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lundi 17 juillet 2023

LA JUNGLE "Blurry Landscapes" (Black Basset/Rockerill/A Tant Rêver du Roi) – 23 juin 2023

Entre deux confinements, le duo belge La Jungle a eu de la réserve pour divers projet d’albums, dont celui-ci nommé Blurry Landscapes. Pour s’échapper de sa zone de confort, et en bon défricheurs de thèmes pour mettre sur orbite leurs nouvelles compos, Jim et Roxie de La Jungle ont eu l’heureuse idée de s’associer avec le musée Art en Marge (situé à Bruxelles). Depuis 1983, Art en Marge est un musée consacré à l’art outsider, art brut, art singulier. Les œuvres sont réalisées par des autodidactes, certains sont des pensionnaires dans des hôpitaux psychiatriques, d’autres sont ouvriers, retraités, voyageurs de commerces, cuisiniers, détenu ou autres métiers divers où l’art n’est pas présent, ou à peine effleuré. Parmi les nombreux artistes autodidactes présents dans la collection du musée, Jim et Roxie en en choisi 11 : André Robillard (célèbre pour ses fusils en bois entouré d’objets de récup et ses dessins de spoutnik, également joueur d’harmonica, d’accordéon, de batterie fait maison avec des cartouches de fusils au bout des doigts), Lien Anckaert, Laurence Halleux, Hideki Oki (la pochette de l’album), Juliette Zanon, Inès Reddah, Samuel Trenquier, Kostia Botkine, Dominique Théate,  Pascal Leyder, Serge Delaunay (mort en décembre 2021 à l’âge de 67 ans, il ne verra pas le résultat de Blurry Landscapes), et en bonus pour des portraits de La Jungle : François Peeters et Géraldine Vink. Jim et Roxie ont rencontrés tous les artistes, une grande partie à leurs domiciles, et d’autres par correspondance, époque entre deux  pandémies oblige. La jungle leur a fait écouter une composition, et leur a demandé de trouver un titre et de faire un dessin qui illustre pour eux ce qu’ils viennent d’écouter. Ils avaient carte blanche pour s’exprimer, seul contrainte, le format carré, pour les reproductions dans le livret du CD, du vinyle. Le résultat donne un album à la fois musical et visuel.

