mercredi 29 juillet 2020

THE LIMINANAS, le nouveau single "Calentita" est disponible depuis le 23 juillet 2020



Après la sortie de la B.O. du film Le Bel Eté de Pierre Creton et la B.O. du film Netflix The Last Days of American Crime d’Olivier Megaton,  Les Limiñanas reviennent avec un nouveau single Calentita avec en featuring Nuria, avec un clip réalisé par Jonathan Morton et Pierre Le Berrigaud
Calentita c'est "L'été sur cette plage de la Costa Blanca", des calamars, des chipirons, des moules et de l'eau fraîche. Les Limiñanas viennent revivifier votre été, que vous soyez en vacances ou non.



Je profite de la news pour sortir de mes archives, la chronique de l’album Le Bel Eté (Because Music) -15 novembre 2019- publié sur le site foutraque.com

L’année 2019 est décidément bien remplie pour le duo The Limiñanas. A peine remis de l’album Diabolique de L’Epée (=The Limiñanas + Emmanuelle Seigner + Anton Newcombe + Bertrand Belin), les voici avec un nouvel album pour la B.O. du film Le Bel Été réalisé par Pierre Creton, qui sort en salle au même timing que la sortie B.O. N’ayant pas vu le film, voici le pitch en copier-coller direct d’Allo Ciné : « Robert, Simon et Sophie vivent au bord de la Manche dans un quotidien d’habitudes. Nessim va entrer dans leur vie, suivi d’enfants, que la situation politique de l’Afrique menace. Tous ont traversé la Méditerranée pour se réfugier en France. Ils vont vivre tous ensemble en Normandie le temps d’un été ». Vu le sujet, on n’est pas dans le film de genre, ni dans la comédie, mais plutôt le film social et politique.

Notre propos, concerne ici la B.O. L’album débute avec un invité de choix, Etienne Daho. Il chante en anglais sur le single One Blood Circle. Pas étonnant que le chemin du rennais a fini par croiser celui des perpignanais (c’était à la Route du Rock), car c’est clair, ils ont des gouts en communs. Pour rappel le premier album d’Etienne Daho, Mythomane a été produit par Jacno, car en 1981, le jeune Daho est fan des Stinky Toys mais aussi de Marie et les Garçons, du Velvet Underground, de Françoise Hardy, de Serge Gainsbourg et de Saint Etienne (le groupe pop anglais), soit des univers pas très loin du son des Limiñanas (= ce son frenchy qui a fait craquer les anglo-saxons et plus particulièrement Anton Newcombe). Bref, une belle rencontre pour une nuit blanche ! L’album commence bien et se poursuis avec le style B.O. de film à la Ennio Morricone (avec l’instrumental Maria’s Theme en première ligne), style tant chéri par les Limiñanas. Certes ici pas de duel (au soleil) en gros plan à la Sergio Leone, car les plages de la Normandie ont remplacé le sable du grand canyon. Qu’importe, entre 3 répètes avec L’Epée, 5 concerts, Lionel et Marie ont trouvés le temps et l’inspiration pour composer les 11 morceaux de l’album. Et ça, c'est juste une bénédiction tombée du ciel. Si vous êtes fan, évidemment des Limiñanas, de B.O. à la Morricone et d’une certaine idée de la pop «esprit Tricatel », c’est clair, vous serez sous le charme de ce Bel Été qui traite pourtant d’un sujet d’actualité pas très facile à résoudre. Enfin, si vous désirez prolonger cet univers musical façon B.O., écoutez l’album Kino Music de Pierre Daven-Keller.

lundi 27 juillet 2020

MUSIC BOX RECORDS : Le label spécialisé dans la publication de Bandes Originales de Films.





Créé en 2011 par Laurent Lafarge et Cyril Durand-Roger, Music Box Records est un label indépendant français, spécialisé dans l’édition et la réédition de bandes originales de films et de séries TV. Les B.O. sont publiés au format CD et contiennent de nombreux bonus et un livret (écrit en français et en anglais) qui donne des informations pertinentes. En bientôt 10 ans d’activité, le label est à sa 184ème référence avec la B.O. de la série TV Romance composé par Eric Demarsan.  
Laurent Lafarge répond à nos questions.


