dimanche 29 novembre 2020

MASSIVE ATTACK "Blue Lines" (Wild Bunch Records/Circa Records/Virgin Records) – 8 avril 1991


MES DISQUES A EMPORTER SUR UNE ILE DÉSERTE: Chronique n°2

Après l’album Drums and Wires d’XTC (1979), j’ai choisi d’écrire quelques lignes sur Blue Lines de Massive Attack, un album charnière dans ma culture musicale. Cet album est sorti en avril 1991, c’est le premier long format de ce groupe de Bristol né du réseau du soundsystem, et qui s’est formé en 1988.

A noter que cet album est sorti lors du conflit de la guerre du Golfe. Pendant quelque mois, Massive Attack a du s’appeler Massive pour ne pas avoir de souci. Le mot Attack dérangeait les autorités. Il existe des pochettes de l’album qui n’ont que le mot Massive sur le recto.



Blue Lines va transformer ma culture musicale. Avant 1991, j’écoutais principalement de la musique rock indé et plus particulièrement de la new wave, du punk, du gothique, de la noisy pop, de l’indus, de la noise et du HC. J’écoutais peu de musique "noir/afro". Juste quelques morceaux de rap old school (Grandmaster Flash, The Surgarhill Gang) grâce à Rapture de Blondie et à Wordy Rappinghoud de Tom Tom Club, un peu de disco style Donna Summer et c’est tout. La musique de Massive Attack m’a ouvert sur le hip-hop (Arrested Developement, De La Soul, A Tribe Called Quest, Dream Warriors) , la funk/blaxploitation (Issac Hayes, Quincy Jones, Curtis Mayfield, Marvin Gaye, Roy Ayers), la soul (The Temptations, Cymande, The Meters, Lonnie Liston Smith), le dub (Horace Andy, Augusto Pablo, King Tubby, Lee Scrach Perry) les BO de films (Lalo Schifrin, Roy Bud, Ennio Morricone -avant je ne connaissais que sa musique pour les films de Sergio Leone-), l’easy listening, bref les 9 morceaux de cet album m’ont ouverts un large univers musical et à ce titre, je ne remercierais jamais assez Rober Del Naja aka 3D, Grant Marshall aka Daddy G, Andrew Vowles aka DJ Mushroom et par la suite Tricky (présent sur l’album Protection -1994-) dont je vais suivre de prêt sa carrière en solo.

Je ne sais plus comment j’ai découverts ce groupe, vu qu’en 1991 j’étais plutôt dans le style Jesus Lizard, Big Black, Sonic Youth, Melvins, Cop Shoot Cop, Unsane et Cows. Surement avec le bimestriel Les Inrockuptibles (mais le n°38 avec PJ Harvey en couverture est sortie en juin 1992) et le clip du morceau Unfinished Sympathy où l’on voit en plan séquence Shara Nelson marcher d’un pas décidé dans l’avenue Peico à Los Angeles, qui m’a séduit. Un peu de douceur sonore, mais avec de la rébellion en retenu, dans ma tête remplie de bruit et de larsen, ça ne faisait pas de mal. J’ai acheté l’album en CD, surement à la Fnac des Halles ou en occas. à Parallèles. Il a beaucoup tourné sur ma platine CD, car il ni a aucune faiblesse sur cet album, les 9 morceaux s’enchainent comme si on visualisait un film sans temps mort, avec un suspens qui nous tient en haleine. Shara Nelson et Horace Andy sont les invités de cet album. C’est d’ailleurs Blue Lines qui va faire connaitre Horace Andy à un public plus large que celui du reggae dub. En 1996 Melankolic, le label de Massive Attack va publier la compilation Skylarking. Horace Andy sera un invité récurant dans les albums suivants de Massive Attack

Sortir Blue Lines en 1991 était un coup de grâce coincé entre la britpop anglaise et le grunge américain. Cet album ne restera pas longtemps orphelin et va être le point de départ d’un nouveau courant musical que l’on va appeler trip-hop, soit un  mélange de hip hop, de soul à la cool avec de l’électronica, teinté de BO de films et des breakbeat pépères. Dans le lot, se sera surtout Portishead qui va tirer son épingle du jeu. 


Je m’étonnais de découvrir la musique "black" grâce à Massive Attack, tout comme je vais être étonné de découvrir qu’ils sont des fans d’after punk et de new wave, jusqu’à inviter Elizabeth Frazer du groupe Cocteau Twins sur l’album Mezzanine (1998) pour chanter sur trois morceaux. Dans les années 80, les Cocteau Twins, comme une grande partie des artistes du label 4AD me feront passer une adolescence plus heureuse. Inutile de préciser que les tournées qui ont suivi la sortie de l’album Mezzanine ont fait fantasmer de nombreux spectateurs dans l’espoir de voir Elisabeth Frazer sur scène avec Massive Attack, vu que Cocteau Twins s’est séparé en 1997. Cela s’est fait pour la tournée de 2019 qui fêtait les 20 ans de l’album.

