En ce mois de mars 2021, à l’occasion des 30 ans de la disparition de Serge Gainsbourg, j’ai écrit dans le blog des chroniques sur le n° spécial des Inrocks, sur le HS de Paris Match et sur la réédition de la BO du film Goodbye Emmanuelle. Si dans les années 70 et 80, on avait tendance à éclipser les collaborateurs de Serge Gainsbourg, pour juste laisser toute la lumière sur l’homme a la tête de choux, depuis les années 90, grâce à des passeurs comme Jarvis Cocker (Pulp), Mike Patton (Faith No More, Fantômas, Mr Bungle, Tomahawk), Massive Attack, Portishead, Mick Harvey et April March, on (re)découvre les hommes de l’ombre tels que Michel Colombier et Jean-Claude Vannier. Pour ce dernier, en 2018, deux journalistes passionnés Jullien Vuillet et Rémi Foutel ont publiés un livre qui lui est consacré sous le titre L’arrangeur des arrangeurs aux éditions Le Mot et le Reste. Ce livre est hautement conseillé ! Ma chronique ci-dessous :
Pochette de l’album "L’Enfant assassin des mouches"
Jullien Vuillet et Rémi Foutel sont deux passionnés de musiques et fétichistes de l’objet « vinyle ». Jullien Vuillet a été rédacteur en chef de la revue gratuite Star Wax, distribuée chez les disquaires indépendants et dans les salles de concerts. Rémi Foutel est enseignant et il écrit dans Star Wax et Trax. Petite précision, Star Wax est une revue orientée culture DJ, (musiques, instruments, platines, mode et vinyles) et amateurs de galettes rares pour trouver le sample qui tue. Le mot anglais qui désigne ces chercheurs d’or couleur sonore est digger. Ce détail est important pour comprendre la rédaction du livre consacré au compositeur, chanteur, arrangeur et orchestrateur Jean-Claude Vannier. Car si Jean-Claude Vannier est connu du grand public pour avoir composé avec Serge Gainsbourg le classique Histoire de Melody Nelson, le digger sait que ce 33t est l’arbre qui cache la forêt, à commencer par le premier album solo L’Enfant assassin des mouches, qui est la face cachée de Melody Nelson. C’est Andy Votel, un fan anglais, qui va créer en 2003 le label Finders Keepers pour rééditer ce disque qui n’était sorti en 1972 qu’à 1000 exemplaires, mais aussi éditer en 2017 la magnifique BO perdue du film Les chemins de Katmandou.
Pochette du 45t d’Annie Philippe, arrangements et direction J.C. Vannier
Suite à une interview parue sur le 3 juillet 2013 sur le site internet de Star
Wax et à la demande de l’éditeur Le Mot et le Reste d’approfondir
l’entretien, Julien Vuillet en compagnie de Rémi Foutel, vont
pendant 4 ans interviewer Jean-Claude Vannier, pourtant pas habitué à
répondre aux questions. Les journalistes ont également interviewé des musiciens
pour y rapporter leurs souvenirs de travail, collaboration. Le résultat donne
un livre de 400 pages avec pour fil conducteur la longue et hétéroclite
discographie du « maestro », qui a commencé en 1964 avec Alice Dona.
Parmi la liste d’artistes avec lequel il a travaillé, notons Michel Magne,
Brigitte Fontaine, Claude Nougaro, Jane Birkin, Barbara,
Michel Polnareff, Les Fleurs de Pavots, Annie Philippe, Le
Système Crapoutchik, Françoise Hardy, sans oublier La Drague,
le tube de l’année 1973 de Guy Bedos et Sophie Daumier, et bien
sûr Serge Gainsbourg pour notamment les nombreuses BO de films, (Paris
n'existe pas, Cannabis, Slogan, Les Chemins de Katmandou, La Horse, Sex Shop).
Des tubes, des bides, des stars, des inconnus, de la pop, de l’expérimental, du
jazz, de la variété et de la chanson française, qu’importe, il y a toujours une
touche de Jean-Claude Vannier qui fait plaisir à entendre. Trait qui est
mis en avant dans le livre.
Pochette du 45t de Sex Shop, musique de J.C. Vannier et S. Gainsbourg
Avec toutes les références évoquées, la lecture de L’arrangeur des
arrangeurs est plutôt destinée aux (et futurs) collectionneurs de vinyles
qui vont trouver ici une mine d’infos et de références. Pour les jeunes
compositeurs, ce livre peut aussi donner des ailes, vu que Jean-Claude
Vannier est un pur autodidacte qui s’est fait par la force de son travail.
Attention, pas d'inquiétude, il y a aussi beaucoup de souvenirs liés aux
rencontres à l'époque folle des années 60's-70's qui surgissent de la mémoire
de Jean-Claude Vannier et qui vont intéresser le plus grand nombre. Tous
ses moments de lectures sont des petites notes de musiques qui nous font
saliver d'une époque "du possible et de liberté".
On finit la chronique avec cette phrase de Jean-Claude Vannier, qui
résume bien la personne : « [Un monde] sans musique, je m’en fiche puisque
j’ai de la musique dans ma tête en permanence. Un monde sans bruit, ça veut
dire qu’on est sourd… J’en souffrirais. » (Page 323).
lemotetlereste.com/musiques/jeanclaudevannier/
larrangeurdesarrangeurs.wordpress.com/
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