vendredi 13 novembre 2020

SAFFRON EYES "Pursue a Less Miserable Life" (We are Unique ! Records/Bigwax Distribution) – 13 novembre 2020


Saffron Eyes est un jeune groupe stéphanois qui s’est formé en 2018. Au sein du groupe, il y a la chanteuse Laetitia Fournier, que l’on connait déjà avec son projet solo Raymonde Howard, le guitariste Cyril Braga (ex Le Parti), le bassiste Thomas Walgraffe (ThOmas.W) et le batteur Cédric Ampilhac. Saffron Eyes composent une musique aux couleurs noise rock électrique, tendue et à fleur de peau (les 4 premiers morceaux du mini album qui dure 19 minutes), tout en gardant un pied dans la sphère indie pop (les trois morceaux suivants). Coté son, on est au début des années 90, avec des groupes tels que Sonic Youth, Band Of Susan, Pixies, PJ Harvey et plus près de nous avec Shannon Wright, Laetitia Sheriff et Miët. Le morceau qui résume le mieux l’étendue de leur style noise et pop indé est Sunset People. Le jeu entre voix féminine et voix masculine  (avec une touche de Mark E. Smith/The Fall) donne un super relief à la rythmique entêtante du morceau. Sur Great Expectations le jeu guitare/basse a un petit air très sympa qui évoque The Cure du début. Au final, sous son apparence électrique portée par une voix féminine en alerte (Sad Helen), au fil des compos la musique de Saffron Eyes ouvrent d’autres portes, en apportant un peu de douceur (avant la tempête ?) et de blues mi rural, mi urbain. Le disque s’achève et on voit bien se dessiner la patte sonore du groupe qui nous prépare pour un album qui n’aura plus besoin d’avoir des références pour trouver sa place dans l’échiquier du rock indé. Pour finir la chronique, en rapport au titre du disque, si à l’écoute de leur musique, notre « vie peut être moins misérable » (pauvres pécheurs que nous sommes) ce sera déjà un bon moment de gagné.

PS: A noter que le disque sort le 13 novembre 2020, soit 5 ans après les attentats terroristes à Saint Denis et à Paris, dont au Bataclan lors du concert de Eagles of Death Metal. Triste souvenir qui reste dans l'actualité. Qui aurait pu imaginer avant cette date, que l'on pouvais se faire tuer lors d'un concert de rock ou juste pour boire un verre à la terrasse d'un café.

https://saffroneyes.bandcamp.com/releases

https://www.facebook.com/saffroneyes/

http://www.weareunique.fr/artists/saffron-eyes_39/





jeudi 12 novembre 2020

THE STROPPIES "Look Alive"(Tough Love Records ) – 5 juin 2020


The Stroppies est un groupe australien (de Melbourne) qui s’est formé en 2016. Rapidement leur musique pop rock indé/lo-fi est gravée sur un support physique. Un EP 6 titres en 2017 (sortie initialement en K7), l’album Whoosh ! en 2019 et le mini LP 8 titres Look Alive au printemps dernier. Pour les plus rapides et chanceux qui les ont vu en concerts (= avec du merchandising), la première éditions des disques limités à 250 exemplaires, contient un 45t bonus. Ces versions sont généralement introuvables chez les disquaires.


Chaque membre du groupe a joué dans diverses formations (Blank Statements, Dick Diver, White Walls, Tyrannamen, Possible Humans…), mais il semble que c’est The Stroppies qui est en 2020 la plus solide des entités. A l’image de la sonorité du nom du groupe, The Stroppies compose une musique noisy pop et lo-fi dans la tradition des groupes du style The Velvet Underground/Maureen Tucker, The Feelies, Modern Lovers/Jonathan Richman, Galaxie 500, Yo La Tengo, Pavement, The Pastels, la scène indé néo-zélandaise autour du label Flying Nun. Soit une musique au son ligne claire parfois perturbée par quelques petits larsens, le tout dans un esprit artisanal bricolé à la maison, avec comme trousse de secourt un jouet Ficher-Prise en guise de synthétiseur. Fun et sautillantes, les compos de The Stroppies sont touchantes de par leur spontanéité très communicative, une impression de proximité, avec une voix parfois fragile, comme si la première prise d’enregistrement était la bonne, sans le besoin d’en faire le morceau pop parfais. De part cet esprit DIY sans chichi et frontal sans l’ajout de superflue, The Stroppies arrive à composer des morceaux qui sonnent instantanément bien. C’est comme des versions démo qui n’ont besoins de rien de plus pour être efficace. Dans ce style d’esprit, on est quelque uns  à préférer les versions Goo demos à l’album officiel Goo de Sonic Youth. Ces versions sont disponibles sur la réédition CD Deluxe Edition, idem pour le premier LP des Cure avec ses "rarities studio demo" également disponible en CD Deluxe Edition. Certes au fil du temps la musique des Stroppies s’est affiné, pour ne pas que le coté démo devienne un boulet, comme une marque de fabrique indélébile. Ainsi l’album Whoosh ! sent le passage dans un studio avec le producteur et ingénieur du son Zachary Schneider. Pour Look Alive The Stroppies revient malgré tout à la source, avec l’esprit DIY. L’album a pris forme sur la route pendant les tournées puis enregistré à la maison. C’est finalement de cette façon qu’ils arrivent le mieux à s’exprimer. L’amateur de la musique pop lo-fi, non pas élevé au grain, mais au son frais et aéré ne va pas s’en plaindre.