J’ai vu à trois reprises Massive Attack en concert à Paris. Le 30 mai 1998 à La Mutualité, le 10 novembre 2009 au Zénith et le 27 août 2016 à Rock en Seine. A chaque fois j’ai été bluffé par le spectacle visuel et le professionnalisme plutôt détendu des deux leaders 3D et Daddy G qui viennent de temps à autre prendre la température sur scène entre le passage de deux invités.

En 2012, le groupe réédite Blue Lines en double vinyle dans un box cartonné avec en plus le CD, le DVD et un poster. Le son du vinyle est irréprochable, la pochette en gatefold est magnifique, par contre il n’y a aucun morceaux inédits, pas de démos, ni de live, non juste les 9 morceaux intemporels de cet album majeur sorti au tout début des années 90, soit bientôt 30 ans. Le temps défile à une vitesse et certains disques comme Blue Lines n’ont aucune trace d’usure du temps. Ces disques (sa fonctionne aussi pour le cinéma) sont des classiques à transmettre de générations en générations.

https://www.discogs.com/fr/Massive-Attack-Blue-Lines/release/65754

https://www.massiveattack.co.uk/






samedi 28 novembre 2020

XTC "Drums and Wires" (Virgin Records/Polydor) – 19 septembre 1979


 

MES DISQUES A EMPORTER SUR UNE ILE DÉSERTE: Chronique n°1

Voici une nouvelle rubrique, avec la chronique d’un album important pour moi, qui a participé à forger ma culture musicale. Pour la première chronique, autant commencer par le commencement, avec un des premiers disques de rock que j’ai acheté, c’est l’album Drums and Wires du groupe XTC. C’était fin 1979 ou début 1980, j’avais 14 ans et j’habitais en pleine campagne dans le département qui s’appelait à l’époque les Côtes du Nord (depuis 1990 le nom est Côtes d’Armor, car c’est plus vendeur pour le tourisme qui n’arrive pas à situer ce département en Bretagne, mais dans le nord de la France). Pour me déplacer en ville, j’y allais en mobylette et ce n’était pas souvent. Ainsi de mémoire, cet album je l’ai acheté par correspondance sur le Club Hachette (ou similaire je ne suis pas sûr du nom) qui m’envoyait tous les 2 mois un catalogue par courrier. Une fois le disque commandé, il fallait attendre un mois minimum pour le récupérer dans la boite aux lettres. L’attente permettait d’apprécier encore plus le disque, devenu un symbole de Graal.


 

J’ai découverts XTC avec leur morceau Making Plans For Nigel, qui passait beaucoup à la radio. C’était un tube au côté de Message in The Bottle de Police, Gangsters de The Specials, One Step Beyoud de Madness, Brass In Pocket de The Pretenders, African Reggae de Nina Hagen Band, Atomic de Blondie, London Calling de The Clash. Oui l’année 1979 était un bon cru du côté single rock. Si tous ses morceaux ont été importants pour moi pour découvrir et apprécier le rock, le single d’XTC avait ce petit plus qui m’a accompagné pour suivre leur carrière. Il y a la voix d’Andy Partridge qui est unique (comme la voix de Feargal Sharkey d’Undertones). Sa façon de chanter, son accent anglais une fois entré dans la tête, reste marquée instantanément et pour longtemps, comme la touche personnelle du peintre, auquel on reconnaitra tout de suite le style dès qu’on verra un tableau de lui dans une expo collective. Ensuite la musique sèche, rapide et mélodique est un joli coup de ciseau pour avoir la coupe branché du moment. Car en 1979 on est en plein dans les années New Wave. L’année 1980 approche, on va quitter les 70’s pour mieux explorer une nouvelle musique avec de nouveaux groupes. Certes XTC, n’est pas un nouveau quatuor (sauf dans le personnel avec un changement de guitariste et de clavier), Drums and Wires est leur 3ème album, mais leur son colle a l’air du temps, le single sonne très new wave et le choix de Steve Lillywhite pour  produire l’album est judicieux. Steve Lillywhite est le producteur chouchou de la nouvelle vague. En 1978 il a produit The Scream de Siouxsie and the Banshees, le premier album S/T et Ha ! Ha ! Ha ! d’Ultravox, So Alone de Johnny Shunders, le premier album S/T de The Psychedelic Furs et par la suite il va produire Talk Talk Talk de The Spychedelic Furs, The Changeling de Toyah, une bonne partie des albums de U2 et Big Country, Sparkle in the Rain de Simple Minds, Naked des Talking Heads, Peace and Love des Pogues, l’unique album de The Las’, Vauxhall and I de Morrissey. En 1979, Steve Lillywhite à 24 ans, il n’est pas encore un vieux requin de studio, autant dire qu’il comprend très bien le son demandé par ses jeunes groupes qui ont en parti le même âge que lui. 

