samedi 22 juillet 2023

"LES DIABLES" de Ken Russell (Films Sans Frontières) – 8 mai 2023


Après le visionnage du DVD du film Les Diables de Ken Russell, réalisé en 1971, une pose est de rigueur pour se remettre de cette expérience visuelle et sonore sous acide. On respire un bon coup et on prend la plume pour mettre ses impressions. Pendant près de deux heures, l’acteur Oliver Reed et l’actrice Vanessa Redgrave vont nous entrainer dans une spirale outrancière, baroque, rock’n’roll, où le sexe, la religion, le pouvoir, les trahisons, la cupidité, la luxure et le vice prennent plaisir à se mélanger dans une partouse visuelle sans limite. On est ici à la croisée d’un film d’Alejandro Jodorowsky, Pier Paolo Pasolini, Federico Fellini, d’une folie à la The Rocky Horror Picture Show de Jim Sharman, la perversité de Orange Mécanique de Stanley Kubrick, le délire pop visuel de Le Roi et l’Oiseau de Paul Grimault dans un tableau de Salvator Dali, des prémices de la comédie musicale Tommy que Ken Russell réalisera en 1975. Bref, il faut avoir l’esprit bien accroché, bien ouvert pour suivre le film Les Diables, où l’église et le pouvoir politique prennent cher.


Synopsis : -Librement inspiré de l’affaire des possédées de Loudun qui avait défrayé la chronique en France en 1634-, "l’histoire de ces Diables prend place en 1634, dans la ville de Loudun, où l’abbé Urbain Grangier (Oliver Reed) exerce une très grande influence sur les gens de la ville. Collectionnant les conquêtes féminines, il refuse d’abattre les remparts de la ville, qui a échappé aux guerres de religions. Mais au couvent des Ursulines, l’inquiétante Mère Jeanne des Anges (Vanessa Redgrave) se déclare possédés par Grangier. Pour l’envoyé de Richelieu, c’est l’occasion parfaite d’éliminer Grangier, la folie va pouvoir commencer…". (Films sans Frontières)

Ken Russell, ne se donne aucune limite, ainsi les décors sont énormes, les costumes sont flamboyants (en Angleterre, la mode glam rock est à son top), le texte à l’accent théâtral est digne d’un opéra, les acteurs sont tous géniaux, notamment l’Abbé Barré, interprété par Machael Gothard (qu’on va revoir l’année suivante dans La Vallée de Barbet Schroeder). Avec sa tête de hippie biker échappée d’une production Roger Corman, l’Abbé Barré porte bien son nom, car spécialisé dans l’exorcisme, il prend un malin plaisir à faire souffrir ses « patients ». La souffrance inffligée aux pêcheurs le met en transe. Le genre de personne que l’on n’aimerait pas croiser. Mais surtout, au premier plan, Oliver Reed, ici encore plus fou que dans ses rôles pour les films de La Hammer réalisés par Terence Fisher (Les deux Visages du Docteur Jeckyll, La Nuit du Loup-Garou), car il porte en lui le personnage de l’Abbé Urbain Grangier. Sur chaque plan, son visage, sa corpulence est digne d’une rock star, près à accueillir ses groupies dans sa loge et finir la soirée avec elles dans un hôtel. Avec ce rôle, Olivier Reed donne toute la démesure de son jeu d’acteur, qui ne recule devant rien, jusqu’aux cheveux passé à la boule à zéro pour finir au bûcher sur la place public. On a mal pour lui ! Sauf la Mère Jeanne des Anges interprétée par l’étonnante Vanessa Redgrave (qui s’est fait connaitre pour son rôle de Jane dans le film Blow-Up de Michelangelo Antonioni), qui voit là une vengeance envers l’homme qui n’a pas voulu d’elle. On peut comprendre l’Abbé Urbain Grangier, car La Mère Jeanne est à la fois bien allumée, et le fait qu’elle soit courbée, ne lui donne pas un charme fou. A noter que la Mère Jeanne essai de tenir en laisse ses jeunes brebis religieuses, mais dès qu’elle a le dos tourné, les brebis ne tiennent pas en place, ainsi pas étonnant que dans la deuxième partie du film, nos jeunes sœurs-nonnes deviennent lubriques. Dès qu’une partouze s’offre à elles, elles n’hésitent pas à faire tomber leur robe blanche. Pour filmer ce genre de scène de jambes en l’air, on peut dire que Ken Russell est un maestro. Il a le don de réaliser des images à la fois belles et sans filtre. Rien que ce long passage donne à Les Diables les caractéristiques d’une œuvre culte.

Si dans les années 80, Les Diables est bien sorti en VHS à la location (chez Warner Home Vidéo), par contre il n’était à ce jour jamais sorti en DVD sur le marché français. Ce film sulfureux et maudit a du faire peur aux éditeurs. Déjà, à sa sortie sur les écrans en 1971, de par sa nature profondément anticléricale, violente et érotique, les critiques ont été assassines, les conservateurs effrayés. Nous sommes au début des années 70’s, époque de liberté sexuelle où tous est possible, notamment au cinéma. Aujourd’hui, en 2023, un film comme Les Diables serait impossible à réaliser, ou alors en direct to vidéo dans un circuit restreint. Grâce à Films Sans Frontières, vous allez pourvoir (re)voir ce film hors norme en DVD. Par contre il n’y a pas d’édition Blu-ray, pour rendre justice aux magnifiques images baroques du film. La prochaine étape avec en prime des bonus ?

https://www.films-sans-frontieres.com/




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