mardi 25 juillet 2023

THE CARS "The Cars" (Elektra) – 6 juin 1978


MES DISQUES A EMPORTER SUR UNE ILE DÉSERTE: Chronique n°31

Si en France le grand public n’a connu le groupe The Cars qu’en 1984 avec le tube-slow Drive extrait de leur 5ème album Heartbeat City, aux États Unis, The Cars était déjà une machine à tubes depuis bien longtemps. Dès la sortie de leur premier album éponyme en 1978, The Cars avec le single Just What I Needed, est entré à la 27ème place au TOP des ventes de disques, ce qui est déjà un bon début. Quant à l’album il se retrouve à la 18ème place du Billboard 200. Ensuite, au fil des albums suivant, The Cars ne va qu’accroitre sa popularité: l’album Candy-O (1979) à la 3ème place du Billboard, Panorama (1980) à la 5ème place, Shake It Up (1981) à la 9ème place, Heartbeat City à 3ème place du Billboard et première place dans le "Rock albums US". Leur dernier album Door to Door sorti en 1987 sera par contre une déception qui mènera le groupe à se séparer en février 1988.

Verso de la pochette de "The Cars" et montage pochette intérieure réalisée par David Robinson

Il n’est pas étonnant que The Cars est reçu du succès auprès du public américain, car ce groupe de Boston a su mélanger avec style, la power pop à guitare à la fois acidulé et rock électrique, la new wave synthétique, le rock FM calibré pour écouter leur musique en voiture (normal avec leur nom de groupe) sur les longues routes américaines. Il y a dans leur musique, un vent de liberté pop qui donne des ailes, l’envie de vivre à plein  poumon dans une décapotable au grès du vent.

The Cars c’est formé en 1976 avec en avant-poste l’auteur compositeur, guitariste, chanteur Ric Ocasek. A ces côté il y a Elliot Easton (guitare), Benjamin Orr (basse), Greg Hawkes (claviers) et David Robinson (batterie). Rick Ocasek découvre Benjamin Orr à la télé dans l’émission musicale Big 5 Show lors du passage du groupe Grasshoppers dans lequel joue Orr. Il entre en contact avec lui, et ensemble ils forment le groupe Milkwood qui sortira en 1972 l’album How Is the Weather. Dans ce groupe on trouve déjà la présence Greg Hawkes, non pas aux claviers mais au saxophone, ainsi qu’aux arrangements. Album sans succès, Ocasek et Orr forment le nouveau groupe Richard and the Rabbits. Avec un tel nom (suggéré par Jonathan Richman des Modern Lovers), pas étonnant qu’une fois de plus, le succès ne soit pas au rendez-vous. Ensuite, avec le guitariste Elliot Earston, Ocasek et Orr créés le groupe Cap’n Swing. La formation de ce groupe va changer avec l’apport de David Robinson, batteur du groupe The Modern Lovers. Cette nouvelle formation, Ocasek, Orr, Earston, Robinson, va donner The Cars, nom trouvé par David Robinson. Après quelques concerts avec Danny Schliftman aux claviers, Greg Hawkes va prendre ce poste définitivement,. Nous sommes en février 1977, The Cars est au complet, près à conquérir les chart US !

Pochettes des singles extraits de l’album "The Cars"

