dimanche 26 février 2023

"RUE HAXO" de Cécilia Jauniau (Les éditions de L’espace d’en bas) – 14 février 2023



L’artiste Cécilia Jauniau a étudié les arts plastiques à l’Université Paris 8 et au Queen’s College de New York. A la vocation de peintre, Cécilia Jauniau se tourne vers la photographie, tout en gardant un intérêt pour le dessin. Le corps féminin mit à nu est son modèle et l’origine du monde sous toute ses coutures (recto-verso) est une de ses inspirations. Son nouveau livre, intitulé Rue Haxo (rue située dans le 19ème et  20ème arrondissement de Paris. Rue où le 25 mai 1871, il y a eu par la Commune de Paris, une exécution par fusillade de 50 otages) nous montre deux facettes de son travail. La première est une série de collages photographiques avec parfois un détail réalisé au dessin, le tout sur fond noir. Les photos nous montrent un assemblage de corps nu féminin, où parfois une colombe, un crucifix, une goutte de sang, -mais si l’on regarde de plus près, il s’agit d’un clitoris- sont présents. La deuxième partie du livre s’ouvre avec la phrase : "Hier soir, j’avais envie de t’aimer".  Sur la page de gauche, il y a la photo d’un sexe féminin (qui sont des autoportraits de l’artiste) et sur la page de droite, un dessin en noir et blanc sur une feuille d’écolier à lignes, qui fait un effet de miroir à la photo. L’ensemble à une connotation érotique, avec une touche fétichiste, de par la position du corps. Cette deuxième partie du livre s’achève avec la phrase "Ces photographies ont été prises entre 2012 et 2021 par R et E, et moi. La plupart étaient destinées à ma correspondance avec E."

Cette information, donne du piment au lecteur qui se retrouve ici voyeur face à ces photos privés qui lui sont offertes par l’artiste. J’aime cette démarche, proposition « impudique », qui passe de l’intime au public. J’ai demandé à Cécilia Jauniau, de nous éclairer sur ce travail.

Cécilia Jauniau : De l’intime au public? Je suis partie de cette idée qu’ "Il y a des choses qui ne doivent pas mourir". Ces choses, c’est l’image du désir en citant Hervé Guibert « chaque image est une image du désir ». Chaque image produite (exhibition), puis regardée/vue (par les autres ou par moi) ont une capacité à m’exciter. J'ai tenté de maintenir cette excitation pour créer un objet. Il y a là une recherche d’une vérité, la vérité du désir. Et l’amour.

« Impudeur »? Audace ! Le corps est sublimé.

Cécilia complète son propos, avec ce texte que Véronique Massa (ex chanteuse des Flaming Demonics) a écrit sur le travail de Cécilia:

« (…) Autoportraits sans mimiques,

Je vous montre, je m’exhibe, je vous excite et qu’est-ce que ça vous fait?

Clics, photo-matic.

Pas de filtres, pas d’effets.

Impact épidermique. »

J’ai également demandé à Cécilia de nous donner quelques clés sur la conception du livre Rue Haxo :

Cécilia Jauniau : Rue Haxo est un livre d’artiste composé de collages (réalisés à partir d'autoportraits et de photographies de femmes prises depuis 2011 et de quelques images prises dans les magazines), de dessins et photographies de mon sexe (principalement autoportraits. Il y  a notamment parmi ces photographies, deux photographies d’E.). 

Cette idée de livre rassemblant diverses images de moi (autoportraits ou images qu’E. a faites de moi) a déjà quelques années. De nombreuses versions ont été faites jusqu’à qu’E. me suggère l’idée de confronter photographies et dessins (dessins créés principalement pour le livre dont la répétition des lignes permet de créer du volume, des courbes et surtout des zones totalement noires, objets délicats et affirmés qui rappellent le sexe). L’idée de la répétions des photographies et dessins étant de créer un geste radical.

J’y ai ensuite intégré les collages créés à la même époque. Des collages aux photos/dessins, c’est un jaillissement. « Des photos déjà épurées où la chair ne demandait qu’à sortir du cadre. C’est fait. » (Véronique Massa, extrait d’un texte à propos de mon travail)

Dans ces collages sont intégrés des fragments de mon corps à ceux d’autres femmes. Apparition/disparition? 

La sexualité est apparu à cette période comme un moyen de se déplacer, d’être déplacé, de s’évader (oiseaux aussi dans les collages), d’occulter l’idée de la mort. Le sexe comme la radicalité pour tenter d'occulter l’idée de la mort. 


E. c’est l’artiste Éric Pougeau (1), dont c’est ici sa première implication en soutien pour accompagner un projet. A noter que Cécilia Jauniau est présente en tant que modèle dans le livre Actes (2) d’Éric Pougeau.

De part son format de poche 13x19cm, une mise en page aérée, Rue Haxo est un livre qu’on peut facilement glisser dans une petite pochette, pour le consulter au grès des envies, à l’abri ou pas des regards indiscrets. L’impudeur de Rue Haxo éveille le désir. A vous de l’ouvrir, de tourner les pages, et voir si vous allez gouter au fruit défendu... sans noyau, sans pépin, mais avec de la pelure.

 

(1)-(2): Interview et chronique sur le travail d’Éric Pougeau ici: https://paskallarsen.blogspot.com/2022/02/eric-pourgeau-actes-white-rabbit-prod.html

https://www.instagram.com/cecilia_jauniau/?hl=fr

https://www.facebook.com/cecilia.jauniau

https://www.lespacedenbas.com/#/fr/projets/view/23/rue-haxo

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