https://thestroppies.bandcamp.com/album/look-alive

https://www.facebook.com/Thestroppies/

https://tough-love-records.myshopify.com/









mercredi 11 novembre 2020

PATRICK COWLEY "Some Funkettes" (Dark Entries Records) – 19 octobre 2020


Avec Some Funkettes, le label Dark Entries poursuit son travail de découvertes, petits trésors grâces aux archives fournies par la famille de Patrick Cowley (1950-1982), notamment son frère Jim. Avant de se faire connaitre avec son travail pour la reine/diva du disco Sylvester, puis ses albums solos au début des années 80 (juste avant sa mort causé par le SIDA à l’âge de seulement 32 ans), Patrick Cowley avait composé de nombreuses musiques qui n’avaient jamais vu le jour. Depuis 2009, Dark Entries essai de pâlir a ce manque, avec la publication de plusieurs compilations de morceaux inédits, composés entre 1973 et 1980.

Nous sommes au tout début des années 70, bien avant d’être une figure du disco, plus particulièrement du style Hi-NRG, Patrick Cowley est un des premiers musiciens à expérimenter, faire accoucher ce qu’il y a dans le ventre des synthétiseurs. En 1971 il fait des études dans le domaine de la musique électronique au City College à San Francisco. En 1972, avec deux amis étudiants, il compose, fait des recherches à l’Electronic Music Lab créé par Jerry Mueller, qui vient d’acheter un synthétiseur de la marque Putney. C’est la marque de synthé la moins chère sur le marché. Pendant cette période, Patrick Cowley va expérimenter et apprivoiser les synthétiseurs pour petit à petit trouver son style musical, qui sera novateur pour les générations suivantes issus des années 80 aux années 2000.

En attendant qui soit reconnu, pour gagner sa vie il travaille comme éclairagiste au City Disco, un club gay de San Francisco. C’est dans ce club qu’il va faire la connaissance de Sylvester, jusqu’à collaborer ensemble en 1979 sur l’album Stars de Sylvester. Mais ceci est une autre histoire.


Le label Dark Entries préfère nous faire découvrir les dessous des paillettes, des pistes de danse, chercher le côté « docteur Frankenstein du son » du bricoleur de génie Patrick Cowley, alors confiné dans son coin à l’ombre des regards. Et c’est clair qu’il y a des belles pépites dans ce Some Funkettes qui voit le jour en octobre 2020, soit 45 ans après la création des morceaux. Cette nouvelle compilation contient 6 titres qui ont la particularité d’être des reprises. Composés entre 1975 et 1977, les reprises choisis sont, Do It Any Way You Wanna de People’s Choise, une réinterprétation instrumentale du tube Papa Was The Rolling Stone des Temptations, titré ici en Papa Wuzza Rollinston. La version de 7 minutes de Patrick Cowley est totalement funky, groove, cosmique et entêtante. Le riff de la guitare funky mélangé à la grosse basse et aux synthés sous acid est un must sonore pour les oreilles. Les amateurs de Giorgio Moroder, Black Devil Disco Club seront aux anges. Le morceau minimal, répétitif et orgasmique Spiked Punch reprend le riff de Cameleon d’Herbie Hancock. Magistral ! La face B commence avec le classique des classiques, I Feel Love de Donna Summer. Si la version instrumentale de Patrick Cowley semble proche de l’original composé par Giorgio Moroder, assez rapidement le rythme machine sexuelle et érotique, en fait un morceau contemporain de John Carpenter et précurseur du son électro de Détroit, des premiers albums et mix de Depeche Mode, Gary Newman, Telex et DAF. Après ces 10 minutes chaud comme de la braise, la reprise Dynomite de Tony Camillo’s Bazuka est comme un interlude un peu cheap et barré, tout en étant disco funk. L’album s’achève avec une nouvelle relecture de Chameleon sous l’apparence de Spiked Punch Dub. Cette version qui vient d'être éditée, aurait fait école dans l’électro cheap des années 90/2000 avec des artistes tels que Jake Slazenger, U-Ziq, Aphex Twin, Plaid.  Cette version électro est très moderne, on peut même rajouter intemporel. En tout cas merci au label Dark Entries de nous avoir fait découvrir ses reprises, qui auraient pu rester coincés à tout jamais dans des archives. Ce qui aurait été une grande perte pour les amateurs de musique électronique et de disco underground.


https://patrickcowley.bandcamp.com/album/some-funkettes

https://www.darkentriesrecords.com/?s=patrick+cowley&post_type=product