Le groupe est signé sur le label Elektra (The Doors, Love, Tim Buckey, MC5, The Stooges), qui désire avoir du sang neuf de la scène New Wave dans son catalogue, alors remplit de vieux requins (Eagles, Queen, Carly Simon, Jackson Browne), qui font tomber les dollars du haut des Charts comme "vache qui pisse". En 1977 Elektra commence à signer des jeunes groupes punk, avec Television, The Dictotors, mais c’est peu, pour une grosse major qui a pourtant signé à la fin des années 60, deux groupes proto punk importants, The Stooges et MC5. Ainsi, The Cars est le 3ème groupe issu de la New Wave et de l’art rock à être signer sur Elektra. Major oblige, le producteur pour ce premier album, est un mastodonde des studios, bien loin du DIY punk, avec aux consoles : Roy Thomas Bayer (Queen, Journey, Foreigner…). Avec la forte personnalité de Ric Ocasek, et les compos bien en place, le son de l’album ne tombe heureusement pas dans une soupe FM à guitares sirupeuses. Certes il y a un peu de bubblegum dans les mélodies taillées pour les routes en direction de la plage, mais les 9 morceaux de The Cars ont de la classe. Déjà en tête, la voix unique Ric Ocasek, au timbre bien New Wave -je mets les mains dans mes cheveux en pétard bien laqué-, et le mix grosse guitare, nappe de synthé en pagaille, et cœur pop sans chichi, sont des ingrédients qui plaisent à la fois au grand public et au public arty. Car, ici il y a pas mal de recherches mélodiques qui ne tombent pas dans le chemin balisé. Ric Ocasek a une oreille érudite qui lui permet de composer des morceaux au premier abord commercial et finalement plus complexe que nécessite une simple écoute. Ici, le terme de power pop prend tout son sens. Comme si les Beach Boys avaient fait une répète avec les Buzzcocks et XTC. C’est ce mélange pop arty qui donne à The Cars un style unique. Autre marque de fabrique de The Cars, les pochettes d’albums. Dès The Cars, les bases sont posées avec le visage souriant du mannequin, chanteuse, écrivaine, journaliste d’origine russe Nataliva Medvedeva. Tout comme chez Roxy Music, c’est un mannequin, pin-up sur les pochettes d’album qui sera le signe distinctif de The Cars. Pourtant, malgré que David Robinson ait proposé un visuel, c’est le label Elektra qui aura la décision final avec le sourire de Nataliva au volant d’une voiture. La proposition de David Robinson, n’est pour autant pas perdue, elle se retrouve sur la pochette intérieure du 33 tours vinyle. Mais à partir du 2ème album Candy-O, c’est lui qui aura le dernier mot pour la pochette finale. Ainsi, la belle pochette de Candy-O est une peinture du célèbre artiste de Playboy, Alberto Vargas. Sur leur 3ème album Panorama (1980), pas de pin-up sur la pochette, mais un drapeau à damier utilisé dans les courses automobiles pour signaler l'arrivée. Ce changement visuel ne leur portera pas chance, Panorama ne sera pas un succès. On retrouvera une pin-up sur l'album suivant, Shake It Up (1981).

Ce premier album des Cars me ramène à mon adolescence, quand j’écoutais les disques vinyles sur un tourne disque orange. J’ai découverts The Cars en 1979, quand j’étais en classe de 5ème. J’avais un pote Christian G., fan d’électronique, encore plus timide que moi, qui avait un grand frère qui possédait une belle collection de disques. Le dimanche après-midi j’allais chez lui en mobylette 103 Peugeot, écouter ses fameux disques, en dégustant des gâteaux préparés par sa gentille maman. Ce sont de bons souvenirs, sachant que 44 ans plus tard, The Cars tourne encore sur ma platine disque, entre temps devenue rouge.

Pochette du single "Dream Baby Dream" de Suicide (Island Records-1979) produit par Ric Ocasek

Après six albums, de nombreux singles, beaucoup de succès, dont le slow Drive (1984) qui a tourné en boucle sur MTV, fait chavirer, rencontrer des couples sur les pistes de danses des discothèques, The Cars se sépare en 1988. Rick Ocasek a entamé depuis 1982, en parallèle aux Cars, une belle carrière solo. Il a aussi produit les albums Suicide : Alan Vega-Martin Rev (1980), Away Of Life (1988), Why Be Blue (1992) de Suicide, dont le single culte Dream Baby Dream (1979), ainsi que plusieurs albums solo d’Alan Vega, dont Rick Ocasek est méga fan. Avec sa fortune récoltée avec le succès de The Cars, Rick Ocasek permet à Suicide et à Alan Vega de vivoter. Car si le statut de groupe culte pour Suicide avec leur premier album éponyme, sans oublier le succès du single Juke Box Baby pour Alan Vega, cela ne permet pas de nourrir suffisamment son homme. Etre un artiste culte et riche, ce n’est pas compatible !

Le 3 octobre 2000, Benjamin Orr meurt à l’âge de 53 ans du cancer du pancréas. En 2011, The Cars se reforme le temps d’un nouvel album titré Move Like This. Disque plutôt sympathique qui tient bien… la route. Le 15 septembre 2019, c’est au tour de Ric Ocasek de nous quitter à l’âge de 75 ans de mort naturelle. Les deux fondateurs de The Cars ayant quitté la route, l’aventure The Cars est bel et bien finie.

http://thecars.org/

https://www.facebook.com/TheCars








lundi 24 juillet 2023

ARTHUR & YU "In Camera" (Hardly Art) – 19 juin 2007


MES DISQUES A EMPORTER SUR UNE ILE DÉSERTE: Chronique n°30

En 2007, j’ai chroniqué pour le fanzine Abus Dangereux l’unique album du duo de Seattle Arthur & Yu (Abus Face 103-Déc/jan.2008). J’avais reçu le CD promo (= le CD glissé dans un simple carton carré). La semaine dernière à Gibert Joseph, je trouve le vais CD à seulement un euro. Et hop dans la poche… après le passage à la caisse ! Ainsi 16 ans plus tard, je réécoute l’album In Camera. Et là, franchement, cet album est resté une petite merveille lo-fi, je ne comprends pas qu’il n’ait pas plus tourné dans mon lecteur CD, car les 10 morceaux sont tous excellents. En faisant un tour sur le net, je vois qu’il n’y a pas eu de suite à cet album, c’est bien dommage.

Arthur et Yu sont les surnoms d’enfance de Grant Olsen et Sonya Westcott (ex Rogue Wave, We Are Loud Whispers). Ils se sont rencontrés suite à une annonce sur le site web Craigslist, site d’annonces pour la recherche d’emplois, de logement, messages divers liés à ces centres d’intérêts. C’est aussi un forum de discussion. Ce sont les influences musicales qui les ont rapprochés. Grant Olsen a composé les morceaux d'In Camera, joués de tous les instruments, chanté chez lui en mode DIY. Sonya Westcott y a rajoutée sa petite voix, donnant ainsi une patine sonore irrésistible. L’ensemble donne une musique indie folk, pop rock dans l’esprit des duos Lee Hazlewood & Nancy Sinatra, Dean & Britta, ainsi qu’au Velvet Underground, Mazzy Star, Yo La Tengo, TV Personnalities, Belle & Sebastien, The Pastels. Il y a dans le son fragile, de poche, d’Arthur & Yu, un doux parfum désuet échappé des sixties. Ce parfum, on aime le sentir, tant les souvenirs de notre culture musicale apparaissent comme par magie. Grant Olsen c’est servi d’un ordinateur pour enregistrer les compos. Cela lui permettait d’avoir plus de pistes qu’un magnétophone 4 pistes. Par contre en concert, pas d’ordi, le duo est accompagné de plusieurs musiciens. In Camera est la première référence du label Hardly Art, label créé par le fondateur de Sub Pop, Jonathan Poneman. Aujourd’hui Hardly Art en est à sa 162ème référence avec des belles signatures telles que Protomartyr, La Sera, La Luz, Grave Babies, Shannon and the Clams.

Malgré ce bel album artisanal, l’aventure Arthur & Yu sera de courte durée, comme un heureux accident suite à une annonce. Il y aura juste en 2009, un single publié dans la célèbre collection de Sub Pop Singles Club. Pourtant dans une interview publiée le 7 juillet 2007 sur le site Under The Radar, Grant Olsen disait : "Nous n’avons pas fait autant d’écriture collective sur ce disque que j’espère le faire sur le second." A noter qu’en 2007, notre duo a participé au morceau The Distance sur l’album Dumb Luck de l’artiste électro Dntel. En 2011 Grant Olsen publie sur Hardly Art, l’album The Ornament sous le nom de Gold Leaves. Mais dans cet album on ne retrouve pas la magie lo-fi fragile d’In Camera. En 2013, Sonya Westcott avec Ayumu Haitani créés le duo We Are Loud Whispers qui publierons l’album Suchness sur Hardly Art. Leur musique est un mélange d’électro pop organique dans l’esprit de Leila, Plaid, du label Warp. Un bel album étoilé qui n’a également pas eu de suite. C’est une constante avec Grant Olsen et Sonya Westcott, ils lancent des bonnes idées pour ensuite passer à autre chose. Avec eux pas de plan de carrière. Tant pis, on écoutera encore plus l’unique album In Camera.

https://www.hardlyart.com/collections/arthur-yu

https://arthurandyu.bandcamp.com/album/in-camera