lundi 9 octobre 2023

MEDUSA FANZINE n°31 – Octobre 2023

Après les numéros mastodontes 29 et 30 et leurs 200 pages généreuses (1), Médusa devient raisonnable avec un numéro 31 de 82 pages. Ce fanzine dédié au cinéma bis est porté à bout de bras par Didier Lefèvre. Mais, comme il n’a que deux bras et deux mains pour écrire, plus deux yeux pour visionner les films, notre passionné est aidé à la rédaction des textes, par neuf garçons aussi passionnés que lui. Pour la parité homme-femme, il faut se contenter de Chloé au poste de traductrice. Au sommaire du n°, une longue interview de 14 pages avec l’acteur français Luc Merenda. Tout au long des années 70, Luc Merenda a joué dans une flopée de films italiens rangées dans le sous-genre de Poliziottesco, mais aussi quelques giallo, dont le film culte Torso de Sergio Martino et L’Homme sans mémoire de Duccio Tessari. Coté policiers, notons les excellents Rue de la violence et L’Accusé de Sergio Martino. Luc Merenda a joué dans de nombreux films de Sergio Martino, mais aussi pour Fernando Di Leo. Dans l’interview réalisée à l’époque du Covid, Luc Merenda a la parole bien affuté. Le mot "connard" revient souvent. Il vaut mieux être copain avec Luc Merenda !  Il a quelque perte de mémoire, heureusement que le journaliste (Eugenio Ercolani) connait bien son sujet pour rebondir sur les noms, titres qui fonts défaut à l’acteur, aujourd’hui âgé de 80 ans. Cette interview permet de revivre avec lui le cinéma italien des années 70. Le tout avec une très belle mise en pages aux couleurs du drapeau national Italien, richement documenté en illustrations (photos, affiches, revues d’époque).

L’autre grand dossier du n°31 est consacré au réalisateur français Richard Balducci. Ce nom ne vous dit rien ? C’est normal, son seul acte de bravoure dans le cinéma français est d’avoir imaginé Le Gendarme de Saint-Tropez, il est au scénario du premier film de la saga, ainsi que sur Le Gendarme à New-York. En 1966 il passe à la réalisation. Après trois courts métrages, en 1969 il réalise son premier film, La Honte de la famille, avec une belle brochette d’acteurs : Michel Galabru, Micheline Dax, Guy Grosso, Rosy Varte, Noel Roquevert. Ce sera d’ailleurs une constante dans ses films, qui tirent vers la comédie franchouillarde, -ou "navrante" comme dirait Christophe Bier-, des gueules sur l’affiche, totalement en roue libre dans le jeu : Jean Lefevre, Daniel Ceccaldi, Henri Guybet, Patrick Préjean, Robert Castel, Pierre Dac, Gérard Hernandez, Philippe Castelli, Brigitte Lahaie, Michel Leeb, Darry Cowl, Pierre Doris, Ticky Holdago, Paul Préboist, Marion Game, Jacques Legras et même le groupe Les Forbans, Jane Birkin et Serge Gainsbourg. Tous les films réalisés par Richard Balbucci, soit 13 longs métrages, sont chroniqués dans le dossier. Et bien, à part Prends ta rolls et va pointer (1981) et Salut la puce (1983), on peut dire que nos rédacteurs n’ont pas été emballés par leur visionnage. Même On L’appelle Catastrophe avec Michel Leeb (1983), qui a eu un petit succès à sa sortie et Le Facteur de Saint-Tropez avec Paul Préboist en tête d’affiche, reçoivent une chronique tiède. Au final, ce dossier de 16 pages n’est pas là pour réévaluer la filmographie de Richard Balbucci. Mais la curiosité n’étant pas un vilain défaut, se mater un film qui a pour titre N’oublie pas ton père au vestiaire (1982) est une obligation ! On ne va pas reculer devant le navrant.

