samedi 7 octobre 2023

"BANDES ORIGINALES & CINÉMA DE GENRE" de Ludovic Villard (Le Mot et le Reste) – 22 août 2023

"Les films qui nous intéressent ici ont une particularité commune si l’on peut dire : l’invention du langage propre. Par « langage » il faut évidemment entendre image et son, son et image, image-son, son-image. Les échanges entre réalisateurs et compositeurs jouent pour beaucoup dans cet épanouissement (…)." (Page 54)

"Pour chaque film abordé dans ce livre, la musique est ainsi pensée comme agissante, sa fonction étant d’intervenir et de peser sur l’intrigue." (Page 56)

Ces deux extraits de textes en introduction de la chronique, sont une mise au point de l’auteur Ludovic Villard sur l’approche de son livre consacré aux Bandes Originales dans le cinéma de genre. Vaste sujet, car le cinéma de genre c’est quoi ? Vous pouvez poser la question à dix personnes, il y aura dix réponses différentes, car la frontière entre le cinéma de genre et le cinéma mainstream, film de studio n’est pas aussi net, qu’une trancheuse à jambon, certes utile dans un bon film d’horreur.

Ainsi le choix des 100 films chroniqués, peut prêter à discussion à savoir si c’est un film de genre ou pas. Par exemple 2001, l’odyssée de l’espace de Stanley Kubrick, Les sept mercenaires de John Sturges, Alphaville de Jean-Luc Godard, Le Cercle Rouge de Jean-Pierre Melville, La Planète sauvage de René Laloux, Midnight Express d’Alan Parker. Par contre, aucune ambigüité sur Le Village des damnés de Wolf Rilla, Le Carnaval des âmes de Herk Harvey, La fille qui en savait trop de Mario Bava, Les frissons de l’angoisse de Dario Argento, Sex & Fury de Norifumi Suzuki (avec l’actrice suédoise Christina Lindberg), Maniac de William Lustig…, là on est bien dans le cinéma de genre, toutes réponses confondues. Pour faire court, en France, dans la presse papier, le cinéma de genre a été nettement mieux traité par le mensuel Mad Movies que par le mensuel Les Cahiers du cinéma. Les Cahiers qui ont mis malgré tout de l’eau dans leur vin critique, suite aux films de Quentin Tarantino (grand manitou pour redonner du blason aux réalisateurs du cinéma de genre), que Les Cahiers défendent depuis son premier film Reservoir Dogs (1992). Quoi qu'il en soit, genre ou pas, la sélection des 100 films chroniqués est éclectique et parcours également le cinéma asiatique et des Pays de l'Est.

"Django" de Sergio Corbucci. Musique de Luis Enriquez Bacalov (1966)

Bandes Originales & cinéma de genre est divisé en deux parties. La première partie démarre des prémices du cinéma (qui n'avait pas encore de nom) en 1659 avec l’inventeur hollandais Christian Huygens qui a créé la lanterne magique. Quelques siècles plus tard, rendez-vous avec les frères Lumières qui inventent la salle de projection, Georges Méliez, l’inventeur du cinéma fantastique, de science-fiction avec en 1896 la réalisation du film Le Manoir du Diable, le cinéma muet en noir et blanc avec la musique jouée en direct pendant la séance, puis le parlant, la couleur, les westerns, les films policiers, la science-fiction, le nouvel Hollywood, les premiers films sociaux, politiques, violent en marge des grands studios, qui vont dans les années 70 essayer de s’y coller, car les bonnes mœurs n’attirent plus le public, notamment les jeunes. Dans cette partie du livre, Ludovic Villard donnent des infos sur l’évolution du cinéma avec le contexte de chaque époque, présente des compositeurs et quelques films emblématiques. Le rapport entre le compositeur et le réalisateur pour innover sur les bandes originales en utilisant les nouvelles techniques du moment, notamment à la fin des années 60 et tout au long des années 70 avec l’utilisation des synthétiseurs et des musiques actuelles (jazz, pop, rock, ambient).

"La Nuit des Morts-Vivants" de George A. Romero. Musique de Scott Vladimir Licina (1968)

La seconde partie du livre est consacré à 100 chroniques de B.O. de films, de Psychose (1960) composé par Bernard Hermann à Blade Runner (1982) composé par Vangelis, soit sur une période de deux décennies. On ne va pas revenir sur le choix des B.O. de films, -voir plus haut-, mais sur la structure des chroniques qui font chacune deux pages avec l’affiche du film, mais pas la pochette du disque, s’il existe. Ludovic Villard donne peut d’informations sur les coulisses de la composition de la B.O. Le rapport entre le compositeur et le réalisateur. Pourquoi le choix du compositeur sur le film. Il y a aussi peu ou pas d’info sur les compositeurs. Les trois quart de la chronique sont une description sur l’illustration sonore pour tel ou tel séquence. Exemples : "Un simple chant d’oiseau, blues plaintif d’un prisonnier. Un homme seul allongé dans son lit. Puis l’orchestre émerge de cette immobilité : l’orgue Hammond puis l’accordéon, ses souffles tournoyants discrètement soutenu par section de cordes (…)." Le Samouraï de Jean-Pierre Melville, musique de François de Roubaix (Page 164). "Ça commence par une inquiétante berceuse tout en « lalala » enfantins, fredonnés par Mia Farrow elle-même, et aux cordes ambiguës. La guitare acoustique, pleine de douceur, se voit troublée par quelques notes déréglées de clavecin, la ballade se métamorphosant en une valse noire." Rosemary’s Baby de Roman Polanski, musique de Krzysztof Komeda. (Page 180). Certes dans la première partie du livre, il y a quelques infos sur les compositeurs, leur cursus, mais une fois qu’on commence à lire les chroniques à la suite, il y a une forme de redondance qui s’installe. Il faudra presque avoir en tête les séquences du film pour lire la chronique. Au verso du livre, on apprend que Ludovic Villard compose des poèmes et des textes de rap depuis l’adolescence, qu’il publie des recueils poétiques et a enregistré une soixantaine de projet musicaux sous le nom de Lucio Bukowski. Notre poète a surement voulu appliquer sa fonction à l’écriture des chroniques, en mettant en avant sa sensibilité musicale, au détriment de l'histoire de la composition de la partition. On est ici dans un exercice de style. Les amateurs du poète trouveront surement du plaisir à le lire, les amateurs des B.O. de films dans le cinéma de genre, c’est moins sûr, du moins pour la partie « chroniques ».

"Carrie au bal du diable" de Brian de Palma. Musique de Pino Donaggio (1976)

https://lemotetlereste.com/musiques/bandesoriginalescinemadegenre/

https://www.ludovicvillard.com/




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