La musique est un vaste territoire. Du premier cri que l’on émet dès notre naissance sur terre, après 9 mois tranquille et au chaud dans le ventre de sa mère, à la découverte de la musique, soit par les parents, les connaissances ou les cours de musique avec les gammes jouées à la flute à bec, arrive le temps des préférences vers un genre, une chapelle musicale: pop, rock, jazz, funk, reggae, contemporaine, classique, lyrique, variété, world, techno, electro, traditionnel, comptine, expérimental ou chant de la mer au clair de lune, à chacun de trouver sa zone de confort.
Aquaserge est un groupe français à géométrie variable, né en 2008 qui navigue entre divers styles musicaux tel le funambule pratiquant un exercice d’équilibriste de haute volée. Chanson, pop, jazz, avant-garde et maintenant musique contemporaine avec The Possibility of a New York for Aquaserge, nouvel et 46ème volume dans la série de haute qualité Made To Measure. Sachant que le Vol. 1 (réédité en avril 2021) avec Minimal Compact, Tuxedomoon, Aksak Maboul, Benjamin Lew date de 1984, 37 ans séparent ses deux volumes.
Quand un.e artiste, un groupe réalise un album pour Made To Measure, c’est pour proposer une musique différente de sa discographie habituelle, ce qui permet de mettre la barre vers l’inconnu, le temps de l’attraper. Ainsi comme il est écrit dans le dossier de presse, "avec ce 6ème album, le groupe fait le pari heureux d’explorer les eaux intérieures de la musique contemporaine du 20ème siècle, à travers quatre de ses grandes figures atypiques : Giacinto Scelsi (1905-1988), Gyorgy Ligeti (1923-2006), Edgard Varèse (1883-1965) et Morton Feldman (1926-1987)."
Photo @ Bruno Persat
Évidemment quand on a peu, voir aucune connaissance en musique contemporaine, et surtout sur les œuvres choisies pour cet album, difficile d’évaluer à l’oreille le travail de recherche, d’adaptation/inspiration des morceaux repris ou imaginés dans l’esprit « libre » des compositeurs par Aquaserge. Ce qui est clair, c’est que le son -sa matière, sa texture sonore- est l’élément-clé qui relie les huit morceaux du disque, agencés en trois pièces lentes, étirées et aériennes. Pour malaxer et donner parfois une dimension 3D aux compositions, les 9 membres d’Aquaserge (pour rappel, Julien Gasc en faisait partie jusqu'à la parution du disque) ont sorti l’artillerie lourde : synthétiseurs à foison, guitares, basses, flutes, saxophones, clarinettes, vibraphone, cloche tubulaire, percussions et des voix, beaucoup de voix. Le résultat donne une musique riche, remplie de chemins de traverses où l’aspect théâtre vivant prend tout son sens. On a l’impression que chaque instrument est un personnage, comme dans le livre disque Piccolo Saxo et Compagnie d’André Popp.
Si Un Grand Sommeil Noir (sur un poème de Paul Verlaine) et 1768°c (à Edgard Varèse) qui ouvrent l’album sont accessibles pour les néophytes, de par ses mélodies, à partir de Hommage à Giacinto Scelsi ça se corse. Là on entre dans une pure composition de musique contemporaine destiné aux connaisseurs. Petite pause en chanson avec Only (Version 1) pour mieux affronter la déferlante free, d’improvisation libre de Comme des carrés de Feldman. Only (Version 2) permet à nouveau de souffler (c’est le mot !) avant de s’embarquer dans les 10 minutes de Nuit Terrestre (à György Ligeti) suivi de Nuit Altérée (à György Ligeti) qui clôturent l’album. Pour ce final Aquaserge s’est imprégné du propos de Ligeti qui dit : "A la surface immobile de l’eau on voit se refléter une image, puis l’eau se ride, l’image s’altère et disparaît. Très progressivement la surface de l’eau s’immobilise, apparaît ensuite une nouvelle image, différente." Ainsi Nuit Terrestre est un morceau proche de l’ambient ou le silence a aussi une résonance, une présence. Vous l’avez compris, pour être en phase avec la musique gravée sur le disque, cela vous demandera d’être plus attentif que pour l’écoute d’un album pop. Pour clore cette chronique, un petit mot sur le visuel de la pochette. La peinture a pour titre Self-portrait at an Easel. Elle a été réalisée en 1556 par l’artiste italienne Sofonisba Anguissola (1532-1625). Pour le rendu final de la pochette, Benjamin Glibert c’est permis quelques retouches visuelles qu’on vous laisse découvrir en faisant le jeu des comparaisons.
"Self-portrait at an Easel" de Sofonisba Anquissola (1556)
Les morceaux de cet album font partie d’un spectacle musical et théâtral qui a pour titre, The Possibility of a New Work for Aquaserge – Perdu dans un étui de guitare. Ce spectacle, monté par Aquaserge en collaboration avec Le Lieu Unique à Nantes, sera bientôt à Perpignan, Grenoble, Bruxelles et Lyon (cf dates ci-dessous). Surveillez la page Facebook d’Aquaserge pour les prochaines représentations.
Dates des prochains concerts d’Aquaserge :
12.11.2021 PERPIGNAN, Festival Aujourd'hui Musiques
13.11 MONTINARGUES, Atelier Guest
14.11 GRENOBLE, Le Ciel
27.11 BRUXELLES, Festival Ars Musica, Halles de Schaerbeek
18.12 LYON, Opéra Underground, feat. Jeanne Added
https://aquaserge.bandcamp.com/album/the-possibility-of-a-new-work-for-aquaserge
http://aquaserge.com/web/index.php
https://www.facebook.com/aquasergee
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