 

La dernière partie du fanzine est consacré aux vidéos X, avec deux rubriques : Belles foufounes & Jus de roupettes par Claude-Paul Braquemart et Les carnets roses de l’oncle Vernon. Tous comme le visionnage des films de Richard Balducci, les deux auteurs des chroniques vidéo X n’ont en grande majorité pas aimé les films : acteurs-actrices sans conviction, montage foutraque, mise en scène ridicule, beaucoup de longueur, bref les messieurs Braquemart et Vernon se sont ennuyé à visionner (parfois en accéléré) Irma la masseuse, Caresseuses expertes,  Debbie Does Dallas 2, Chaleurs intimes pour ne citer que quelques titres. La lecture de ses chroniques est donc pour nous éviter de perdre du temps à visionner ses films, et surtout à applaudir des deux mains, l’exercice de style des chroniqueurs pour écrire des phrases, avec détails et humour sur ces films X de seconde zone. Heureusement qu’il n’y a pas que de chroniques de films qu’on peut zapper. Dans sa rubrique Y en a un peu plus ! Je vous le mets quand mêmes ?, Didier Lefèvre a chroniqué quatre films sorties en DVD qu’il a aimé, notamment Le toboggan de la mort de James Goldstone (1977).

Pour compléter le sommaire, un compte rendu sur le Extrême festival à Toulouse, l’expo ABC en région de Bruxelles, consacré à la dernière salle de cinéma X à Bruxelles qui a fermé ses portes en 2013, après 40 ans d’activité. Sur le sujet, Jimmy Pantera a écrit un magnifique livre titré Cinéma ABC (éditions CFC). Livre qui contient beaucoup de documents, archives (photos d’exploitation, affiches). On approche du bout (je n’ai pas écrit de la queue), avec des chroniques de livres, le DVD Fanzinat de Laure Bessi, Guillaume Gwardeath, Jean-Philippe Putaud-Michalski, un mot sur Norbert Moutier dessinateur (2), présent au sommaire de Les trésors de Picsou n° 63, juillet 2023. Voilà, Médusa Fanzine n°31 nouvelle formule s’ouvre à vous !



(1): Chronique de Médusa n°29 et 30 ici : https://paskallarsen.blogspot.com/2021/02/medusa-n29-et-n30-fevrier-2021.html

(2): Je parle ici de Norbert Moutier : https://paskallarsen.blogspot.com/2022/09/norbert-moutier-sa-collection-de-1000.html

https://medusafanzine.blogspot.com/2023/08/medusa-fanzine-n31-lancement-des.html

https://www.facebook.com/medusafanzine/?locale=fr_FR






samedi 7 octobre 2023

"BANDES ORIGINALES & CINÉMA DE GENRE" de Ludovic Villard (Le Mot et le Reste) – 22 août 2023

"Les films qui nous intéressent ici ont une particularité commune si l’on peut dire : l’invention du langage propre. Par « langage » il faut évidemment entendre image et son, son et image, image-son, son-image. Les échanges entre réalisateurs et compositeurs jouent pour beaucoup dans cet épanouissement (…)." (Page 54)

"Pour chaque film abordé dans ce livre, la musique est ainsi pensée comme agissante, sa fonction étant d’intervenir et de peser sur l’intrigue." (Page 56)

Ces deux extraits de textes en introduction de la chronique, sont une mise au point de l’auteur Ludovic Villard sur l’approche de son livre consacré aux Bandes Originales dans le cinéma de genre. Vaste sujet, car le cinéma de genre c’est quoi ? Vous pouvez poser la question à dix personnes, il y aura dix réponses différentes, car la frontière entre le cinéma de genre et le cinéma mainstream, film de studio n’est pas aussi net, qu’une trancheuse à jambon, certes utile dans un bon film d’horreur.

Ainsi le choix des 100 films chroniqués, peut prêter à discussion à savoir si c’est un film de genre ou pas. Par exemple 2001, l’odyssée de l’espace de Stanley Kubrick, Les sept mercenaires de John Sturges, Alphaville de Jean-Luc Godard, Le Cercle Rouge de Jean-Pierre Melville, La Planète sauvage de René Laloux, Midnight Express d’Alan Parker. Par contre, aucune ambigüité sur Le Village des damnés de Wolf Rilla, Le Carnaval des âmes de Herk Harvey, La fille qui en savait trop de Mario Bava, Les frissons de l’angoisse de Dario Argento, Sex & Fury de Norifumi Suzuki (avec l’actrice suédoise Christina Lindberg), Maniac de William Lustig…, là on est bien dans le cinéma de genre, toutes réponses confondues. Pour faire court, en France, dans la presse papier, le cinéma de genre a été nettement mieux traité par le mensuel Mad Movies que par le mensuel Les Cahiers du cinéma. Les Cahiers qui ont mis malgré tout de l’eau dans leur vin critique, suite aux films de Quentin Tarantino (grand manitou pour redonner du blason aux réalisateurs du cinéma de genre), que Les Cahiers défendent depuis son premier film Reservoir Dogs (1992). Quoi qu'il en soit, genre ou pas, la sélection des 100 films chroniqués est éclectique et parcours également le cinéma asiatique et des Pays de l'Est.

"Django" de Sergio Corbucci. Musique de Luis Enriquez Bacalov (1966)

Bandes Originales & cinéma de genre est divisé en deux parties. La première partie démarre des prémices du cinéma (qui n'avait pas encore de nom) en 1659 avec l’inventeur hollandais Christian Huygens qui a créé la lanterne magique. Quelques siècles plus tard, rendez-vous avec les frères Lumières qui inventent la salle de projection, Georges Méliez, l’inventeur du cinéma fantastique, de science-fiction avec en 1896 la réalisation du film Le Manoir du Diable, le cinéma muet en noir et blanc avec la musique jouée en direct pendant la séance, puis le parlant, la couleur, les westerns, les films policiers, la science-fiction, le nouvel Hollywood, les premiers films sociaux, politiques, violent en marge des grands studios, qui vont dans les années 70 essayer de s’y coller, car les bonnes mœurs n’attirent plus le public, notamment les jeunes. Dans cette partie du livre, Ludovic Villard donnent des infos sur l’évolution du cinéma avec le contexte de chaque époque, présente des compositeurs et quelques films emblématiques. Le rapport entre le compositeur et le réalisateur pour innover sur les bandes originales en utilisant les nouvelles techniques du moment, notamment à la fin des années 60 et tout au long des années 70 avec l’utilisation des synthétiseurs et des musiques actuelles (jazz, pop, rock, ambient).

"La Nuit des Morts-Vivants" de George A. Romero. Musique de Scott Vladimir Licina (1968)

La seconde partie du livre est consacré à 100 chroniques de B.O. de films, de Psychose (1960) composé par Bernard Hermann à Blade Runner (1982) composé par Vangelis, soit sur une période de deux décennies. On ne va pas revenir sur le choix des B.O. de films, -voir plus haut-, mais sur la structure des chroniques qui font chacune deux pages avec l’affiche du film, mais pas la pochette du disque, s’il existe. Ludovic Villard donne peut d’informations sur les coulisses de la composition de la B.O. Le rapport entre le compositeur et le réalisateur. Pourquoi le choix du compositeur sur le film. Il y a aussi peu ou pas d’info sur les compositeurs. Les trois quart de la chronique sont une description sur l’illustration sonore pour tel ou tel séquence. Exemples : "Un simple chant d’oiseau, blues plaintif d’un prisonnier. Un homme seul allongé dans son lit. Puis l’orchestre émerge de cette immobilité : l’orgue Hammond puis l’accordéon, ses souffles tournoyants discrètement soutenu par section de cordes (…)." Le Samouraï de Jean-Pierre Melville, musique de François de Roubaix (Page 164). "Ça commence par une inquiétante berceuse tout en « lalala » enfantins, fredonnés par Mia Farrow elle-même, et aux cordes ambiguës. La guitare acoustique, pleine de douceur, se voit troublée par quelques notes déréglées de clavecin, la ballade se métamorphosant en une valse noire." Rosemary’s Baby de Roman Polanski, musique de Krzysztof Komeda. (Page 180). Certes dans la première partie du livre, il y a quelques infos sur les compositeurs, leur cursus, mais une fois qu’on commence à lire les chroniques à la suite, il y a une forme de redondance qui s’installe. Il faudra presque avoir en tête les séquences du film pour lire la chronique. Au verso du livre, on apprend que Ludovic Villard compose des poèmes et des textes de rap depuis l’adolescence, qu’il publie des recueils poétiques et a enregistré une soixantaine de projet musicaux sous le nom de Lucio Bukowski. Notre poète a surement voulu appliquer sa fonction à l’écriture des chroniques, en mettant en avant sa sensibilité musicale, au détriment de l'histoire de la composition de la partition. On est ici dans un exercice de style. Les amateurs du poète trouveront surement du plaisir à le lire, les amateurs des B.O. de films dans le cinéma de genre, c’est moins sûr, du moins pour la partie « chroniques ».

"Carrie au bal du diable" de Brian de Palma. Musique de Pino Donaggio (1976)

https://lemotetlereste.com/musiques/bandesoriginalescinemadegenre/

https://www.ludovicvillard.com/




vendredi 6 octobre 2023

THE PRISONERS "The Prisoners" (Médiapop Records) – 30 septembre 2023

Comme dans le mouvement Pop Art, le groupe The Prisoners recycle des éléments de la pop culture. Le nom de ce groupe Mulhousien fait référence à la série culte anglaise des sixties The Prisoner (Le Prisonnier en VF) avec le grand Patrick McGoohan à la fois acteur, scénariste et producteur de la série. A noter que le nom The Prisoners a déjà été repris dans les années 80 par un groupe anglais de musique mods-garage-psyché. D’ailleurs The Prisoners made in France, s’est fait une spécialité de revisiter les thèmes des séries télé, principalement des années 60 et 70, soit bien avant les séries en continu sur Netflix.  Leur premier album sorti en 2021, titré The Prisoners (1) en contient 14, dont évidemment The Prisoner, mais aussi Star Strek, Mannix, Amicalement Vôtre, Cosmos 1999, La 4ème Dimension…Sur leur nouvel album éponyme, The Prisoners poursuivent leur exploration en zone génériques TV avec Starsky et Hutch, UFO, Spiderman, Chapeau melon et bottes de cuirs, Hawaii police d’état. Mais, grande nouveauté, sur les 14 morceaux de l’album, The Prisoners a composé 8 originaux aux titres fantasques (Le retour de l’isf, L’Homme qui valait mieux que les autres, Aussi. Mais pas que…) dans la tradition des compositeurs tels François De Roubaix, Ennio Morricone, Lalo Schiffrin, John Barry. Avec leurs moyens de bord, The Prisoners s’amusent avec les codes des B.O de film et des génériques TV, avec style en forçant bien sur l’aspect sixties surf garage, plus une touche easy listening avec parfois la voix féminine aérienne de Marie Bochelen, telle une sirène échappée de la petite lucarne. On est ici dans la continuité du premier album, à la différence que la pochette est en couleur, dans l’esprit d’un 33 tours vinyle de Library music et le privilège d’avoir des morceaux originaux, mais composés à la mode de … à vous de découvrir ce quizz à l’écoute de :  Aussi. Mais pas que (De Roub… ?), L’égalité des chances (Morri… ?). Bref à vous de jouer à l’agent 007 ou au lieutenant Frank Bullitt.


Toujours, dans l’art du recyclage (le Pop Art, quand on y a gouté…), la vidéo qui illustre le morceau Le retour de l’isf, est un extrait du film Bis méga fauché Yéti, le géant d’un autre monde de Gianfranco Parolini. Ce film sorti en 1977 sur les écrans est un condensé de tout ce qu’il ne faut pas faire dans un film : avoir les pires acteurs, faire des faux raccords au montage, des trucages dignes d’un enfant de 5 ans qui joue dans sa chambre en imaginant être réalisateur, des échelles de grandeurs non respectés. Pour vérifier ce carnage qui en devient risible, voir touchant pour les nostalgiques qui ont vu le film tout gamin, Yéti, le géant d’un autre monde est sorti cette année en Blu-ray et DVD chez Elephant Films.

(1): Chronique du premier album ici : https://paskallarsen.blogspot.com/2022/01/the-prisoners-prisoners-tout-ne-va-pas.html

https://theprisoners1.bandcamp.com/album/the-prisoners-2

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