Le label Ace Records, spécialisé dans les rééditions, compilations de groupes des années 60, 70, nous gâtes une fois de plus avec une compilation qui regroupe l’intégralité des 45 tours du girl group Goldie And The Gingerbreads. Ce quatuor féminin américain adulé par tous les groupuscules mods du globe a eu une courte carrière qui a commencé en 1962 et fini en 1967. En cinq ans elles ont publiés dix 45 tours sur des labels de renom, Spokane, Decca et ATCO une subdivision du géant Atlantic. Elles ont fait des tournées avec les Rolling Stones, Kinks, Yardbirds, Hollies, Animals, mais elles sont restées inconnu du public. Ainsi pas d’album pendant leur courte existanse. Le label Ace a publié des morceaux dispersés sur les compilations Girls With Guitars et Where The Girls some… Par contre, bizarrement il n’y a aucun morceau sur les compilations Girls In The Garage, surement à cause des droits. Ainsi, près de 60 ans plus tard, voici la première compilation, anthologie consacrée à Goldie And The Gingerbreds, édité en vinyle rouge (16 titres) et CD (20 titres) avec inclut dans le CD un livret de 40 pages avec une interview fleuve des membres du groupe, le tout avec de nombreux documents d’archives.
En 1962 à New-York, la jeune Genya Zelkowith (ses parents sont des émigrés polonais), mais son surnom est Goldie, va avec des amis passer une soirée dans un club. Le groupe local de Doo-wop The Escorts anime la soirée. Après quelques verres, Genya décide de rejoindre le groupe pour chanter. C’est la révélation, tant sa voix a du coffre, de la prestance. Le leader et claviériste du groupe Richard Perry (futur producteur de Captain Beefheart, Barbra Streisand, Ringo Starr, Carly Simon, Diana Ross) décide de congédier leur chanteuse et d’embaucher direct Genya dans son groupe et d’être par la même occasion son amant. La nouvelle formation est rebaptisé Goldie and The Escorts. Mais l’aventure va tourner court, quand Genya voit en concert un groupe avec la jeune batteuse âgée de 16 ans Ginger Bianco. C’est le coup de cœur artistique, elles décident de créer un groupe exclusivement féminin qu’elles nomment Goldie And The Gingerbreads.
Reste à trouver les autres filles, ce qui ne sera pas facile car nous somme en 1962. Ok, pour voir des femmes faire des cœurs/voix dans des groupes dirigés/créés par des hommes, mais un groupe féminin affirmé-elles portent des pantalons!-, géré par des femmes, c’est autre chose. Après quelques musiciennes de passages, la formation va se stabiliser avec l’arrivée de Margo Lewis au synthétiseur orgue Hammond B3 (oui le même modèle utilisé par Ray Manzarek dans les Doors à partir de 1965) et Carol MacDonald à la guitare. Ainsi, pas de bassiste dans la formation, le son de la basse est joué avec l’orgue. Ce sera cet instrument qui va donner la touche singulière et rock’n’roll au groupe, Pour leurs premiers concerts en ville, le groupe est présenté comme étant : « The Only All-Girl Twist Band in the World ». Ce slogan n’est surement pas faux, car voir en 1962-63 un groupe féminin blanc et indépendant jouer du rock, tenté de pop et de R&B, ça ne devait pas courir les salles. Depuis, ce type de formations a fait son chemin (The Runaways, The Go-Go’s, The Bangles, The Slits, Les Calamités, L7, Massicot …).
Le groupe joue régulièrement dans le club Wagon Wheel. Le bouche à oreille se répandant sur la qualité musical du quatuor, notamment grâce à Eric Burdon du groupe The Animals, les voilà qu’elles se retrouvent à jouer lors d’une fête organisé par le photographe Jerry Schatzberg, en l’honneur des Rolling Stones pour leur première tournée américaine de 1964. A cette soirée il y a avait aussi Andy Warhol et Ronnie Spector. De cette rencontre, Goldie And The Gingerbreads se retrouve embarqué à jouer en Angleterre en première partie des Stones. Elles feront d’autres premières parties pour The Kinks, Yardbirds, The Hollies, The Animals. En 1965 elles publient le single Can’t You Hear My Heartbeart, pensant pouvoir en faire un tube pour passer à l’étape supérieur. Malheureusement elles se font couper l’herbe sous le pied par le groupe Hermans Hermits qui publie également ce morceau. Le jack pot sera pour eux, du moins sur le marché américain où le groupe obtient la 2ème place dans les charts. Malgré leur succès d’estime et la reconnaissance auprès des plus grands groupes du moment, Goldie And The Gingerbreads n’arrive pas à percer. Le comble, aux states, les radios qui diffusent la soul et le R&B ne passent pas leurs morceaux, car elles sont blanches et les stations de radios dirigés par des blancs ne veulent pas leur musique R&B destiné au public noir. Toujours des histoires de cultures et de couleur de peau ! Le succès ne venant pas, le groupe se sépare.
Goldie fera quelques singles produit par Andrew Oldhan, dont Goin’ Back. Là encore des problèmes, car le morceau était destiné à Dusty Springfield qui en fera un succès. Décidément quand l’herbe ne veux pas pousser … Il y aura une tentative de reformation en 1967, en pleine période hippie et psyché avec la sortie du single Walking in Different Circles, mais pas plus de succès. C’est définitivement la fin du groupe. En 1968, de retour au states, Goldie qui retrouve son nom civil Genya Raval, va rejoindre le groupe masculin Ten Wheel Drive qui sortira quatre albums de soul bien trempé. Dans les années 70, elle va fréquenter le CBGB et produire le premier album des Dead Boys avec Steve Bator. Quand à Ginger Blanco et Carol McDonald elles ont formés le groupe funky Isis, également exclusivement une formation féminine avec cuivres, soit sept musiciennes. Quand à Margo Lewis et son orgue magique, il n’y a pas eu d’autres groupes, ni disques en solo.
Comme tous les précurseurs, le groupe Goldie And The Gingerbreads n’a pas eu le succès mérité. Elles ont défrichés le rôle de la femme dans la musique rock et la femme blanche dans la musique R&B, se trouvant coincée pour être juste une curiosité musicale, alors qu’elles ont donné les bases de ce qu’allais devenir les « girls with guitars » avec la scène du CBGB (Patti Smith, Lydia Lunch) dont Genya Raval sera la marraine officielle, le punk et le rock indé. Cette belle compilation permet de rendre justice, même 60 ans plus tard (c’est mieux que jamais) à ce quatuor unique et essentiel.
https://acerecords.co.uk/thinking-about-the-good-times-complete-recordings-1964-1966
https://www.goldieandthegingerbreads.co/
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire