samedi 1 avril 2023

TANGERINE DREAM "B.O. Three O’Clock High" (Varèse Sarabande) – 27 janvier 2023

Dans les années 80, le groupe allemand Tangerine Dream a composé pour le cinéma américain de nombreuses B.O. : Thief (Le Solitaire en VF) de Michael Mann (1981),  Risky Business de Paul Brickman (1983 avec le jeune Tom Cruise), Firestarder de Mark L. Lester (1984), Legend de Ridley Scott’s (1986), Shy People (Le Bayou en VF) de Andrei Kontchalovski (1987), Near Dark (Au Frontière de l’Aube en VF) de Kathyn Bigelow (1987), Miracle Mile (Appel d’urgence en VF) de Steven De Jarnatt (1989- excellent film d’anticipation), Catch Me If You Can de Stephen Sommers (1989) et retour en 1987 avec la B.O. du film Three O’Clock High (Trois heures, l’heure du crime en VF) de Phil Joanou, sujet qui nous intéresse ici.

Synopsis :

"Le lycéen, Jerry Mitchell (Casey Siemaszko), est contraint d’écrire une nouvelle pour le journal officiel de l’établissement à propos d’un nouveau venu, Buddy Revell (Richard Tyson), qui est réputé pour être un dur. Quand Jerry met sa main sur le blouson noir de Buddy, ce dernier le met au défi de le retrouver à 3 heures de l’après-midi dans le parking du lycée pour régler leurs comptes. Jerry va devoir tout faire pour éviter la confrontation avec ce psychopathe qui ne parle à personne et tire la gueule sans la moindre trace de sourire. Ce sera le match entre David contre Goliath !"

Three O’Clock High est le premier film de Phil Joanou, qui réalisera par la suite Les anges de la nuit (1990 avec Sean Pean, Gary Oldman, John Turturro), Sang chaud pour meurtre de sang-froid (1992 avec Richard Gere, Kim Basinger) et le doc film  Rattle and Hum avec U2 (1988). Avant Three O’Clock High, Phil Joanou réalise deux épisodes pour la série TV Histoires Fantastiques (1985) produit par Steven Spielberg. C’est justement Spielberg qui va proposer à Phil Joanou de réaliser ce film écris par Richard Christian et Thomas Szollozi (séries TV L’incroyable Hulk, L’Agence tout risque). Dans un premier temps il va refuser, car  d’abords titré After School, ce film fait partie de la famille College Teen Movie, genre très en vogue dans les années 80, avec en tête le succès de  The Breakfast Club de John Hughes (1985), style que notre jeune réalisateur a abordé dans son court métrage Last Chance Dance (1984). Mais après une nuit de sommeil, il réalise qu’il vient de dire non à Steven Spielberg, -dont le film Les Dents de la mer l’a marqué à vie- et à la société Universal. Il court dire oui à Spielberg, producteur non crédité au générique de Three O’Clock High

Comme Tangerine Dream a composé la B.O. du film Risky Business, dont le héros (Tom Cruise) est également un lycéen, le groupe est contacté pour réaliser celle de Three O’Clock High. Quand Phil Joanou découvre le résultat, il est catastrophé, car la B.O. de Tangerine Dream est plutôt destiné à un film d’horreur, alors qu’ici c’est une comédie. Après quelques ajustements, c’est dans la boite pour illustrer la course contre la montre du gentil lycéen tout frêle Jerry Mitchell, qui voudrait éviter la bagarre avec le viril, dur et méchant Buddy Revell. Comme c’est une course contre la montre, (de 9 à 15 heures entres les cours), la musique répétitive, sous tension, exécuté avec des notes aux synthétiseurs de Tangerine Dream illustre bien le mouvement des aiguilles de la montre qui avance au rythme du tic-tac. Phil Joanou c’est inspiré du film After Hours de Martin Scorsese (1985), où l’on voit sur l’affiche une montre. Comme le réalisateur n’avais pas assez de matière sonore, le compositeur Sylvester Levay (Silver Convention, Donna Summer, Giorgio Moroder) a écrit cinq morceaux, le chanteur Jim Walker interprète le morceau Something To Remerber Me By au style bien rock FM 80’s.

