lundi 20 juin 2022

PETE SHELLEY "Homosapien" (Arista Records) – Octobre 1981/15 janvier 1982


Ce week-end au vide grenier de la Butte aux Cailles (le fief des pochoirs de Miss Tic) dans le 13eme arrondissement de Paris, j’ai acheté un lot de disques à deux euros pièce. Dans le lot il y a Homosapien, le 2ème album solo de Pete Shelley (1955-2018). Si je connais assez bien les albums du groupe Buzzocks, où Pete Shelley est l’auteur compositeur, chanteur, guitariste, du côté solo sous son nom, je ne connais pas du tout sa carrière. Ainsi cet album m’a dans un premier temps interpelé avec sa pochette arty, dans la ligné visuel des disques de John Foxx, Gary Newman du début 80, et bien sûr l’envie d’écouter ce qu’il fait en solo, d’autant que l’album est sortie en 1981, soit après les trois albums cultes des Buzzcocks. Après l’écoute des premières notes, on est bien au début des années 80 avec le son new wave synthétique. Avec le temps, cette patine sonore limite désuète à son charme. Sur les notes de pochette, il n’y a aucune indication des instruments utilisés, mais les synthétiseurs et boites à rythmes au prix abordable sont au programme. Il est clair qu’ici on n’est pas dans le style power punk des Buzzocks, mais plus dans la new wave d’Human League, Ultravox, Yellow Magic Orchestra, Devo, Blancmange, David Bowie et le groupe Magazine avec son ex collègue Howard Devoto.

Pochette du 45 tours "Homosapien"

Le morceau titre Homosapien est sortie en single, mais il n’a pas eu de succès en France à l’inverse de Don't You Want Me de Human League, Enola Gay de OMD et Fade To Gray de Visage. A noter qu’au Royaume-Uni, le morceau a été interdit à la BBC, en cause aux références homosexuelles explicites des paroles écrites par Pete Shelley:

"I'm the shy boy, you're the coy boy/ I'm the cruiser, you're the loser/ Homosuperior in my interior/ But from the skin out I'm/ And I think of your eyes in the dark/ And I see the star/ And I look to the light/ And I might wonder right where you are." (Je suis le garçon timide, tu es le garçon timide/ Je suis le croiseur, tu es le perdant/ Homosupérieur dans mon intérieur/ Mais de la peau je suis/ Et je pense à tes yeux dans le noir/ Et je vois l’étoile/ Et je regarde la lumière/ Et je me demande où tu es).

Pochette du 45 tours "I Don’t Know What It Is"

Cet album est né des répétitions du quatrième album des Buzzcocks avec leur producteur Martin Rushent. Le morceau Homosapien devait servir de travail d’accroche pour la validité de ce nouvel album, mais leur label EMI n’étant pas partant, refuse l’avance financière, ainsi ce morceau servira pour le nouvel album solo de Pete Shelley, si on compte le premier Sky Yen sorti en 1980, mais qui ne contient que deux longs morceaux dans le style de Tangerin Dream. Avec le fidèle Martin Rushent à la production, ce n’est pas étonnant que la musique prenne un virage new wave synthétique (au désarroi des fans des Buzzocks plus amateurs de guitares punk et pop), car en mars 1981, juste après l’enregistrement d’Homosapien, il va produire l’album Dare de Human League, qui va faire un carton au sommet des charts. On imagine qu’en ce début des années 80, le studio de Martin Rushent est rempli de nouveaux synthétiseurs et divers ordinateurs "made in Japan", dont celui qu’on voit sur la pochette au côté de Pete Shelley, un Commodore PET. Si les instruments sont bien de leur époque, les textes sont par contre nettement plus anciens, car une grande partie date d’avant la création des Buzzcoks, soit de 1973-1975. A noter que la track-list des morceaux est différente entre le pressage américain et européen, pas le même ordre et deux morceaux différents.


Évidemment pour apprécier en 2022 cet album, il faut être à l’aise avec le son new wave 80, ne pas approcher cet album sous l’angle Buzzocks, plutôt du côté Magazine. Une grande partie des oreilles aiguisées vont trouver ce son daté, à cause des instruments utilisés, à cause du manque de guitare électrique, à cause de la voix pop et lisse de Pete Shelley. A l’inverse, tous ses "défauts" post MTV peuvent donner à certain une patine retro/futuriste très plaisante à l’oreille. Personnellement, j’ai pris plaisir à découvrir cet album qui a totalement échappé de mes radars érudits. Il n'est jamais trop tard, même avec 40 ans de retard.





samedi 18 juin 2022

JEAN-LOUIS TRINTIGNANT : 1930 - 2022


L’acteur Jean-Louis Trintignant est mort le 17 juin à l’âge respectable de 91 ans. Hasard du calendrier, aujourd’hui, 18 juin, à l’occasion de la 2ème journée du Disquaire Day, le label Wewantsounds a publié la B.O. du film Sans Mobile Apparent, avec la magnifique musique d’Ennio Morricone. Dans ce film réalisé en 1971 par Philippe Labro, Jean-Louis Trintignant avait le rôle de l’inspecteur Carella, "en charge d’une enquête sur deux meurtres semblables commis la même journée. Deux autres surviennent le lendemain. Une course contre la montre s'engage pour trouver le lien entre ces quatre meurtres sans mobile apparent". Jean-Louis Trintignant menant une enquête policière avec en fond sonore, la musique bien prenante d’Ennio Morricone, c’est juste les années 70 comme on aime savourer, tant au cinéma que du point de vue musical.


Quand on pense que le premier film avec Jean-Louis Trintignant date de 1956, avec Si tous les gars du monde de Christian-Jaque, sans oublier la même année le sulfureux (pour l’époque) Et Dieu… créa la femme de Roger Vadim avec Brigitte Bardot à ces côté et le dernier date de 2019, avec Les plus belles années d’une vie réalisé par Claude Lelouch, soit entre ces deux titres, 120 films, sans oublier, le théâtre, la télévision, les doublages, et l’utilisation de sa voix unique, car reconnaissable instantanément, il est clair que Jean-Louis Trintignant a eu une vie artistique bien remplis. Pendant plus de 60 ans il a œuvré pour le cinéma. Parmi la pléthore d’excellents films, on va juste noter quelques titres à avoir vu et revue au moins une fois dans sa vie avant de mourir : Et Dieu… créa la femme de Roger Vadim (1956), Le Fanfaron de Dino Risi (1962), Compartiment tueurs de Costa-Gavras (1965), La mort a pondu un œuf de Giulio Questi (1968), Les Biches de Claude Chabrol (1968), Le Grand silence de Sergio Corbuci (1968), Z de Costa-Gavras (1969), Si douces, si perverses d’Umberto Lenzi (1969), Le Conformiste de Bernardo Bertolucci (1970), Le Voyou de Claude Lelouch (1970), Sans mobile apparent de Philippe Labro (1971), L’attentat d’Yves Boisset (1972), Un Homme est mort de Jacques Deray (1972), L’Ordinateur des pompes funèbres de Gérard Pirès (1976), Le Maitre-nageur de… Jean-Louis Trintignant (1979), Malevil de Christian de Chalonge (1981). On stop ici, tant il y d’excellents films avec Jean-Louis Trintignant acteur.

On le sait, on est de passage sur terre, certains partent à 27 ans, d’autres arrivent à atteindre 91 ans. Le repos, quand à lui est éternel, tout comme les films avec Jean-Louis Trintignant.