Le réalisateur Edgar Wright (Shaun of the Dead -2004-, Le Dernier Pub avant la fin du monde -2013-) a fait un excellent boulot sur son documentaire consacré au groupe/duo Sparks fondé et mené depuis 1969 par Russell (qui fait craquer les filles) et Ron (celui qui a la moustache à la Hitler ou Charlot –au choix-) Mael.
Pendant deux heures et 15 minutes, on n’a pas le temps de s’ennuyer, tant le montage du doc est fantastique. Entre les nombreuses images d’archives, l’interview des frères Mael avec leur humour pince sans rire, les ex musiciens de Sparks, qui ne sont pas amère et plutôt conciliant malgré leur « licenciement » et un nombre étonnant d’intervenants (1), le tout sans tomber dans le zapping qui donne le mal de tête, la carrière des Sparks défile devant nos yeux avec magie et étonnement. En prime, pour donner des infos, lier les époques, il y a des dessins animés et de l’animation image par image, ce qui donne un tempo ludique du meilleur effet.
A travers ce documentaire, on se rend compte que ce groupe américain de Los Angeles, au profil décadent du type anglais, sont des gros bosseurs qui passent leur vie à prendre des risques, pour ne pas sortir le même album. Ainsi ils ont fait du glam/art rock, de la pop, de la new wave, de l’expérimental, inventé en 1979 la synth-pop avec l’album N°1 Heaven produit par Georgio Moroder, album dont Erasure, Human League, New Order, Pet Shop Boys vont s’en inspirer. D’ailleurs l’accroche du film sur l’affiche est bien trouvée : Le groupe préféré de votre groupe préféré.
Pêle-mêle, on y apprend qu’en tant que fan de cinéma, notamment de Godard et de Bergman, Russell et Ron ont eu en projet de faire un film avec Jacques Tati, qu’ils ont rencontré et un autre avec Tim Burton. Ce sera finalement un autre film, Annette réalisé par Leos Carax qui se fera. Cette comédie musicale passée au festival de Cannes 2021, est toujours sur les écrans. Un passage amusant (il y en a beaucoup, vu que les frères Mael ont beaucoup d’humour), c’est l’extrait du film Le toboggan de la mort de James Goldstone (sorti en 1977) avec les Sparks qui jouent en concert (voir l’extrait YouTube plus bas). La B.O. du film est de Lalo Schifrin.
Depuis 1969, quand il s’appelait Halfnelson, avec l’unique album produit en 1971 par Todd Rundgren, rapidement devenue Sparks (clin d’œil aux comiques Marx Brothers, devenue Sparks Brothers et ne garder que Sparks pour ne pas être prit pour un groupe de comiques), le groupe n’a pas cessé d’innover, de surprendre, qu’importe un succès ou pas, ne pas rester sur ses acquis, dans sa zone de confort pour satisfaire un public qui n’aime pas être bousculé. Cette façon de faire a rendu le groupe intègre, jusqu’à encore aujourd’hui en 2021 avec la B.O. de la comédie musicale Annette et en 2020, le magnifique 25ème album A Stready Drip, Drip, Drip, qui possède un son frais et dynamique, qu’on n’imagine pas que les musiciens et compositeurs ont 76 ans pour Ron et bientôt 73 ans pour Russell. A noter qu’ils sont tellement inséparables, qu’en 52 ans de carrière ils n’ont pas fait d’album en solo. Ils sont liés, ils ont besoin l’un de l’autre, pour créer, pour se rassurer et se lancer des défis.
Petite précision, dans le doc, on ne voit pas le côté privé, familial (femmes, enfants, ex ?) des deux frères. On évoque juste au début du doc, les parents, dont le père qu’ils ont perdu étant enfant. On apprend que les parents aimaient l’art, le père dans ses loisirs faisait de la peinture, et la mère les a envoyés voir les Beatles en concert. Sinon à part les parents, on voit exclusivement le côté Sparks, ce qui est très bien.
On n’a pas l’habitude d’aller au cinéma voir un
documentaire consacré à un groupe de rock, éventuellement un biopic. Ce style d’exercice
est plutôt destiné pour la télé, une chaine comme Arte ou la sortie DVD. Et bien
ce Sparks Brothers passe très bien
sur l’écran de cinéma dans le confort d’une salle en compagnie de spectateurs.
Au risque de se répéter, Edgar Wright a
réalisé un excellent doc avec un montage vivant. Il est fan des Sparks, cela se sent, il a réussi à mettre
tous les atouts des frères Mael en
valeurs, tout ça pour le bonheur du spectateur qui sort de la séance avec des
souvenirs, plein les yeux, et l’envie de se replonger dans leur énorme
discographie. Aller on s’écoute le single Girl From
Germany (1973) avec les paroles qui donne ça : "Ma parole, elle vient d'Allemagne, Eh bien, c'est le
même vieux pays, Mais les gens ont changé". Voilà l’humour des Sparks qu’on
aime !
(1) : Parmi les nombreuses personnes interviewés il y a entre autre : Beck, Stephen Morris et Gillian Gilbert (Joy Division, New Order), Vince Clarke (Depeche Mode, Yazoo, Erasure), Jane Wiedlin (The Go-Go’s), Alex Kapranos (Franz Ferdinand), Todd Rundgren, Tony Visconti, Georgio Moroder, l’acteur Mike Myers, Steve Jones (Sex Pistols), Paul Morley (Art Of Noise), Roddy Bottum (Faith No More), Thurston Moore (Sonic Youth), Flea (Red Hot Chili Peppers), les musiciens qui ont joués dans Sparks, les attachés de presses, producteurs, présentateurs télé.
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