 


L’album sort en Angleterre le 19 septembre 1979. Le 18 novembre le groupe passe dans l’émission Chorus animé par Antoine de Caunes et Jacky. Mais l’enregistrement du concert a lieu le 29 octobre au Théâtre de l’Empire. A noté que cette émission où l’on voit des groupes jouer en live devant un public, est diffusée le dimanche midi juste après l’émission religieuse et avant les infos. En Angleterre XTC passent dans la célèbre émission populaire Top Of The Pops, divertissement connu pour voir les groupes jouer en playback. 


 

En Angleterre, le morceau Making Plans For Nigel atteint la 17ème place des ventes. Sur le site internet Tubes en France, sur la semaine du 11 mai 1980, le morceau est à la 36ème place, mais la semaine précédente à la 28ème place. Petite remarque signalé dans le livre Discographie personnelle de la New Wave écrit par Pol Dodu, dans le pressage français de l’album,  le 3ème morceau Life Begins at The Hop est un single qui est sortie en Angleterre en avril 1979 et qui aura un succès, mais il ne figure pas sur l’album original. A la place, c’est le morceau Day In Day Out. De même, le single Making Plans For Nigel sortie en France n’a que deux titres (au lieu de trois). La face B française est le single anglais Life Begins at The Hop et enfin le verso la pochette du 45t est différente. Je ne pense pas qu’actuellement les distributeurs Français prennent autant de liberté pour modifier les disques de rock anglo-saxon.



On est le 28 novembre 2020, et pour écrire cette chronique j’ai sorti mon disque vinyle (pressage français) que je n’ai pas perdu, malgré les aléas de la vie, en plus le vinyle ne craque pas. Et pourtant à l’époque, je l’ai beaucoup écouté sur mon tourne disque couleur orange que mon frère m’avait acheté pour ma communion, ce qui prouve que ce pressage "fabriqué en France" est de qualité. 41 ans plus tard, la musique n’a pas pris de rides (à l’inverse de moi), au contraire, le son est toujours aussi frais et novateur. Andy Partridge, mais aussi le bassiste Colin Moulding (c’est lui qui a écrit les paroles de Making Plans For Nigel) ont des voix élastiques qui leur permettent d’avoir des tonalités, digne d’un acteur de théâtre. Coter musique, XTC est doué pour malaxer la musique pop (pour les mélodies on sent l’héritage des Beatles) avec des riffs parfois foutraques qui piochent dans le psychédélique de Soft Machine avec l’énergie after punk de l’époque, tendance Wire. Le son est à la fois clair et insolent. Les morceaux Scissor Man et Complicated Game sont des bons exemples de la musique complexe du groupe, comme une sorte d’acide pop sur ressort avec la tête sous les draps ou dans une boite métallique. La batterie imposante de Terry Chambers est la patte du producteur Steve Lillywhite, qui en fera son commerce avec le rock héroïque de U2, Big Country et Simple Minds. En 1980, XTC publie l’album Black Sea, mais là pas de tube en France, mais qu’importe, je vais suivre avec attention leur carrière ainsi que le projet The Duke Of Stratosphear. Par contre je ne les ai jamais vu en concert, car à partir du 18 mars 1982 (concert au Palace raconté ici par un spectateur :  http://www.uneviedeconcerts.com/archives/2009/12/24/16743542.html ), suite à un malaise d’Andy Partridge après seulement quelques minutes sur scène, le groupe arrêtera les concerts et ne se consacrera exclusivement qu’au studio pour la compositions des morceaux. Et, de ce côté, XTC va nous offrir de nombreux albums excellents, avec un son qui va changer au fil des projets. Le style sera moins vif, plus mélodique et toujours novateur.

Pour clore cette chronique, j'ai découverts chez Gibert Joseph que l’album vient d’être réédité avec en bonus un 45t deux titres, comme dans la première édition anglaise. Pressé sur un vinyle 200G haute-fidélité, cette version est approuvée par Andy Partridge. C’est peut-être le bon moment de le racheter et ainsi laisser reposer mon édition française (sans 45t) de 1979.


https://www.discogs.com/fr/XTC-Drums-And-Wires/master/70126