Three O’Clock High est une comédie de série B sympa, certes pas indispensable, mais son effet Kiss Cool 80’s, lui donne une note de sympathie. Le point fort du film, ce sont les effets de caméra avec des arrêts, des accélérations, plongé, contre plongé, ce qui donne une notion sur le temps qui passe. Une des scènes étonnante, est celle qui se passe dans la bibliothèque, avec les rayons de livres qui tombent comme des dominos. En 1987, il n’y avait pas les trucages numériques, Phil Joanou a dû retourner cette scène, remettre les rayonnages en place avec le millier de livres à ranger. Les comédiens, à l’époque des totales inconnues (le film a été réalisé avec un petit budget), qui ne deviendront pas connu, du moins en France, font juste leur job, mais aucun ne laissera de trace dans les annales du 7ème art. A sa sortie américaine, le film fait un bide. Je ne pense pas qu’il soit sorti en salle en France, où alors une sortie très discrète. D’ailleurs le titre français, Trois heures, l’heure du crime, c’est n’importe quoi, vu qu’il n’y a pas de crime. Il n’y a pas eu non plus de sortie VHS. Pour la sortie DVD, il faudra attendre 2021 avec le combo Blu-ray DVD chez Rimini. Enfin l’autre point fort est la B.O. de Tangerine Dream, qui permet de découvrir 35 ans plus tard, ce film teenager passé sous les radars. A noter qu’ici les morceaux de Tangerine Dream sont comme des pastilles, vignettes car de nombreux morceaux ne font qu'une minute. On est bien loin des plages ambient de 20 minutes qui recouvrent la face entière d’un 33 tours. Malgré la courte durée des morceaux, la B.O. s’écoute avec plaisir, sans être juste de la Library music destinée aux professionnels de l’image, et non au public. Évidemment la pochette qui reprend l’affiche du film est bien loin de l’image qu’on se fait de Tangerine Dream, pape du krautrock, de l’ambient et de l’électro.

Sortie en 1987 aux formats LP, CD, cassette, la B.O. n’a été réédité qu’en 2022 en CD et en 2023 en LP. On y trouve le même nombre de morceaux, mais remastérisé. La version vinyle du 35ème anniversaire de la B.O. contient un poster de l’affiche dessinée par Drew Struzan et des notes de Phil Joanou.

Nota 1 : Les renseignements qui m’ont permis d’écrire cette chronique, proviennent de l’interview de Phil Joanou "Le délégué de classe", inclus dans les bonus du combo Blu-ray/DVD édité par Rimini Éditions.

Nota 2: Tangerine Dream sera en concert à La Gaîté Lyrique (Paris) le 20 mai 2023. Après la mort d'Edgar Froese en 2015, le line-up de Tangerine Dream s’est recomposé autour de ses fidèles : le directeur musical Thorsten Quaeschning, entouré de Hoshiko Yamane, Ulrich Schnauss et Paul Frick. Ensemble, elle et ils prolongent l’histoire d’un projet pas comme les autres, comme continue de le prouver Raum, dernier album de Tangerine Dream publié en 2022. Ce concert exceptionnel dans la Grande salle de la Gaîté Lyrique s’inscrit dans la tournée From Virgin To Quantum Years de Tangerine Dream, qui présente sur scène les travaux récents d’un mythe encore en mouvement. (Texte extrait de la page concert de La Gaîté Lyrique -https://gaite-lyrique.net/evenement/tangerine-dream-malibu )

https://www.tangerinedreammusic.com/en/music/detail.asp?id=38&tit=Three+O%E2%80%99Clock+High