Pouvez-vous nous raconter la création du label ? C’était en quelle année, par quel biais vous êtes-vous rencontrés, petite présentation des personnes qui dirigent le label ? Ce qui vous a motivé à vous lancer dans cette aventure ? Et pourquoi le nom Music Box ?
Cyril Durand-Roger et moi nous nous connaissons depuis un certain temps. Nous avions participé dans les années 1990 à un fanzine toulousain qui s'appelait justement Music Box créé par Patrick Garza, un de nos amis. Ce fut notre première incursion dans le milieu de la musique de film. Nous rédigions des critiques de B.O. ou des dossiers thématiques. Nous avons également pu rencontrer des compositeurs et des réalisateurs pour des interviews. Mais nous étions loin d'imaginer que vingt ans plus tard, nous déciderions de quitter nos emplois respectifs (Cyril travaillait dans une agence web consacrée au cinéma et moi dans le domaine scolaire) pour monter un label de musiques de films.


Vous vous rappelez depuis quand vous aimez les B.O. de films ? Quel a été le déclic (la B.O. cruciale) pour vous passionner pour ce genre musical ? Vos B.O. de chevet et pourquoi ? Quel est votre Graal en B.O. ?
J'ai toujours été attiré par le cinéma. J'ai passé mon enfance et mon adolescence à aller au cinéma et surtout à regarder des films en VHS (on était dans les années 80!). Je regardais aussi de nombreuses séries télévisées qui m'ont également aidé à forger ma culture musicale. Sinon, mes deux premiers souvenirs musicaux ont été la musique du film E.T. de John Williams (mes parents m'avait offert à l'époque le vinyle picture disc) et celle des Dieux sont tombés sur la tête de Johnny Boshoff. On ne peut pas faire plus opposé. Je pense les avoir énormément usés sur ma platine.
Je n'ai pas spécialement de B.O. de chevet ni de Graal car je ne pourrai jamais choisir un seul titre en particulier... j'en suis incapable !


Avant d’être amateur de B.O., êtes-vous avant tout cinéphile ?
Absolument, et même cinéphage car je n'aime pas m'enfermer dans un style ou un genre de film précis. Mais au fil des années, je me suis davantage intéressé à la musique seule car je peux écouter la musique d'un film que je n'ai jamais vu ou que je n'apprécie pas particulièrement. Seule la musique compte.





La première référence de Music Box est la B.O. de L’incorrigible, musique de  Georges Delerue. Pourquoi cette B.O. pour lancer le label ?
Tout d'abord Georges Delerue fait partie de nos compositeurs préférés. Ensuite nous voulions commencer avec une B.O. d'un film qui nous avait marqué tous les deux. Ce film fait partie de nos souvenirs d'enfance : Belmondo, les dialogues d'Audiard, la fantaisie de De Broca et bien sur le thème énergique de Delerue. De plus, comme cette B.O. n'avait jamais été éditée en CD, il fallait absolument faire quelque chose. Et puis, commencer avec le tandem Delerue / De Broca, c'était une belle entrée dans le milieu de l'édition discographique. 
 



La 2ème est un CD qui regroupe 3 B.O. très méconnues de François de Roubaix. Pouvez-vous nous dire quelques mots sur ce CD et ce que représente François de Roubaix pour vous ?
Je pense que François de Roubaix correspond à des souvenirs marquants pour notre génération qui est née dans les années 70. À l'époque de Chapi Chapo, nous étions trop jeunes pour connaître son nom mais on pouvait déjà reconnaître « sa pâte ». Et puis, grâce notamment à la fameuse compilation Les Plus Belles Musiques De François De Roubaix sortie en plusieurs volumes chez Hortensia à la fin des années 70, j'ai pu (re)découvrir les musiques des films Les Aventuriers, Le Samouraï, La Scoumoune, L'Homme orchestre... Il est donc important qu'il y ait une trace de la musique sur support physique. Sans cela, elle n'existe pas vraiment. Pour en revenir à notre CD regroupant les B.O. de trois films de Jean-Claude Roy, nous avions contacté Gilles Loison (biographe et le plus grand connaisseur de De Roubaix) qui nous avait proposé ce projet. Nous avons bien évidemment sauté sur l'occasion pour permettre à ces 3 musiques de De Roubaix d'exister en tant que telles et pour la toute première fois.

 


Parmi le nombre de vos sorties CD, on trouve des grands noms de la B.O. : Ennio Morricone, Bernard Herrmann, Lalo Schifrin, Nino Rota, Michel Legrand, François de Roubaix, Michel Magne, Francis Lai, Vladimir Cosma… Comment faites-vous pour avoir les droits de diffusion entre les droits du film (souvent avec des acteurs connus – Delon qui est très présent dans vos sorties CD), et du compositeur ? La B.O. la plus compliquée à sortir ? Quelques anecdotes sur vos périples pour avoir les droits ?
Nous devons d'abord savoir qui a les droits de la musique. Il y a différentes manières d'obtenir ces informations afin de localiser le propriétaire du master : auprès des précédents éditeurs, de la Sacem, du producteur du film, des compositeurs ou des ayant-droits. Chaque projet est différent en soi. C'est souvent plus compliqué pour une musique inédite qui n'est pas encore sortie. Mais il ne faut jamais baisser les bras et surtout être persévérant. Certains projets peuvent durer des années avant de pouvoir se réaliser. Il y a eu de nombreux projets compliqués (et il y en a encore). Celui qui a été le plus problématique à nos débuts concernait la B.O. du film L'Imprécateur (1977) (musique de Richard Rodney Bennett) car il impliquait deux producteurs. Et nous n'arrivions jamais à avoir la confirmation de l'un des deux. Je me souviens que nous avons passé des mois à le relancer sans arrêt à attendre sa réponse. Cela peut vite devenir un cauchemar.
Le plus laborieux dans ce travail de recherche de droits est d'obtenir une réponse claire et définitive de la part du producteur. Et l'on peut perdre des mois voire des années pour avoir son accord. Il reste ensuite le problème lié au matériel (bandes master, DAT etc.), mais c'est encore une autre étape à franchir.


 
Cyril Durand-Roger, Serge Franklin, Laurent Lafarge


Parmi tous les compositeurs que vous avez rencontrés pour éditer une B.O., souvent jamais sortie à l’époque sous format CD ou vinyle et K7, avec lequel (ou lesquels) avez-vous une relation, une complicité qui s’est installée avec le temps ? Quelques anecdotes à nous faire partager ?
Au fil du temps, nous sommes devenus complices avec Colette Delerue, qui a été la première à nous faire confiance (pour la sortie de L'incorrigible). Ensuite, ce sont de belles rencontres comme celle avec Serge Franklin que nous avions connu par l'intermédiaire de Gérard Dastugue (qui avait conçu l'album L'enfant des loups pour Lympia Records). Avec Serge Franklin, tout paraît si simple. Son enthousiasme et sa gentillesse nous ont permis de concrétiser de nombreux projets. Nous entretenons aussi un rapport privilégié avec David Bolling, le fils de Claude, qui apprécie beaucoup le travail que nous faisons autour des rééditions des musiques de son père. Nous avons également consolidé nos relations avec Philippe Rombi, Gabriel Yared, Philippe Sarde, et même avec la nouvelle génération comme Rob, Alexeï Aïgui et Olivier Cussac.

 


Pour rester dans les anecdotes/chemins pour aboutir à éditer une B.O., j’aimerais que vous nous racontiez celui de Tenue de Soirée écrite par Serge Gainsbourg, car cette B.O. est inédite. À l’époque de la sortie du film, il n’y a pas eu de disque dans le commerce ?
Si, la B.O. avait bien été éditée en vinyle et K7 à l'époque de la sortie du film et une réédition italienne en CD avait suivi en 1992. Quand nous l'avons rééditée en 2014, le producteur de la musique avait pu retrouver les bandes des sessions d'enregistrement au studio Ferber (dans lequel Serge Gainsbourg avait enregistré la musique). Grâce à cette trouvaille providentielle, nous avons pu inclure quelques morceaux inédits. De quoi ravir les fans les plus complétistes de Gainsbarre. Grâce à ce projet, nous avons pu rencontrer le réalisateur Bertrand Blier avec lequel nous avons passé un moment inoubliable à parler de cinéma et surtout de musiques.

  


Parmi vos nombreuses sorties, j’aime notamment la B.O. du film de Brian de Palma Obsession, que vous avez éditée à deux reprises. C’est (pour moi) étonnant qu’un label français puisse avoir accès à ce style de film culte avec un compositeur aussi renommé que Bernard Herrmann. Comment avez-vous fait ?
Beaucoup se sont étonnés que notre label ait pu rééditer l'intégrale de ce chef d'œuvre de Bernard Herrmann, et surtout se sont demandés comment nous avions fait. En même temps, nous étions nous-même étonnés qu'aucun label américain n'ait réussi à le faire. Certes, il y avait eu l'édition vinyle en 1976, les rééditions CD en 1989 sur le label Masters Film Music et en 1994 sur Unicorn. Pas évident de vous résumer en quelques mots cette épopée mais je pense que nous avons eu de la chance et que nous avons frappé aux bonnes portes au bon moment.
Pour les droits master, nous avions réussi à localiser le propriétaire de la musique qui n'était autre que le producteur du film. Il a accepté notre offre et nous avons signé le contrat avec lui.
En ce qui concerne la musique, nous avions noté qu'une édition vidéo du film était sortie en version remasterisée (aussi bien l'image que le son). Lors du visionnage du film, au vu de la qualité sonore de la bande son, nous en avons déduit que nous pourrions essayer de localiser les DME (c'est le format de mixage audio permettant de mélanger ou séparer chaque élément du son : dialogue, musique et effets sonores) qui avaient été remixés par Chace Audio. Il ne restait plus qu'à reconstituer l'intégralité de la musique de Herrmann à partir des bandes master de l'album d'origine (qui ne contenait pas tous les morceaux entendus dans le film) et des fichiers audio provenant de la piste son du film. Cela n'aurait pas pu être possible sans le savoir faire de Christophe Hénault, notre ingénieur du son chez Art & Son Studio. Cela a été un travail à la fois minutieux, épuisant et passionnant mais cela en valait la peine. Et à ce jour, c'est notre plus grand succès.


Car justement, vous n’éditez pas que des B.O. de films français, il y a aussi de nombreuses B.O. de films internationaux. Le travail est-il le même ?
Dans le fond c'est le même travail mais avec un côté plus « simple » avec les américains. L'avantage de travailler avec les studios américains, c'est qu'ils centralisent tout : le matériel (musique, photos, affiches) et les droits. Cependant, il faut bien avouer que le coût de production est beaucoup plus élevé que pour un projet français. Quand on subit un échec commercial, cela peut faire très mal... comme cela nous est déjà arrivé.




Sachant que cela demande beaucoup de travail pour chaque projet, comment faites-vous pour le choix de la B.O. sur laquelle vous allez plancher ? Et le travail pour trouver des inédits, car tous vos CD ont des titres bonus.
Nous choisissons avant tout les projets qui nous stimulent et nous plaisent. Nous ne pourrions pas passer trois ou quatre mois (ou plus) sur une réédition d'une musique qui ne nous intéresse pas. Nous sélectionnons instinctivement les musiques que nous aimons et même si certains films ne sont pas des chefs-d'œuvre, cela ne nous empêche pas d'apprécier leurs musiques. En fonction du matériel mis à notre disposition, nous pouvons intégrer ou pas des titres bonus, souvent mis de côté lors des précédentes éditions. C'est aussi un choix éditorial.




Vous prenez aussi beaucoup de risques, car vous n’éditez pas que des compositeurs connus avec des films à succès. Il y a aussi des compositeurs moins connus (comme Rob) avec des films récents limite inconnus du public. Parlez-nous de ce travail de défricheur ?
C'est aussi notre travail. Faire découvrir des compositeurs qui nous plaisent, en espérant que cela plaise aussi à notre public.
Nous avons tout de suite accrochés aux musiques de Rob, et dès que nous en avons eu l'opportunité, nous avons édité ses musiques en CD. Il y a une belle entente entre nous et il a un vrai petit public de fans.
Pour nous, le plus important, c'est de trouver l'équilibre entre se faire plaisir et faire en sorte  qu'un projet soit rentable, même pour un pressage limité à 300 exemplaires. C'est l'avantage d'être un véritable éditeur indépendant. Nous ne recevons aucune aide financière de quelque organisme que ce soit, contrairement à certaine majors, qui en ont pourtant moins besoin que nous. En même temps, c'est l'avantage d'être indépendant, nous n'avons de comptes à ne rendre à personne et sommes totalement libres dans nos choix artistiques et éditoriaux.





Autres risques, ce sont les coffrets. Dans la série Les B.O. introuvables il y a deux coffrets. Quelques mots sur ce travail qui doit, je pense prendre beaucoup de temps et demander de la patience ?
Au début quand nous avons lancé la collection Les B.O. Introuvables, nous ne pensions pas que ce serait un joli succès. L'idée de proposer des B.O. de films inconnus ou mal aimés par des compositeurs parfois méconnus ou oubliés, semblait assez risquée. Et je pense que le concept a plu dès le premier volume qui a été épuisé très rapidement. Cela nous a encouragé à continuer cette collection, qui va bientôt compter un troisième et même un quatrième coffret.
Ce genre de projet demande un peu plus de travail au niveau de la conception au vu du nombre de B.O. par coffret.
Notre but, avec cette collection, est de proposer aux béophiles une diversité musicale. Nous avons toujours eu cette conception en tête dès les débuts du label : mélanger les genres, nous adorons cela. Nous n'avons pas d'à priori sur l'éclectisme dans la musique de film contrairement à certains fans de B.O. (d'après ce que l'on peut lire sur Internet) qui ont bien trop souvent des idées arrêtées. Pour ma part, je prends autant de plaisir à écouter un orchestre symphonique, qu'une B.O. plus intimiste ou jazzy. C'est ce que nous adorons dans la musique de film – la pluralité des genres et de styles. Cela nous ennuierait d'écouter toujours le même style de musique, comme regarder le même genre de films.


 
Parmi vos sorties CD il y a aussi de nombreuses BO de séries françaises actuelles (près d'une vingtaine). Quelques mots sur le choix, votre démarche sur les séries, domaine plutôt en vogue depuis quelques années. Le public est au rendez-vous ?
Nous avons commencé à rééditer des musiques de séries télévisées depuis quelques années, notamment du Georges Delerue (Les Visiteurs, Les Chevaux du soleil...) et du Serge Franklin (The Saint, Princesse Alexandra...). Les séries les plus récentes concernent essentiellement celles mises en musique par Rob (Le Bureau des légendes, Les Sauvages). Effectivement, il y a un public pour cela. C'est pour cette raison que nous avons lancé cette nouvelle collection Les Grandes Musiques du Petit Écran qui va se consacrer essentiellement au patrimoine de la télévision française. Pour le premier volume, nous avons commencé avec deux très belles musiques de Raymond Alessandrini (Les Colonnes du ciel, Félicien Grevêche, deux séries des années 80). Nous avons déjà trois autres volumes qui sont prévus dans les mois à venir. J'espère que cette nouvelle collection suscitera l'intérêt des collectionneurs car il y aura beaucoup d'autres B.O. à sortir si le succès des premiers volumes est au rendez-vous.


À ce jour vous n’avez édité qu’une B.O. en vinyle, Madly (1970) de Francis Lai. Un premier essai concluant (vente, retombée auprès du public) ? Comment va se développer ce format vinyle au sein du label ?
Malheureusement, notre premier essai en vinyle a été décevant. Bien que le film soit produit et interprété par Alain Delon, Madly n'est pas très connu mais nous pensions que la notoriété de Francis Lai et la période du film (les années 70) allaient attirer davantage de curieux. La musique est pourtant superbe. De plus nous avions misé sur une pochette originale très réussie signée David Marques alias Dr. Papier, notre fidèle graphiste. C'est un bel objet, mais les ventes n'ont pas été au rendez-vous, alors que lorsque nous avions sorti cette même B.O. en CD, cela avait été un succès.
Nous ne comprenons pas trop l'engouement du vinyle aujourd'hui et le culte qui s'est créé ces dernières années autour de ce support. J'ai vraiment l'impression que c'est davantage du marketing lié à l'opportunisme des majors, un effet de mode. Je ne dis pas que le vinyle est mauvais en soi (même s'il y a à redire sur les avis dithyrambiques et parfois mensongers concernant le son) puisque j'ai moi aussi une collection de 33 tours, et pour la plupart des pressages originaux.
J'ai plutôt grandi avec le CD ou même les cassettes audio. D'accord, le vinyle est un objet plutôt sympa (le grand format met en valeur les visuels des pochettes) mais le CD (avec lequel on peut également faire de très beaux objets), est tellement plus pratique pour l'écoute d'une musique. Et je ne suis pas persuadé que le son des vinyles d'aujourd'hui soit meilleur que le CD, comme on l'entend trop souvent dans les médias et chez certains collectionneurs : la plupart des vinyles de ces dernières années sont faits à partir de sources numériques (comme pour le CD et le digital, bien évidemment). Alors qu'à l'époque, tout se faisait à partir de bande analogique et là je veux bien croire que le son soit différent et plus « chaud », l'adjectif qui revient le plus souvent dans la bouche des audiophiles. Ensuite, la qualité des vinyles dépend de nombreux paramètres (prise de son, mixage, mastering et bien sûr le pressage) qui ne sont pas vraiment respectés lors de la création de la matrice qui va permettre la reproduction des disques. Bref, nous sommes assez mitigés quant au retour de ce format, mais c'est la tendance du moment.
Ceci étant dit, je trouve dommage aujourd'hui qu'on oppose les 3 principaux formats : CD, vinyle et digital, comme s'il fallait que le CD disparaisse au profit du vinyle. Chaque format à son public. Et les « vrais » collectionneurs de B.O. restent très attachés au CD. 




Quelle est la meilleure vente du label ? Et votre déception côté CD qui n’a pas trouvé son public ?
Comme évoqué précédemment, Obsession a été notre plus grand succès avec plus de 3000 exemplaires vendus. Ce titre répondait vraiment à une demande. Ensuite, nous avons connu beaucoup de déception car malheureusement, une grande majorité des béophiles n'écoutent qu'un certain genre de B.O. (pour faire court, la musique orchestrale hollywoodienne). Donc dès que vous sortez de ce genre-là, vous prenez des risques.
Par exemple, pour la B.O. de A Fish Called Wanda (1988), nous avions investi beaucoup d'argent dans le remixage car le compositeur voulait refaire le mix de l'époque qu'il trouvait trop années 80. Au final, le CD est superbe avec un son fabuleux et des morceaux inédits (dont une chanson inédite interprété par John Cleese). Mais malgré la notoriété du film et la qualité de la musique de John Du Prez, le projet n'a pas été rentabilisé. Cela confirme que les musiques de comédies ne sont malheureusement pas assez populaires auprès de ce public.


En plus d’éditer des B.O., vous avez aussi un catalogue en ligne pour vendre des B.O. de vos confrères. Pour avoir acheté sur votre site des CD, je peux dire que vous faites un travail efficace pour l’envoi du CD. Ce travail de distribution est-il venu avant la création du label ? Ce travail n’est-il pas contraignant avec celui du label ?
C'est à partir de mai 2014 que nous avons commencé à proposer d'autres labels de B.O. sur notre boutique en ligne, donc trois ans après la création de Music Box Records. Il fallait d'abord maitriser l'édition discographique qui nous demandait beaucoup de travail. On sentait qu'il manquait une vraie plateforme indépendante en France pour la vente de CD des labels indépendants étrangers (La-La Land Records, Intrada, Varèse Sarabande, Quartet Records, Beat, GDM, Digitmovies...). La boutique parisienne Ciné Musique venait de fermer définitivement ses portes et nous avons pris, en quelque sorte, le relais auprès des collectionneurs. Le pari n'était pas gagné car il a fallu fidéliser de nouveaux clients qui n'achetaient pas forcément les CD que nous produisions.

 

Maintenant que vous avez un peu de bouteille, 10 ans ça commence à compter. Qu’est-ce qui a changé en 10 ans dans le milieu de l’édition de la B.O. ? Pour un jeune qui désire se lancer, quel conseil lui donneriez-vous, et ce qu’il ne faudrait pas faire ?
Pourtant, dix ans, c'est assez jeune. Beaucoup de choses ont changé en dix ans, et rarement en bien. Le marché est encore plus fragile qu'il y a dix ans. Pour vous donner un exemple, un CD que l'on a pressé à l'époque à 1000 exemplaires, serait pressé aujourd'hui à 500 ou 750 exemplaires maximum. Entre le téléchargement illégal et l'offre en streaming, la rentabilité des projets devient plus difficile, le public du CD se restreint d'année en année. C'est d'autant plus regrettable que les événements et les festivals autour de la musique de film n'ont jamais été aussi nombreux.
Pour notre label, c'est un combat au quotidien pour faire vivre la musique de film. Il est difficile de convaincre certains éditeurs de la nécessité de rééditer toutes ces B.O. qui « dorment » dans des cartons.

Si je devais donner des conseils à quelqu'un qui souhaiterait se lancer dans l'édition discographique, je lui conseillerais surtout de faire autre chose ! 


Que pensez-vous des éditeurs tels que Death Waltz Recording, Mondo qui sortent certes de beaux vinyles couleurs, mais à des prix très élevés (50 euros), idem La-La Land Records et ses coffrets CD à 70 euros ?
Je pense qu'il faut faire la différence entre ce que font Mondo et Death Waltz avec leurs vinyles et La-La Land avec leurs coffrets CD. Ce n'est pas du tout destiné au même public.
Pour les coffrets LLL, comme pour leur CD simples, il y a un vrai travail éditorial (avec des livrets passionnants, une restauration et un mastering de qualité). Ils font un travail de préservation exceptionnel (de la même manière que nos confrères Intrada, Quartet Records et autres labels italiens). Cela a un coût qui ne me paraît pas excessif compte tenu de l'ampleur du projet.
Oui, c'est vrai que l'achat de leurs vinyles peut devenir assez onéreux ; leurs prix sont plus élevés que ceux d'un CD, ce qui est normal puisqu'un vinyle coûte plus cher à produire et à fabriquer.
En ce qui concerne les vinyles de Mondo par exemple, ce sont de très beaux objets, mais pour moi, ça s'arrête là. En plus, ils sortent des B.O. qui ont déjà été éditées en CD avec davantage de contenus (aussi bien éditorial que musical). Le vinyle se destine davantage aux amoureux des « beaux objets » qu'aux amoureux de la musique. Un vinyle Mondo s'encadre alors qu'un CD de La-La Land s'écoute !





Dans le domaine de la B.O., il y a aussi un marché très fourni sur la B.O. de films italiens, notamment le film de genre (je pense entre autres au label italien Beat). Dans votre catalogue, le film de genre (giallo, thriller, western, érotique, horreur) est peu représenté. Pourquoi ?
Il est vrai que ce sont des genres que nous avons peu exploités, sauf peut-être l'érotisme (Emmanuelle 4, Histoire d'O 1 et 2...). Pour rappel, 90 % de notre catalogue est volontairement consacré aux musiques de films français. Et puis les labels italiens font cela très bien.


Quels sont les projets de sorties pour 2020-21 ?
Sans dévoiler les titres à venir, nous préparons quelques surprises pour nos dix ans que nous allons célébrer en 2021. Ce qui est sûr, c'est qu'il y aura le troisième volume des B.O. Introuvables à la rentrée. Un coffret qui fera de grands écarts esthétiques et musicaux ! Tout ce que nous aimons. D'autres volumes de notre dernière collection Les Grandes Musiques du Petit Écran verront le jour.


Un message, une demande à faire passer à nos lecteurs c’est ici !
Continuez à soutenir les vrais labels indépendants en achetant des CD ou des vinyles car sans cela, l'édition ou la réédition de B.O. deviendra impossible. 




Enfin, un mot sur la disparition d'Ennio Morricone ?
C'était un véritable génie de la musique, un monstre sacré de la musique de film et une référence incontournable pour tous les cinéphiles ! Ce qui est fascinant chez Morricone, c'est qu'il a abordé tous les genres musicaux avec une aisance incroyable. Sa disparition est forcément une grande tristesse mais il nous laisse tant de chefs d'œuvre à réécouter.


https://www.facebook.com/MusicBoxRec/


Poursuivez votre lecture BO de films avec une interview de Stéphane Lerouge, que j’ai réalisé il y a quelques années : https://paskallarsen.blogspot.com/2020/06/stephane-lerouge-restaurateur-de-bandes.html