samedi 30 mai 2020

LA BRUNE ET MOI réalisé par Philippe Puicouyoul



La Cinémathèque française a mis en ligne la diffusion du film punk La Brune et Moi.


En 2010, Le Chat Qui Fume (= l’éditeur culte qui sort des films cultes) a publié le film en DVD. Voici la chronique que j’avais écrite à cette occasion sur foutraque.com.

 La Brune et Moi (en référence à La Blonde et Moi de Frank Tashlin) est un film culte. Pourquoi culte ? Parce qu’il est l'un des seuls témoignages filmiques de la scène rock punk new-wave française de la fin des années 70/début 80. D’ailleurs, le sous titre est : « Le film témoin des eighties punk new-wave, La Brune et Moi » . En images, on voit les groupes Marquis de Sade, Dogs, Edith Nylon, Astroflash, The Questions, Les Privés, Go-Go Pigalles et dans la bande son on entend Taxi-Girl, Ici Paris, Artefact et The Party.
Culte encore car La Brune et Moi est un film maudit : Peu de personnes l’ont vu. Sorti au cinéma en avril 1981, le film est resté à l’affiche une semaine dans une petite salle du quartier Beaubourg à Paris. Seulement 530 spectateurs auront vu La Brune et Moi au cinéma. Depuis, la copie du film a circulé dans les festivals et soirées rock (notamment grâce à l’association Rock’en Scope) et le bouche à oreille ont fait le reste pour donner une certaine notoriété à La Brune et Moi. Donc cette sortie en DVD est quelque part une petite révolution et un graal que l’on peut « enfin » visionner chez soi avec des amis.

Bon soyons clair, bien qu'il ait gagné le prix spécial du jury au festival international du film musical du Rex à Paris en 1980, La Brune et Moi n’est pas un chef d’œuvre. Le scénario est très minimal : «Paris les Halles 1980. Un important homme d’affaire (Pierre Clémenti) rencontre Anouschka une jeune et belle punkette. Il en tombe amoureux. Anouschka est prête à être séduite par lui, a condition qu’il la fasse devenir une rock star. L’homme d’affaire va lui faire rencontrer les meilleurs musiciens de la capitale. Après divers rencontres, elle finira par chanter (approximativement) le titre « Control » avec Les Privés » .
L’intérêt du film (ou plutôt du moyen métrage, car la durée est de 50 minutes), réside dans les passages live des groupes, l’aspect doc avec en intro les punks des Halles, une séquence pogo au Club 100 et le studio de répète au Centre Beaubourg. Toutes ses images sont devenues avec la patine du temps, un instantané du Paris punk de 1980.
Filmé à l’arrache, à vif, sans répète, dans l’esprit DIY par le jeune Philippe Puicouyoul (dont c’est son premier et… dernier film de fiction en tant que réalisateur), La Brune et Moi est là comme par urgence de montrer qu’à l’époque il n’y a pas que Trust n’y Téléphone dans le rock en France. Scénario riquiqui et images brutes, ce contexte colle parfaitement au sujet, à l’image rock et sa musique basique, énergique et virulente. Oui le rock c’est de la bombe (humaine !). En cette fin des années 70, il y a des groupes qui jouent pour la survie, dégager leur désespoir des années Giscard, sans trop savoir si l’aventure peut durer. D’ailleurs certains n’auront eu le temps de ne sortir qu’un 45t, avant d’être rattrapé par la drogue, par la défonce. L’acteur Pierre-Jean Cayatte (bassiste d’Asphalt Jungle et Gazoline) meurt à la fin du film mais aussi (et là pour de vrai) quelque jours après la fin du tournage. Et, qu’est devenue l’héroïne (sans jeu de mot) Anouschka ? Depuis ce film pas de nouvelle. La poudre est t’elle aussi venue l’appeler pour rejoindre le royaume de l’au-delà ? Et ne parlons pas du cas Taxi Girl, la chanteuse d’Ici Paris qui ont déclaré forfait avec cette même « foutue poudre ».
Enfin la prestation de Pierre Clémenti (Les Idoles, Belle de Jour, La Cicatrice Intérieure…) est très minimale. Son jeu d’acteur est ici proche du débutant qui récite son texte. Par contre, s’est toujours un plaisir de le voir à l’écran, de voir son visage d’écorché vif.

Découvrir et réécouter aujourd’hui à travers ce DVD les groupes de cette époque est un réel plaisir. Leur musique garde cette fraicheur de jeunesse, et leurs styles restent pour une grande majorité encore très actuel à l’oreille. Le punk rock français possède une certaine classe qui fait plaisir à entendre. Après le coffret DVD de l’émission rock Chorus, l’année 2010 avec La Brune et Moi s'achève très bien.

En complément au film, le DVD contient 1h30 de bonus. Tout d’abord une excellente interview du réalisateur Philippe Puicouyoul. Il raconte beaucoup d’anecdotes sur la création et l’aventure du film, sur les groupes présent et le Paris alternatif de 1980. Une bonne interview rock.
Beaucoup moins intéressante, l’interview de Léone Jaffin la productrice du film. C’est clair, le milieu rock elle ne le connait pas, son propos est relativement anecdotique.
Une autre bonne interview avec Olivier Assayas. Par contre plus général, car il n’est pas très concerné par La Brune et Moi qu’il n’a pas vu. Il raconte sa passion du rock et parle de ses premiers films « esprit rock » dont Scopitone sur lequel il était scénariste.
L’interview d’Hervé Shere Khan le guitariste d’Ici Paris est un peu étrange, car il se souvient a peine du film, qu’il n’a curieusement jamais vu. Surement trop de drogue et pas assez de poisson pour garder la mémoire intact.
Plus intéressant l’interview de Patrick Eudeline. Il a toujours plein d’anecdotes à raconter sur le punk rock.

Pour conclure, malgré les défauts évoqués plus haut, La Brune et Moi reste un incontournable pour tout amateur de punk rock, et les bonus renforcent l'intérêt de l'achat.

 


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KRAFTWERK à La Fondation Louis Vuitton (Paris) du 6 et 14 novembre 2014

 

Florian Scheider, membre fondateur du groupe Kraftwerk nous a quittés le 20 avril 2020, à l’âge de 73 ans. On ne va pas vous faire un dessin, Kraftwerk sont des pionniers dans la musique électronique et de l’image/icône pop.
Fan de ce groupe depuis l’âge de 13 ans grâce au tube The Model, pour rendre hommage à Florian Scheider, voici une chronique des concerts à La Fondation Louis Vuitton en novembre 2014 à Paris que j’avais publié sur foutraque.com. Certes Florian ne faisait plus parti du groupe, car il les a quittés en 2008 pour divergences musicales.

"L’évènement live parisien du mois de novembre, aura été la semaine des 8 concerts du « Catalogue » en 3D du groupe légendaire Kraftwerk. En à peine un week-end, les 1000 places de chaque soirée se sont envolées. Les shows se sont déroulés dans le nouveau lieu à la mode, la Fondation Louis Vuitton. Ce grand paquebot en verre construit par Frank Gehry, dédié à l’art contemporain se trouve dans le bois de Boulogne à côté du jardin d’acclimatation.

Chaque soirée était dédiée à un album du catalogue qui commence à Autobahn (oubliés les 3 premiers albums). Nous avons eu « la chance » d’être aux soirées d’Autobahn et Computer World

De la formation originale, il ne reste plus que Ralf Hutter. Mais qu’importe, étant des hommes machines/robots sans guitare héros, la formation live reste digne. Kraftwerk se déplace en tournée avec tout son matériel. Ainsi le son et la mise en scène sont irréprochables. Habillés comme des personnages du film Tron, les 4 membres du groupe sont positionnés en rang derrière leurs pupitres en face du public. Le concert commence avec l’intégralité des titres de l’album de la soirée, et ensuite pendant 90 minutes c’est le best-off de leur carrière. Pour chaque titre il y a une projection 3D au visuel simpliste mais très efficace dans l’esprit pop art. L’imagerie Kraftwerk à travers leurs pochettes est dans notre inconscient collectif. Avec nos lunettes 3D on en prend plein la vue. Tous les titres, les tubes (Radioactivity, Trans-Europe Express, The Model, Numbers, Pocket Calculator, Tour de France…) sont réinterprétés d’une façon moderne et élégante. On sent que l’électro de Detroit des années 2000 est passé par là. Au fil des morceaux, on se rend compte à quel point ce groupe aura marqué les esprits. Que l’on soit fan de pop, d’électro, de new wave (c’est fou ce que New Order doit à l’album Computer World) et de hip hop (old shool), impossible de rester insensible à tant d’ingéniosité sonore. Le groupe communique à peine avec le public. Par contre entre eux il y a parfois un «petit » sourire. Ce sont bien des humains ! 

Les seuls mots que dira Ralf Hutter sont : « A demain » ou « A après demain ». A la fin de la prestation, chaque membre du groupe après un petit solo, quitte la scène en saluant le public sur les notes de Music Non Stop. Les lumières se rallument sur les applaudissements des spectateurs très enthousiastes. Le public rassemble des humains (robots ?) de 10 à 70 ans. Certains feront toutes les soirées. Que l’on se déplace avec ses enfants ou seul, la performance Kraftwerk donne des ailes et le sourire à tous. On est dans une autre dimension qui dépasse de loin la 3D. A noter que grâce à cette belle prestation, le merchandising (très fourni) est dévalisé.
Nous n’avons pas regretté d’avoir déboursé 60 euros (par soir) pour ce grand moment historique".

http://www.kraftwerk.com/