Inès Reddah, "Panther’s Rib Reddah", poscas et acrylique sur papier

L’association La Jungle et les artistes autodidactes commence avec le morceau industriel et brutal Tomorrow. La rythmique indus a inspiré à Lien Anckaert, une série de lignes noires à l’encre sur fond blanc, qui semble former une cartographie imaginaire. Etonnant. Le rythme s’accélère avec The Marvelous Forest Of Our Dreams, qui mélange noise HC et café-crème-calva pour le réveil. Ce joli vacarme donne un dessin qui se rapproche d’un tas de détritus, ou d’un bloc de feu. Faudrait poser la question à Laurence Halleux. La Compagnie De La Chanson sonne dans le style électro rock, teinté de world. C’est marrant d’avoir fait écouter ce style de musique à André Robillard, plus habituer à écouter l’accordéoniste André Verchuren. En tout cas, il a entendu une chanson, c’est dans le titre, et vu un dinosaure, c’est dans le dessin réalisé au crayon et aux feutres. C’est le dessin de Hideki Oki qui a été choisi pour illustrer la pochette. Son graphisme primitif correspond bien au nom La Jungle. Il illustre le morceau prog rock Hatching The Light avec style. Avec 1 minute et 38 secondes, Stop est le morceau le plus court de l’album. Cet instrumental est comme le générique d’un film. Juliette Zamon a représenté à l’encre de chine, une situation urbaine, avec une voiture et une flopée de personnages de tous âges, des animaux et un lot d’inscriptions sous le titre "Identifiant". On y trouve des séries de lettres : EU, HLM, OM, PMU, CV, WC…et tout en bas à droite, STOP. Ce dessin est digne d'un scénario, d’un story-board. On retrouve un dessin au style primitif (normal pour La Jungle) avec Inès Reddah qui illustre le morceau Panther’s Rib Cage. Justement dans ce morceau on entend un beat électro tribal, près à pousser ses décibels dans une rave party. Dans ce morceau, on trouve aussi une patine after punk indus qui n’aurait pas déplu à Cabaret Voltaire. Ce morceau ferait un bon single. Samuel Trenquier a utilisé des papiers à cigarette pour réaliser son œuvre à la gouache. Le morceau a pour titre Le Chemin Rapide. La peinture de Samuel Trenquier est psychédélique (la musique est tribale et art rock), ainsi pas sûr que le chemin soit si rapide, car avec toute ses visions colorées, on risque de s’y perdre, et ne pas être à l’heure pour le RDV. Le Tigre en Bottes Vertes, voilà un excellent titre pour un film Bis. C’est Kostia Botkine qui a trouvé le titre, mais pas de tigre dans son dessin, ou alors il est caché dans une des trois maisons qu’il a dessinées au feutre sur un papier. Tigre ou pas, ici l’électro est à son poste. Bass From Funky Jachy possède en effet un beat groove. Dominique Théate a l’oreille. Son dessin au feutre représente un soldat futuriste digne d’un film SF avec Arnold Schwarzennegger. On retourne en rave party avec le morceau aciiid The Growl And The Relief. Ce titre qui pulse pour les teuffeurs a donné l’idée à Pascal Leyder, un dessin à la gouache et au feutre qui montre un personnage avec son chien qui sont un peu effrayés par le son du morceau qui pulse des décibels. Tout est dans le titre : Voyage Vers le Cosmos En Vaisseau d’Argent. La musique cosmique et le dessin psyché pop de Serge Delaunay illustre bien le titre. Dans le dessin en noir et blanc, réalisé à l’encre, on voit des planètes, des satellites, dont un satellite avec un cosmonaute qui joue de la guitare avec à côté de lui un robot qui écoute. Ce magnifique dessin entre naïf et BD, aurait également fait une belle pochette pour le disque. Au final, l’association Art en Marge et La Jungle est à la fois une belle idée et une réussite. La Jungle continue de nous surprendre, on aime ça !


 

Géraldine Vink, "La Jungle", stylo bille sur papier

Interview de La Jungle réalisé en mai 2021 ici : https://paskallarsen.blogspot.com/2022/01/la-jungle-en-folie.html

https://lajungleband.com/

https://lajungle.bandcamp.com/album/blurry-landscapes

https://www.artetmarges.be/fr/index.html


samedi 20 mai 2023

ENSEMBLE VEGETAL NAÏF ET POETIQUE : 15 rue René Villermé 75011 Paris


Au 15 rue René Villermé, Paris 11ème, il y a  une petite installation paysager. En prenant les photos, j’ai fait la connaissance de la personne qui a réalisé ce bel ensemble végétal. C’est un retraité d’origine asiatique, il habite au 1er étage de l’immeuble d’en face, ce qui lui permet de voir ses plantes grandir. Depuis trois ans qu’il fait vivre cet espace végétal,  il n’a pas eu de souci avec la marée chaussée de Paris. Au contraire, ce qu’il a réalisé plait aux fonctionnaires de la ville. Il n’a pas eu également de dégradation, de vol, les passants respectent son travail.

Situé devant le Foyer Notre Dame de Pentecôte, un foyer catholique d’étudiantes, notre artiste en herbe a installé sur le trottoir, derrière des barrières anti-stationnements, une quinzaine de pots avec des plantes vertes. Coté chaussée, il a mis un grillage pour protéger les plantes, où il a accrochés des jouets en plastiques, des inscriptions, des dessins, des collages, liés à son histoire, son vécu. Sur le rebord de la chaussée, il y a aussi des fleurs en plastique.

La nuit, les vitraux du foyer catholique donnent un bel éclairage. Au balcon de l’appartement du retraité, il y a également quelques pots de fleurs. La nuit, il lui arrive de mettre des bougies, des objets kitchs lumineux qui scintillent. Ainsi la nuit, installé à son balcon, notre jardinier singulier regarde ses plantes de l’autre côté de la chaussée, éclairées par les vitraux du foyer. Chez lui, c’est noël toute l’année !


Photos  @ Paskal Larsen - Paris 19 mai 2023