, alors que Syd n’a seulement que 16 ans. Il se retrouve choyé par sa mère Winifred Barrett. Son rôle de « mère poule » aura une importance sur le destin de Syd


Depuis 1963, Roger Waters (guitariste) et ses amis musiciens Rick Wight (clavier) et Nick Mason (batterie) jouent ensemble sous divers noms (The Abdabs, Sigma 6, The Meggadeaths, The Tea Set). En 1965 avec l’arrivé de Syd Barrett qui va, déjà dans un premier temps trouver le nom Pink Floyd (en référence aux musiciens de blues Pink Anderson et Floyd Council) et donner la couleur musical au groupe, en mélangeant expérimentation, jazz et pop. Syd Barrett est un fan de Bo Diddley et du groupe londonien de jazz d’avant-garde, musique improvisé, AMM. Avec Syd au sein du groupe, notamment à la composition des morceaux, qui vont éclore sur scène et sortir en 45t à partir de 1967, le premier étant Arnold Lane qui entre dans le TOP 20 anglais, puis See Emily Play, suivit de l’album The Piper At The Gates Of Dawn. Toujours en 1967, l’année s’achève avec le 45t  Apples and Oranges. A noter que les morceaux de ses trois 45t ne figurent pas sur l’album. Pendant cette période très féconde en matière de création, Syd Barrett consomme de plus en plus de drogue, notamment du LSD, alors que les autres membres du groupe, malgré le style de musique, nommé psychédélique, sont nettement plus raisonnable, voir abstinence sur la quantité des stupéfiants. L’abus de drogue va rendre Syd irritable, et au fil du temps de plus en plus imprévisible. Pour assurer les concerts, Roger Waters fait appel au pote d’enfance, David Gilmour pour seconder Syd à la guitare électrique. Nous sommes en janvier 1968, et seulement deux mois plus tard, Syd Barrett se fait expulser du groupe, car devenue trop instable. Pendant toute la carrière de Pink Floyd (toujours en activité), ce mois de mars 1968 avec l’abandon de Syd Barrett, l'ami d’enfance, restera comme un fardeau, un poids face à leur succès qui deviendra à partir de Dark Side on The Moon (1973) mondiale. A noter que sur l’album suivant, Wish You Were Here (1975), il y a le morceau Shine On You Crazy Diamond qui évoque Syd. Sans oublier The Wall (1979), où l'on peut voir apparaitre le fantôme de Syd.


L’auteur nous explique la complexité relationnelle entre un musicien/compositeur de génie sous l’emprise du LSD et des musiciens plus classique qui font le nécessaire pour que le groupe puisse avoir du succès en faisant beaucoup de concerts et de la promo (télé, radio, presse). Avoir un minimum de professionnalisme (venir aux répétitions, aux enregistrements télé, ne pas arriver en retard aux concerts, répondre aux questions des journalistes) et consommer à forte dose le LSD, ne fait pas bon ménage. Il est clair que la drogue fait perdre le contrôle face à la réalité du quotidien. Certes dans un premier temps, pour un artiste qui créé, d’autant plus quand c’est de la musique psychédélique avec en concert des projections stroboscopiques, avoir des visions hallucinogènes peut donner de la matière pour remplir la feuille blanche, non pas de poudre, mais de notes de musiques et de textes de chansons. C’est le cas de Syd Barrett. Entre 1966 et 1968 il est sous l’emprise de la drogue et sous une divinité créative qui vont aboutir aux singles (Arnold Layne, See Emily Play) et surtout au  premier album du Floyd, le majestueux The Piper at the Gates of Dawn, enregistré aux studios Abbey Road. Cet album devenu dès sa sortie le 5 août 1967 un classique du rock psychédélique contient que des chefs d’œuvres, dont Lucifer Sam et Interstellar Overdrive.


Entre la sortie de l’album ( 5 août 1967) et le renvoi du groupe (le 26 janvier 1968), il n'y a seulement que quelque mois. C’est le début de la descente dans l’ombre de Syd Barrett qui finira sa vie chez sa mère. Entre temps il aura réussi à faire trois albums solos (The Madcap Laughts, Barrett et Opel) avec une petite aide de David Gilmour et Roger Waters pour les finaliser.


Le texte contient de nombreuses citations des membres et proches du groupe puisées dans divers ouvrages, articles et documentaires. Ces citations permettent de donner du sens aux réflexions et analyses d’Alexandre Higounet au sujet du renvoi de Syd Barrett par les membres du groupe pour pouvoir continuer une carrière plus sereine. Mais Syd Barrett étant un amis d’enfance de Roger Waters et David Gilmour, ce renvoie restera toujours une zone sensible dans la mémoire du groupe, et une fragilité quand il s’agit de se remémorer les morceaux du premier album entièrement composé par Syd Barrett. Comme écrit dans le résumé en dos de couverture : « Ce livre analyse en détail les ressorts de leur relation et montre comment le destin tragique du premier a déterminé l’évolution artistique du second. »


 

Pour clore la chronique, une petite remarque pour le lecteur et l’auteur. Le livre contient beaucoup de « notes de bas de page », qui font parfois une demi-page de texte. Ces notes de bas de page sont certes instructives, il y a beaucoup d’infos, mais je trouve, de pars le nombre très importants de ces notes, que ça casse le rythme de la lecture. Car évidemment il est tentent de lire ses notes au fil du récit, avec le risque de perdre le fil de l’histoire. Dommage que l’auteur n’est pas trouvé un système pour incorporer ses longues notes dans le cœur du récit. Ceci étant dit, bonne lecture face à ses deux destins, Syd Barrett l’écorché et Pink Floyd la machine "écho responsable".


https://lemotetlereste.com/musiques/pinkfloydsydbarrett/