50 FOOT WAVE "Black Pearl" (Fire Records) – 15 avril 2022

Cela fait depuis 40 ans que la compositrice Kristin Hersh anime avec toute sa chair et sa prestance l’indie rock qui saigne sous les riffs des guitares grasses. Que cela soit avec les Throwing Muses (dont la première partie de leur concert parisien le 11 avril 1988 à l’Elysée Montmartre était assurée par les Pixies), en solo ou depuis 2003 avec 50 Foot Wave, Kristin Heash s’exprime avec fougue et rage. Déjà sa voix rugueuse ne se prête pas la musique pop et légère. Sa voix est dans le registre des écorchés comme Marianne Faithfull, Patti Smith, PJ Harvey, Thalia Zedek (Come, Live Skull). Avec 50 Foot Wave, elle est  accompagnée par le bassiste Bernard Georges (également présent dans Throwing Muses) et le batteur Rob Ahlers. Kristin compose, chante et tient solidement la guitare. Black Pearl est le 3^ème album de cette formation en trio, il contient 7 morceaux brulés vifs en 32 minutes. Car ici c’est de braise qu’il s’agit. Ne vous fier pas à la photo « carte postale » de la pochette, le banc qu’on voit au centre est peut-être celui où c’est posé un sérial killer, le temps de se préparer pour exécuter sa prochaine victime. En formation trio, guitare/basse/batterie, la musique -toutes riffs dehors- de 50 Foot Wave va à l’essentiel, pas de chichi, d’effet de style, ici c’est brut, c’est lourd, ça entre directement dans l’estomac vide. On est dans le style indie rock ricain du début des années 90, celui qui racle la gorge façon Dinosaur Jr, Hüsker Dü, Shellac, Bastro, Come. Le son granuleux de la guitare, et la rythmique en bloc massif sont les éléments centraux de l’album. On transpire au contact des riffs mono en mode garage, enfouis dans les câbles électriques, le tout habité par la voix de Kristin qui n’est pas enveloppée de velours, mais d’une toile émaillée qui gratte à même la peau. Les années passent, ce n’est pas une raison de mettre de l’eau dans son vin, la preuve en musique sur Black Pearl.

https://kristinhershfire.bandcamp.com/album/black-pearl?from=hp

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LE CHIFFRE ORGAN-IZATION "The Loved Ones" (Sound Flat Records) – 15 mars 2022

Le Chiffre Organ-ization est un trio instrumental de Montpellier qui existe depuis 2015. Avec aux commandes de l’Enterprise Organ-ization il y a à l’orgue Hammond, piano électrique Alain Jullian, à la basse, au fuzz Alain Chapot (ex Penelope, The Gentlemen’s Agreements), à la batterie, bongo, tambourine Alexandre Besson (ex The Gentlemen’s Agreements). Après avoir publié en 2019 deux 45 tours avec leurs pochettes typées visuel Library Music, voici leur premier album titré The Loved Ones. A l’intérieur de la rondelle en vinyle, il y a 14 morceaux (dont 4 interludes) de musique pop sixties digne d’un générique de série TV ou d’une BO de film d’espionnage à l’esprit BD qui fait "Shebam, pow, blop, wizz !"

Emporté par le son de l’orgue Hammond, dont son créateur Alan Hawkshaw est mort le 16 octobre 2021, la musique originale de Le Chiffre Organ-ization, avec justement la reprise Beat Me Till I’m Blue d’Alan Hawkshaw, groove à font les ballons sous le cosmic trip acid, avec un verre à cocktail qui déborde de ses bulles à l’anis. On trouve ici en party (surprise !) le style de Calibro 35, La Batteria, James Taylor Quartet, Big Boss Man, Le Superhomard, Nicolas Godin de Air avec sa BO pour la série Au service de la France, qui ont remontés à la source des génériques TV de Amicalement votre, Chapeau Melon et Bottes de Cuir, Le Prisonnier, les films avec James Bond,  Ne nous fâchons de Georges Lautner, les compilations KPM, qu’on retrouvent sur les compilations Blow Up, The Sound Spectrum, The Sound Gallery, Easy Tempo et The Mood mosaic, mais aussi la touche yéyé jerk de Nino Ferrer et sur les 45 tours de nos Swinging Mademoiselle. Les morceaux gravés sur l’album ont été produits et mixés par Arthur de Cossette, qui c’est tellement investi qu’il est présenté comme le 4ème homme du trio.

Le Chiffre Organ-ization est le type de formation qui pourrait animer une soirée dansante stylé, où l’on est à la fois bien habillé et en toute décontraction. Côté musique d’animation, on y trouve de la soul, du R&B, de psyché, de la pop, du yéyé, du garage, du jerk, soit le meilleur des sixties qui donne la banane et les fourmis aux jambes. Bref The Loved Ones est l’album fun, qui met de bonne humeur grâce à de la musique de qualité et en haute-fidélité !

https://le-chiffre-organ-ization.bandcamp.com/album/the-loved-ones

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SARAKINIKO "Red Forest" (La Maison des Corbeaux) – 15 avril 2022

Sarakiniko est le nouveau projet en solo de Yann Canevet, qui a joué entre autre dans les groupes indés Future et Venera 4. De ces groupes, Yann a gardé le son shoegaze et dream pop et un savoir-faire imparable pour composer des morceaux solides qui tiennent la route, ou plutôt le chemin de terre, vu que Yann c’est plongé dans l’esprit de la forêt pour y trouver des senteurs, une ambiance, un besoin de nature nécessaire à l’inspiration. Son style de musique étant noisy pop, chez lui la forêt n’est pas calme. Le vent, le feu, cache le chant des oiseaux et trouble la cueillette des noisettes, des glands par les écureuils pas habitués aux larsens, à la fuzz qui grésille. Ainsi dans le son, on reste collé sur le bitume qui fond sous la chaleur. Pour ce premier essai en solo, Yann Canenet a mis les atouts de son côté, en faisant appel à James Aparicio pour produire l’album. Parmi la longue liste d’artistes avec lequel il a travaillé, voici quelques noms : Mogwai, Liars, Grinderman, Spiritualized, Lumerians, Laibach. Ainsi, enregistré entre de bonnes mains et de bonnes oreilles, la musique de Sarakiniko est destinée à nous éblouir, ce qui est le cas. Tout le long des 10 morceaux, pas de faiblesse, n’y de baisse de régime. Une fois entré dans l’arbre qui cache la forêt, c’est 43 minutes de musique indie pop qui caresse nos sens en passant par plusieurs stades de vibrations entre le bruit et la mélodie. Quelque part dans l’esprit de groupes tels que Jesus & Mary Chain, Ride, The Telescopes, The Brian Jonestown Massacre, la musique de Sarakiniko fait des étincelles, auquel le + écrase le – avec aplomb. En prime le chant en langue anglaise de Yann Canevet sonne juste et possède cette élégance de ton qui capte instantanément l’oreille. Pas la peine de chercher la petite bête, où alors l’écureuil ou la belette, les compos de Sarakiniko sont justes et parfaites.  

https://sarakiniko.bandcamp.com/album/red-forest

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