mardi 8 février 2022

THE SOUND "Will and Testament" (Sounds Haarlem Likes Vinyl) – 26 novembre 2021


C’est l’ami Philippe Fall (1) qui m’a signalé la sortie de ce "nouvel" album de The Sound publié par le label Hollandais Sounds Haarlem Likes Vinyl. L’album contient deux CD en digipack (la version double vinyle sortira plus tard, quand les majors auront fini de perturber les commandes des labels indépendants). Le premier CD est une compilation de morceaux live enregistrés à Rotterdam à l’Arena le 25 avril 1984, à Munich à l’Alabama-Halle le 9 juin 1984, à Rotterdam au Pandora’s Music Box le 21 septembre 1984 (2), à La Haye au Parkpop en juin 1987, à Leyde au LVC le 28 novembre 1987, à Amsterdam au Paradiso le 4 décembre 1987. Le deuxième CD contient quatre démos 100% inédites. Will and testament a été compilé par Mike Dudley, le batteur de The Sound - apparemment le bassiste Graham Bailey n'a pas été consulté pour cette publication-. Il a écrit les notes du livret, supervisé les enregistrements qui avaient besoin d’un petit nettoyage. La pochette est une reproduction d’une peinture de Briton Rivière (1840-1920) de 1902 titré Aphrodite. The Sound avait déjà utilisé une peinture de ce peintre anglais pour la pochette du 2ème album, titré From The Lions Mouth (1981).

Dans le titre de cet album live, il y a le mot « testament ». En effet, les enregistrements de 1987, ont une résonance toute particulière, car ce sera la dernière tournée du groupe, qui va se séparer en début 1988. Ainsi l’enregistrement du concert du 4 décembre 1987 prend ici une grande valeur, en tant que document/archive.  Le manque de succès, de reconnaissance, mettra fin à la carrière de The Sound qui avait commencé sa carrière en 1978 sur les cendres du groupe punk The Outsiders (1977-1978). Malgré six albums de qualité, dont le premier Jeopardy devenu au fil du temps un classique du rock anglais des années 80. Le leader du groupe Adrian Borland, possède une voix unique, qui aurait mérité une visibilité aussi importante (voir plus) que Morrissey (The Smiths), Robert Smith (The Cure), Ian McCulloch (Echo & The Bunnymen), Andy Partridge (XTC), pour ne citer que quelques exemples de voix. Durant son existence, tel un écorché, un poète maudit, Adrian Borland n’arrivera pas avec The Sound à dépasser le stade du groupe indé qui a son public de fidèles. Ce sera avec le temps et la réédition des albums, que la renommée de The Sound va croitre. Après la séparation du groupe, Adrian Borland entame une carrière en solo, qui sera encore plus confidentielle qu’avec The Sound. Il publiera cinq albums dans l’indifférence « presque » générale. Avec en prime des problèmes/troubles de schizo-affectif qui mènent à la dépression, Adrian Borland se suicide à Londres le 26 avril 1999 en se jetant sous un train à la gare de Wimbledon. Quel gâchis.

Depuis la séparation de The Sound, on suit les éventuelles sorties officielles (on mettra de côté les bootlegs), histoire de se mettre sous la dent des versions alternatives de morceaux, des démos et inédits si les esprits se croisent. Parmi les publications importantes, il y a Propaganda qui contient des morceaux enregistrés entre mai et juin 1979, juste après la séparation de Outsiders (à noter que leurs deux albums ont été réédités en 2014 et 2021). Cette compilation a été publié en 1999 par le label Renascent qui a réédité en CD tous les albums du groupe. En  2004, le label Renascent publie les BBC Sessions, en 2006 cinq CD de Dutch Radio. A noter pour les collectionneurs, la compilation Propaganda a été réédité en 2015 lors du Disquaire Day par Demon Records en double vinyle format 25cm. Le label Edsel Records a publié en 2015 un coffret de quatre CD avec les trois premiers albums et une tonne de raretés (démo, live des BBC Sessions) + un livret, en 2016 un 2ème coffret de cinq CD avec les trois albums suivants, le live In the Hothouse (sortie en 1985 en double vinyle), Propaganda et complété de nouveau avec de nombreuses raretés + un livret richement illustré. 

