dimanche 1 mai 2022

"LA VICTIME DÉSIGNÉE" de Maurizio Lucidi (Frenezy éditions) – 29 avril 2022


Souhaitons la bienvenue à Frenezy, un tout jeune éditeur vidéo qui vient de publier ses deux premiers films en format Blu-Ray et DVD, dans le but de garder un lien avec le support physique, face aux flux des fichiers disponibles sur Internet et dans les bouquets de programmes TV. Les deux premières sorties, sont les films italiens Texas Adios de Fernandino Baldi avec Franco Nero et La Victime désignée de Maurizio Lucidi avec Tomas Milian et Pierre Clémenti (dont l’éditeur Potemkine vient de sortir un coffret 6 disques avec l’intégrale des films réalisés par Pierre Clémenti). Les deux films sont en HD 2K ou 4K avec plus d’une heure de bonus. Par contre, pas de version combo. Avec un western pour Texas Adios et un giallo de machination pour La Victime désignée, l’éditeur Frenezy s’intéresse aux films de genres, se mettant ainsi sur les chemins déjà bien labourés par Le Chat qui fume et Artus Films. Comme l’Italie était très productif dans le domaine du cinéma de genre (péplum, SF, horreur/fantastique gothique, gore, giallo, triller, espionnage, comédie sexy…), il y a de quoi faire pour nourrir nos éditeurs français (qui font un travail remarquable pour la qualité des sorties), et satisfaire le public biseux très gourmand en pépites transalpines. 

Pour cette chronique, on va s’attarder sur le film La Victime désignée, inédit en France en format vidéo. Ainsi découvrir ce film de 1971 avec un nouveau master restauré en 4K, c’est juste du bonheur pour les yeux et un confort bien venu pour le visionner chez soi, seul, en couple, en famille ou entre amis.  


Synopsis :

"Publicitaire à la tête d'une entreprise lucrative, Stefano Argenti est marié à une épouse dépressive et possessive, Luisa. Ce dernier souhaite vendre la société contre une forte somme d'argent mais elle est enregistrée au seul nom de sa femme. L'homme d'affaires se console dans les bras de sa maîtresse, la modèle Fabienne. En escapade amoureuse à Venise, le couple d'amants rencontre un étrange dandy, le comte Matteo Tiepolo, qui devient rapidement un ami très proche et intime de Stefano. Un jour, Matteo lui propose un marché : il tue Luisa si celui-ci assassine son frère, une brute qui le tyrannise. Effrayé, Stefano refuse son offre.

Mais Matteo révèle à Luisa que son mari la trompe mais qu'il détourne également l'argent de son entreprise. Après une dispute avec Stefano, Luisa est retrouvée morte. Matteo, qui l'a tuée, demande à Stefano de bien vouloir remplir sa part du marché, à savoir tuer son frère...". (Source Wikipédia)

D’entrée, on ne va pas allez par quatre chemins, La Victime désignée (La vittima designata en VO) est un grand giallo, un grand triller, un grand film noir. L’intrigue, la mise en scène, le jeu des acteurs et la bande originale sont parfaites. Ici, on est plus proche d’un film de grand studio que d’un film bis fauché. L’histoire est soit disant inspiré du film L’Inconnue du Nord-Express d’Alfred Hichcock pour le thème de l’échange de meurtre -entre deux personnes qui ne se connaissent pas- pour avoir un alibi. En tout cas, ce qui les rapproches, c’est le soin apporté au déroulement de l’intrigue, notamment cet effet “machination” qui nous tient en halène. Le duel Tomas Milian (Stefano Argenti) et Pierre Clémenti (Matteo Tiepolo) est majestueux. D’autant que la relation homosexuel en filigrane donne du piquant au jeu des acteurs. Tout les deux ont des physiques de rock star, auquel il est difficile de résister. L'impérial Pierre Clémenti (1942-1999) avec ses longs cheveux noir, est très à l'aise dans son rôle de dandy efféminé, -un mix de Marc Bolan et Brian Ferry- et Tomas Milian (1933-2017) porte des lunettes noir 70 aussi stylé que Steve Mc Queen, Clint Eastwood ou Lou Reed. Pour mettre ses deux acteurs encore plus en valeur, le compositeur Luis Bacalov (1933-2017) a réalisé une magnifique partition qui n’a rien à envier à du Ennio Morricone. Ses envolées mélancoliques, avec une touche de classique façon Vivaldi, sont d’une splendeur sans nom. Dans la B.O. il y a aussi des morceaux du groupe rock italien New Trolls (qui ont joués en 1966 en première partie des Rolling Stones), donnant ainsi au film une patine psyché 70’s. Malheureusement la B.O. du film n’a jamais été publié. Par contre les morceaux de New Trolls sont disponibles sur l’ album Concerto Grosso Per I New Trolls sortie en 1971 sur Cetra. A noter que la chanson qui ouvre et clôture le film est interprété par Tomas Milian.

Le film est réalisé par Maurizio Lucidi qui a débuté comme monteur sur le film culte Le Fanfaron de Dino Risi. Il a œuvré tout au long du cinéma populaire italien en réalisant des péplums, westerns, trillers, comédies et même du porno. Dans les bonus du Blu-ray, Jean-François Rauger, directeur de la programmation de la Cinémathèque française dit d’entré que La Victime désignée est le film le plus notable de la filmographie de Maurizio Lucidi. Si ce film surpasse ses autres réalisations, c’est grâce aux scénaristes Aldo Lado (qui a beaucoup œuvré dans le giallo), Augusto Caminito, Maurizio Lucidi et Antonio Troiso. Chacun a contribué à faire de La Victime désignée un film d’exception qui n’aura malheureusement pas reçu le succès dont il mérite. En France le film est sorti quatre ans après la sortie italienne, dans une version française (pas de VO) plus courte de 10 minutes. Cette version est dans les bonus du Blu-ray. Vous l’avez compris, ce film maintenant disponible en 4K est chaudement recommandé, d’autant que le tirage n’est que de 1000 exemplaires.

Ainsi, l’éditeur Frenezy fait son entré avec du lourd, d’autant que dans les deux prochaines livraisons, il y aura le film Femina Ridens de Piero Schivazappa. La sortie de ce film inédit en vidéo française, avec ses images pop 60-70 et sa belle B.O. du maestro Stelvio Cipriani est une heureuse nouvelle qui nous prépare à passer une bonne soirée de projection. Vive Freeeeeenezyyyyyyyyy!


https://frenezy-editions.fr/

https://www.facebook.com/frenezyeditions/




vendredi 29 avril 2022

SPIRITUALIZED "Everything Was Beautiful" (Bella Union/PIAS) – 22 avril 2022

Pour la 2ème fois, Jason Pierce aka  J. Spacemen utilise le visuel du packaging d’une boite de médicament pour illustrer la pochette extérieur et  intérieur d’un album. Il l’avait déjà fait en 1997 pour l’album Ladies And Gentleman We Are Floating In Space, avec en prime la notice d’utilisation du médicament. En fait, les médocs et le médical sont des éléments récurant dans son travail artistique. Le plus direct était les visuels de l’album Songs In A&E (2008) et des EP’s/single extraient de l’album, ou l’on voit des photos de perfusions lors de son séjour à l’Hôpital. Sur une photo à l’intérieur de la pochette de l’album Sweet Hearts, Sweet Light (2012), on voit le visage de Jason bien amoché. Après, pour positiver cet attrait au médical, les médicaments et l’Hôpital sont là pour nous soigner, nous guérir, et vu les deux derniers albums au son très solaire, soit And Nothing Hurt (2018) et ce petit nouveau titré Everything Was Beautiful, il est clair que Jason parait être en bonne santé et heureux de composer des nouvelles chansons. 

Tout comme son ex acolyte de Spacemen 3, Sonic Boom, -également très solaire depuis qu’il s’est installé au Portugal dans le coin de Lisbonne-, Jason Pierce aura eu raison des drogues et excès en tout genre (malgré tout il faut reconnaitre que ses excès ont vu éclore au moins trois albums culte pour Spacemen 3, et tout autant pour Spiritualized) pour rendre sa musique de plus en plus belle, même s’il faut reconnaitre que niveau chant, niveau phrasé, intonation, l’ami Jason fait parfois dans le pépère mélancolique sous prozac. Mais qu’importe, ce style donne la couleur reconnaissable à Spiritualized. Côté musique, Jason est accompagné d’une pléthore de musiciens (il y en a 20 !), de chanteurs et chœurs, dont sa fille Poppy sur le morceau Always Together With You. Au verso de la pochette, il y a le détail des instruments utilisés par Jason (à rendre jaloux les musiciens amateurs, tant l’ami Spacemen possède une pléthore d’instruments en tout genre) et les 20 musiciens. On peut dire qu’on est plus proche d’un orchestre près à jouer au Royal Albert Hall de Londres que d’un duo folk lo-fi pour un concert à la maison. Oui, il y a beaucoup de matos et cela s’entend dans les harmonies, mélodies et arrangements des sept morceaux de l’album. Comme pour les disques enregistrés dans les années 60 et 70 (à écouter sur les pressages vinyles d’époque), ici l’acoustique est exemplaire, ainsi pour profiter pleinement des morceaux, il est conseillé d’écouter l’album sur une bonne chaine Hi-Fi et non pas en streaming sur un téléphone portable avec des écouteurs ridicules. D’autant qu’ici les chœurs teintés de gospel, les arrangements divins, amples et charnels ont du coffre et de l’espace, tout ici est l’inverse du confiné, tant on respire à haute volé, les bras ouverts, le cœur qui bas la chamane. Avant de m’égarer dans des superlatifs trop démonstratif, je ne peux que vous convier à écouter ce nouvel album  dans les conditions acoustique qu’il mérite. Merci Jason d’être encore si créatif !

Petit nota pour les collectionneurs : Il existe une version vinyle avec les textes de la pochette écrits en français.


https://www.spiritualized.com/

https://spiritualizedband.bandcamp.com/album/everything-was-beautiful

https://www.facebook.com/spiritualizedofficial