vendredi 31 mars 2023

LEO SIDRAN "What’s Trending" (Bonsai Music) – 10 mars 2023

Dès sa naissance à Madison dans le Wisconsin aux États-Unis, Leo Sidran a baigné dans la musique. Son père, Ben Sidran est un célèbre pianiste de jazz funk. Il a notamment joué sur les premiers albums du Steve Miller Band (NDLR : Si vous êtes allergique à ce groupe, il y a malgré tout le morceau Macho City à sauver. D’une durée de 18 minutes, ce titre est une tuerie méga groove cosmic. Elle recouvre la face B de l’album Circle of Love sorti en 1981). Sur son premier album Feel Your Groove (1971), on trouve parmi les musiciens, des pointures telles que Charlie Watts (The Rolling Stones) et Pete Frampton. Ben Sidran publie toujours des albums, Swing State est sorti en mai 2022. Mais là, on trouve son rejeton Leo à la batterie ainsi qu’à la production. Depuis 1998, Leo est le batteur attitré de son père. Encore à l’université, en 1998 Leo Sidran publie son premier album Leo and the Depleting Moral Legacy, avec son père au piano. Le virus de la musique est familial. Sur What’s Trending, huitième album solo de Leo Sidran, on trouve toujours son père Ben au chant sur le morceau There Was A Fire, mais aussi sa fille Sol, (11 ans) au chant sur trois morceaux et en photo sur la pochette de l’album. La relève est en marche, d’autant qu’elle a une belle voix. Sur What’s Trending il n’y a pas que la famille, il y a aussi de nombreux musiciens et chanteurs, dont Janis Siegel (Manhattan Transfer), Jon Lampley (Huntertones), Lauren Handerson et Michael Leonhart de Steely Dan, une des grandes influences (avec Michael Franks célébré avec l’album Cool School -2018-) de Leo Sidran. Sur sa musique cosy, on trouve plusieurs couleurs sonores : latin jazz rock, pop, funk suave, swing, hip-hop downtempo. Le son est très 80, avec une touche FM-MTV américain assumé, notamment avec le morceau titré 1982 qui permet à Leo de nous faire partager la musique de son adolescence. Les paroles de 1982 sont uniquement constituées par les artistes Huey Lewis, Toto, The Police, Hall & Oates, Stevie Wonder, Steve Miller Band. Quelle brochette ! On a juste oublié Garland Jeffreys et son album Guts For Love, notamment le morceau Surrender. Par contre on entend Prince par transparence sur le morceau Crazy People. On est ici dans de la musique à faire peur au punk HC et à l’amateur de musique expérimental, mais l’habitué d’une salle telle que le New Morning ou le Suncet Suncide (1), devrait trouver sur What’s Trending une musique soignée, feutré, bien habillée, qui s’écoute confortablement installé.

Leo Sidran sera en concert au Suncet Suncide (Paris 1er arrt.) le 20 avril 2023


https://leosidran.bandcamp.com/album/whats-trending

http://www.leosidran.com/

https://www.facebook.com/leo.sidran/


jeudi 30 mars 2023

Ô LAKE "Still" (Patchrock & Night-Night Records/L’Autre Distribution) – 3 mars 2023

C’est sous le nom de Ô Lake, que le compositeur, multi-instrumentiste Sylvain Texier (ex Fragments) nous propose sa musique néo-classique, ambient et cinématographique. Still est son 3ème album studio. Le nom Ô Lake, fait référence au poème Le Lac écrit en 1820 par Alphonse de Lamartine (1790-1869). Pour la réalisation de son nouvel album, Sylvain Texier c’est donné les moyens, il est accompagné d’un orchestre à cordes de 40 musiciens. L’enregistrement c’est déroulé au Fame’s Project à Skopje (Macédoine du Nord). Still (également le titre du double album posthume de Joy Division-Ian Curtis) qui signifie "Toujours", contient neuf instrumentaux, dont Funeral dédicacé à son père. La peinture de la pochette réalisée par Pauline Taugourdeau (rennaise comme Sylvain Texier) reflète bien la musique qui si trouve. Pendant 40 minutes, on voyage entre ciel et terre dans une musique mélancolique, teinté de spleen, de lyrisme. L’émotion à fleur de peau est constamment en éveille. Dans le style sonore, on pense à Ryuichi Sakamoto, Harold Budd, Tangerine Dream, des mélodies qu’on imagine chez Kate Bush ou dans une BO de Takeshi Kitano. Still s’écoute avec les yeux, tant les harmonies, mélodies font apparaitre des images fragiles, qui peuvent disparaitre avec le vent, au contact d’un souffle trop brusque. Avec l’intimité du piano, la prestance relevée des cordes, le romantisme des violons, les compos de Ô Lake ont de l’élégance. Avec Still, âmes sensibles, ne pas s’abstenir !

Ô Lake sera en concert à l’Ubu (Rennes) le 8 avril 2023 et à la médiathèque la Source (St-Lô) le 10 juin 2023. Nota, pour le concert à St-Lô, le public portera un casque d’écoute.

https://olakemusic.bandcamp.com/album/still-album

https://www.olakemusic.com/

https://www.facebook.com/olakemusic