(1)-(2) Il a eu la chance de les voir en 1984. Reproduction du sésame pour assister au concert @ Phil Fall

Ce concert de The Sound faisait partie d’un festival avec une programmation à donner le vertige : The Fall, Gun Club, The Opposition, Anne Clark, Palais Schaumburg, Psychic TV, Tom Verlaine, John Cale, New Model Army…

Jacquette intérieure du CD "Will and testament"

Mais revenons au sujet de la chronique, la publication de Will and testament. Le CD 1 contient 15 enregistrements live. Le son est parfait, on entend bien la voix d’Adrian Borland, qui résonne ici avec une puissance forte. Par moment, on pense à un autre écorché, Jeffrey Lee Pierce (1958-1996) du Gun Club. Les versions live sont différentes des versions studio, donnant ainsi à cette compilation extraite de divers live une valeur non monnayable, d’autant, comme je l’écris plus haut, il y a ici six enregistrements du 4 décembre au Paradiso, qui est leur avant dernier concert,-le dernier étant le lendemain à Zoeterneer au Boerderij-. Quelques jours (semaines ?) plus tard, c'est la séparation du groupe. Les morceaux enregistrés lors des six concerts dans des lieux et jours différents ne sont pas gravés dans l’ordre chronologique des dates. Mais cela ne perturbe pas de passer de 1987 à 1984, puis de repasser à 1987. L'idée de Mike Dudley pour la conception de l'ordre des titres de la compilation, est la setlist imaginaire d'un concert. De plus le soin porté au remastering fait que l’ensemble n'est pas une compilation décousue. Le CD 2 contient les quatre démos, Kiss Of Life de 1985 qui était prévu pour une compilation apparemment jamais publié,  13 hours, I All I Need (Is You Today) et Will, le tout avec un magnifique son qui n’a rien d’une démo.

Pour clore cette chronique, le label hollandais Sounds Haarlem Likes Vinyl vient également de publier de nombreux albums d’Adrian Borland, dont Cinematic, Lovefield/Neon And Stone, et des sessions de 1987 à 1995. Pourquoi un label hollandais s’occupe de ce groupe anglais ? The Sound a eu du succès en Hollande. Ils y ont fait de nombreuses tournées. Il y a un public plus nombreux, par rapport à d’autres pays, dont la France. Dans les années 80, la presse rock, Best et surtout Rock & Folk n’ont pas assez posté dans leurs pages les qualités de ce groupe. Cela se limitait souvent à la chronique d’un album. Pour R&F, il faudra attendre 2012, avec la réédition en vinyle des albums, pour qu’il y ait un article de plusieurs pages qui retrace le chemin de The Sound. Mais, comme on dit : "Mieux vaut tard, que jamais." Bon live !


https://www.facebook.com/soundshaarlemlikesvinyl/

https://www.soundshaarlem.nl/

Ci-dessous le lien d’un site consacré à The Sound. Il y a la liste complète de tous les concerts qu’ils ont fait pendant leur carrière. Ils ont notamment joués trois fois à Paris, dont le 26 février 1981 en première partie de The Jam au Pavillon Baltard : https://web.archive.org/web/20070722162554/http://www.renascent.co.uk/pagessound/sound.html






lundi 7 février 2022

POLICE MUNICIPALE "Droit Dans le Mur" (La Souterraine) – 26 janvier 2022


Je n’ai pas pour habitude de mettre dans une chronique un copier/coller intégral de la bio d’un groupe, artiste, mais là le texte est tellement top, que je ne peux pas résister de vous faire découvrir le duo Police Municipale par un texte écrit par leur soin :

« Mat Mitard passe son enfance à l'étroit dans une meule de Comté. A la majorité, pour gagner sa croûte, il quitte son trou et part à pied rejoindre Paris. Périple initiatique duquel il gardera un souvenir ému : "Ah, boire l'eau des rivières et se masturber dans les champs, voilà le sel de la vie !" dira-t-il plus tard. Mais la capitale est une terre de vices et de mensonges et le Mitard tombe dans une nuit sans fin : drogue à outrance et filles faciles. Fasciné par la musique répétitive qui fait boum-boum, il s'équipe en machines volés et travaille ses compositions électroniques jusqu'à obtenir un certain succès. "Oune vraie mousique dé merde inaudible" se souvient Pedro, critique musical à ses heures et vendeur d'acides occasionnel. Lors d'une soirée illégale dans les catacombes, une descente de flics le conduit sur les bancs du commissariat. Il y rencontre celui qui deviendra son partner in crime.

Alcoolique notoire, Greg Le Pnuk vit de petits larcins et de grand n'importe quoi. Entre trois cuites il se consacre à l'écriture d'un projet politique d'envergure : créer la République Ubuesque De France. Mais les mesures et principes constitutionnels ont dû mal à convaincre : euthanasie des plus de soixante ans, kétamine obligatoire à la cantine, destruction totale de la monnaie... Autant de mesures que le peuple français est peu enclin à soutenir. Après un parcours scolaire et professionnel morne dont rien, à part l'ennui, n'est à relever, il décide de se consacrer à la drogue (beaucoup) et à la chanson (un peu). Il tente depuis ce jour d’accéder sans succès à la note juste

Janvier 2020, sur le banc jaune pisse du commissariat du 19ème arrondissement, Mat Mitard et Greg Le Pnuk se rencontrent. La nuit passe, la drogue aussi. Libérés au petit matin, sous la plaque de la rue Erik Satie, ils se jurent de mener un projet musical en forme de brûlot. Ils s'appelleront POLICE MUNICIPALE et ce sera un attentat sonore à la bien-pensance. »

Après cette belle présentation, haute en couleur, il est clair que la musique de Police Municipale ne sera pas jazz, classic rock, pop, variété, prog, ni reggae malgré les substances illicites, mais plutôt, punk, électro foutraque et slam du pauvre qui a une soif de vie. "Je suis précaire professionnel, je suis précaire sentimental, je suis précaire mais pas fini, oui je vie en théorie" (Souffle Cathartique). Dans l’esprit « prolo » qui vise juste ou ça pique, il y a chez eux un côté Sleaford Mods et plus obscurs côté français, on pense par instant à Ptose, à Casse Gueule, ainsi qu’à Ich Bin avec l’album culte Obéis ! (2006). Une des forces (de l’ordre non établi ?) de Police Municipale, c’est qu’il y a deux voix. Les deux voix se répondent, avec chacun son timbre (aucun rapport avec la Poste), un énervé qui utilise des gros mots (oh le vilain !) et l’autre plus posé qui semble être le narrateur, la voix off. Côté musique, c’est de l’électro « cheap jouet Bontempi », punk lo-fi minimal brut, ligné les Bérurier Noir du début. "Remplir du vide avec du vide" (Selma) scande la voix qui veut en découdre. "On fera les mêmes enfants, ils iront dans les mêmes écoles, apprendre à être exactement comme nous" (C’est toujours la même chose). Les textes de Police Municipale ne sont certes pas littéraires, mais leur regard est juste. A chacun de réfléchir, de se poser (les bonnes ?) questions sur notre (misérable ?) vie. Espérons que l’année 2022 ne sera pas merdique pour Police Municipale, malgré qu'ils soient "frustrés" (Épilogue).

Pour clore la chronique, à noter que pour l’instant, l’album Droit Dans le Mur n’est disponible qu’en numérique via Bandcamp.


https://souterraine.biz/album/droit-dans-le-mur

https://policemunicipale.bandcamp.com/



LA SEPTIEME OBSESSION n°38 "Spécial Slasher" – Janvier/février 2022


« La Septième Obsession est une revue critique de cinéma diffusée en kiosque, librairie et par abonnement, en France et à l'international, tous les deux mois. Elle a pour mission de défendre toute forme de cinéma, en particulier le cinéma d'auteur et apporter un regard cinéphile acéré sur les œuvres pour de nouvelles générations, en brisant les chapelles et barrières idéologiques. La revue navigue également entre le cinéma et les séries, et est particulièrement sensible aux questions de fabrication des œuvres. » (Texte extrait du site La Septième Obsession, rubrique "Qui sommes-nous ?".)


Avec la parution du n°1 en oct./nov. 2015 avec en titre A quoi rêvent les cinéphiles ?, la revue La Septième Obsession consacre dans ses numéros de gros dossiers autours du 7ème art : le cinéma d’horreur (n°9), Sexe (n°29), La puissance féminine (n°30), L’amour (n°32), Animaux (n°34), Arts martiaux (n°36), pour ne citer que quelques UNE. Le nouveau n° est consacré au sous genre du film d’horreur, le slasher avec un dossier de 75 pages. Le style slasher revient au-devant de l’actualité suite à la sortie le 12 janvier 2022 du 5ème volet de la franchise Scream. Le premier Scream est sortie en 1996 sur les écrans, et fait partie des films qui ont marqués le cinéma d'horreur des années 90. Réalisé par un des maîtres de l’horreur, le grand Wes Craven (La Dernière Maison sur la gauche, La colline a des yeux, Freddy les Griffes de la nuit), le film Scream est entre de bonne main pour effrayer le public. Le succès est au box-office, ainsi Wes Craven va poursuivre avec les Scream 2 (1997), 3 (2000) et 4 (2011). Wes Craven étant décédé en 2015, le petit dernier est réalisé par Matt Bettinelli-Olpin et Tyler Gillett, avec l’aide du scénariste Kevin Williamson qui a imaginé avec Wes Craven cette franchise. Scream étant très rentable, il y aura aussi une série TV sur trois saisons (2015-2019).

 


Avant de présenter le dossier, voici en une phrase la description du slasher : "sous-genre du film d’horreur dans lequel un meurtrier psychopathe poursuit et extermine un à un les personnages" (Dick Tomasovic, page 21). Cousin du genre Giallo, le slasher est plus gore, plus brutal, avec des meurtres moins graphique (photographie/couleur), moins fétichiste, moins sensuelle. La couverture du n° est explicite, ainsi le dossier commence avec la présentation de Scream, une interview de Kevin Williamson et le clin d’œil du maitre au film Halloween de John Carpenter (1978) qu’on voit dans Scream le temps d’un passage à la télé. Les films traités dans le sujet sont : Le Voyeur de Michael Powell (1960), Spider Baby de Jack Hill (1967), La Baie Sanglante film de Mario Bava (1971) considéré comme être la pièce fondatrice du slasher, Black Christmas de Bob Clark (1974), Théâtre de Sang de Douglas Hickox (avec l’acteur gothique Vincent Price - 1973),  Terreur sur la ville de Charles B. Pierce (1976) étonnant film, inspiré d’une histoire vrais, qui vient d’être publié pour la 1ère fois en DVD et Blu-ray chez Rimini éditions. Ce film où l’on voit un tueur psychopathe masqué, est surement le prototype le plus proche de ce qu’allais devenir les franchises Halloween et Freddy. On continu la liste des films qui sont au menu du dossier : Terreur sur la ligne de Fred Walton (1979), -après la vision de ce film, vous allez jeter votre téléphone à la poubelle !-, Rosemary’s Killer de Josph Zito (1981), Fondu au noir de Vernon Zimmerman (1981), Freddy 3 de Chuck Russel (1987), Jeu d’enfant de Tom Holland (1988) avec le personnage Chucky, Santa Sangre d’Alejandro Jodorowsky (1989), Destination Finale de James Wong (2000), Jeepers Creepers de Victor Salva (2001), Mandy Lane de Jonathan Levine (2006), Hostel Chapitre II de Eli Roth (2007), Dernière Séance de Laurent Achard (2011), La Cabane dans les bois de Drew Goddard (2011). Coté articles : un sujet sur les yeux avec en parallèle Le Voyeur de Michael Powell et Psychose d’Alfred Hitchcock, le sexe, le féminisme, le cri, l’arme blanche (to slash-taillader-) dans le shasher. Évidemment un sujet sur les sagas Halloween et Freddy toutes griffes dehors !, sans oublier le père de tous, Jack l’Éventreur. Si ce dossier n’a pas rassasié votre soif du Slasher, il y a le livre tout simplement titré Slashers écrit par Guillaume le Disez, Fred Pizzoferato, Marie Casabonne, Claude Gaillard, édité le 24 novembre 2020 chez Vents d’Ouest.


L’autre dossier du numéro est consacré au réalisateur Paul Thomas Anderson qui vient de sortir en salle le film Licorice Pizza. Il y a une interview de quatre pages et une chronique de tous les films qu’il a réalisé (Hard 8, Boogie Nights, Magnolia, Punch-Drunk Love, There Will Be Blood, The MasterInherent Vice, Phantom Thread, Licorice Pizza), sans oublié ses clips pout Haim (trio féminin avec l’actrice de Licorice Pizza), Fiona Apple et Radiohead. 

Enfin, rubrique Repérages, on cause sorties en salle, livres et séries.

Chez La Septième Obsession, l’écriture est soignée. On est dans l’esprit Les Cahiers du Cinéma et Positif. Le regard critique est affuté, mais sans tomber dans l’intello avec pleins de mots compliqués (ouf). La mise en page est clair et bien illustrés, avec notamment des illustrations de Hippolyte Jacquet, Maria Jesus Contreras, Antoine Maillard, Robin Goodwin et de nombreuses photos extraites des films traités. Bref, si vous voulez compéter la lecture du Mad Movie n° 356 (janvier 2022) avec Scream en couverture, pensez à ce n° de La Septième Obsession spécial slasher, sans oublier de cacher tous les couteaux et lames tranchantes, on ne sait jamais …


https://www.laseptiemeobsession.com/slasher